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30 notes en mars 2008

Pour lire Dostoïevski

    Le débat s'est poursuivi pendant trois jours du côté de chez Virginie autour du thème ''Apprenons à éditer nos textes numériques". Hubert y est revenu aussi. Difficultés d'appréhender les formats, les typographies, les mises en pages, les différents livrels disponibles... Le chemin reste long à parcourir pour intégrer l'ensemble des contraintes et plaire au lecteur!
    Pour illustrer la chose. Vous voulez vous lancer dans la lecture de "Crime et Châtiment" de Dostoïevski sur votre nouveau livre électronique. Entre ces différentes versions disponibles au hasard, toutes gratuites, laquelle vous préféreriez? Laquelle vous chiperiez dans une bibliothèque... En ce qui me concerne sur l'Iliad, mon choix est fait, et vous?
PS: attention entre 656 et 1531 pages selon les versions, à prendre en compte aussi, non?


Hanlin V3 disponible en Espagne

    Un modèle que l'on oublie un peu de citer, c'est le Hanlin V3, du fabricant chinois Jinke. C'est pourtant pour l'instant le livre électronique le moins cher du marché avec un prix de 299€ sur le sol européen. Pour ceux qui hésiteraient à se le procurer sur le site de Jinke, on peut le trouver chez le distributeur espagnol Apollo 21. Il est en rupture pour l'instant mais cela ne devrait être que temporaire. On trouve d'ailleurs tous les livres numériques disponibles sur le marché avec aussi des packs (comme on dit). Avec un pack de 300 titres classiques en anglais, vous repartez avec un Cybook gratuit; avec un pack de 600 titres classiques, vous repartez avec un Iliad gratuit.
    Je ne sais pas ce que valent les livres classiques en question, structurés en PDF, mais je trouve l'idée excellente. Pour démarrer quelque chose dans des bibliothèques aussi, non?
    J'ai repéré aussi une présentation du Hanlin V3 très bien faite par un allemand qui s'exprime très bien en anglais, que je vous livre.


La gratuité est-elle l'avenir du livre?

    Vous vous rappelez de la fameuse Longue Traîne, cette théorie développée par Chris Anderson qui mettait le doigt sur l'importance des titres à faible rotation et leurs impacts significatifs sur les ventes totales. Fi des bests-sellers, l'avenir du numérique est dans les fonds de catalogues. Eh bien, il récidive maintenant avec un nouveau crédo, rien de moins que "La gratuité est l'avenir de l'économie" (via Nonfiction et Affordance). Déclinaison moderne du "aujourd'hui on rase gratis". J'ai essayé de réfléchir aux différents modèles évoqués dans l'article: freemium, subvention croisée, coût marginal zéro, labor-exchange, économie du don... tout un programme...
    Et je ne vois rien de très probant pour nos livres. Et vous?
    Nous donner les livres électroniques sous réserve d'acheter un certain nombre d'ouvrages par an? Bientôt une telle proposition pour le Kindle? J'avais déjà parlé il y a quelques temps d'une KillerApplication avec un abonnement mensuel.
    Aussi les bonnes vieilles recettes classiques (que nous avons su d'ailleurs préserver pour nos livres en papier), des publicités intercallées dans les pages et des livres entièrement financés par quelques groupes industriels... Les lecteurs sont-ils prêts à sauter le pas? Transformer les livres en magazines? Assurément non. Sur les Echos sur l'Iliad, les petits bandeaux récurrents, dont je dois dire que je ne fais même plus attention (ne le dites pas aux annonceurs). Mais est-ce que cette publicité va financer le système entier? Philippe Janet, le rédacteur des Echos, avait d'ailleurs expliqué à l'époque que c'était très marginal pour l'instant. Qu'en sera-t-il de nouveaux modèles pour la presse quotidienne?
    En finissant la lecture de tout cela, je ne peux pas m'empêcher de remplacer le mot "gratuité" par le mot "vol" qui lui est quand même intimement proche sur internet... C'est en effet un sacré avenir qu'il nous promet, ce Chris Anderson, nul doute que le débat va s'étendre. Voilà qui va sans doute aussi continuer de rassurer les auteurs et les éditeurs dans leur recherche de modèles économiques...


Excellent papier dans l'Express

    Un article intéressant de Guillaume Grallet dans l'Express (via Bruno Rives) qui fait bien le tour de la question: la technologie, l'offre actuelle, les disparités dans les prix, etc.
Minitel    Ce propos relevé: «Pour l'instant, nous en sommes encore au stade du Minitel par rapport à l'ordinateur: des objets coûteux, en noir et blanc, et sans véritable ergonomie. Mais d'ici à cinq ans, tout au plus, nous devrions disposer d'appareils aptes à séduire les jeunes générations» diagnostique Stéphanie Van Duin, directrice stratégie et développement du groupe Hachette (Grasset, Fayard, Lattès...).
A titre personnel, je ne considère vraiment pas mon Iliad comme un Minitel (j'en ai eu un à l'époque, Irexproductjpg600_2 d'ailleurs rappelez-vous, c'était gratuit), ce n'est pas non plus un Kindle; je ne me sens pas non plus "ancienne génération", je pense que les plus jeunes vont s'y intéresser bien plus vite que cela. Plus loin, Guillaume parle des enjeux chez les éditeurs: "On ne peut pas dire que l'émergence de l'e-book déchaîne l'enthousiasme à Saint-Germain-des-Prés. Il est vrai que trois piliers immémoriaux de l'économie des lettres risquent, avec son essor, de disparaître: la fabrication du livre, sa distribution vers les librairies et la problématique gestion des invendus. «La dématérialisation du livre pourrait être une catastrophe pour quelques maisons prestigieuses», confie même un observateur. Et cela en raison d'une spécificité bien française: nombre de gros éditeurs, comme Hachette, Gallimard ou Flammarion, contrôlent en effet également les circuits de distribution du livre. Du coup, ces maisons pourraient perdre sur les deux tableaux: non seulement le dernier Modiano rapportera moins de royalties à Gallimard (puisque la version numérique est vendue moins cher que la version papier), mais, en outre, l'éditeur ne percevra plus sa commission sur l'acheminement du livre vers les libraires."
    En recoupant (traduisant) les deux citations, on en déduit donc que les éditeurs se donnent cinq ans pour finir de rentabiliser leurs outils de distribution et préparer des portails numériques! après...
On apprend aussi qu'Amazon proposerait déjà 35% de droits d'auteur à ceux qui franchiraient le pas en s'affranchissant de leurs propres éditeurs - contre environ 12% sur un livre traditionnel...
    Amazon se réserve ni plus ni moins que la différence, 65%, une paille! Quand on pense que les libraires luttent depuis quarante ans pour obtenir une base de 40% sans succès auprès des éditeurs! Décidément, ces libraires, ces nantis de la chaîne du livre, comme disait certains...

PS
: pour l'objet couteux, les "jeunes générations" n'hésiteront pas à sauter le pas Outre-Atlantique avec des prix intéressants (merci à la faiblesse du dollar), notamment l'liad à 485 euros port compris (via Marc-André). Revendeur officiel à préférer aux revendeurs e-bay (voir blog Irex).


Les libraires seront numériques

Mob101_1189494510    Quelle lumineuse interview que celle parue ce week-end dans le journal suisse Le Temps. Le directeur général de Payot Librairie, Pascal Wandenberghe, donne son sentiment sur le développement de la lecture numérique et des nouveaux livrels avec un crédo, allons-y!
    "Il ne faut pas rater un train qui démarre! Même si l'offre n'est pas encore très développée dans le monde francophone, nous étudions ce marché de près. Nous nous préparons à commercialiser l'ebook dans nos librairies. Et sur notre site internet, nous vendrons des livres à télécharger. A l'avenir, nous pourrions même installer des bornes de téléchargement dans nos librairies. Mais nous y allons à notre rythme. Pour ce qui est du support, nous hésitons encore entre le ebook de Sony et celui de Philips, l'iLiad, qui est un peu plus cher, mais qui a une grande capacité de mémoire et une bonne ergonomie."

    A la sempiternelle question: "Certains vous diront que vous contribuez à la mort du livre, votre gagne-pain!" Pascal de rebondir avec intelligence: "L'ebook ne tuera rien du tout, pas plus que le livre de poche n'a été le fossoyeur de la création littéraire dans les années 1950. Ce ne sera ni une révolution, ni un flop. Le livre papier restera, il est lié affectivement aux œuvres littéraires. Mais il y a des nombreux écrits à caractère documentaire, pratique ou encyclopédique qui n'ont pas forcément ce rapport affectif au papier. Les canaux de commercialisation se diversifient, et c'est tant mieux: cela prouve que nous sommes dans un secteur économique qui peut aussi bouger."
    Et de pointer sur le véritable danger qui se prépare actuellement: "Le vrai risque réside à mes yeux dans la volonté de certains acteurs de vouloir créer des formats propriétaires et négocier des exclusivités avec les éditeurs, ce qui semble être l'option d'Amazon aux Etats-Unis. Dans cette situation, le choix pour le client de s'approvisionner où bon lui semble serait annihilé, ce qui à mon avis est contraire aux règles du commerce et à l'exercice de la liberté individuelle."
    Qui dira encore que les libraires subissent l'internet et le marché du numérique sans rien faire...
    Combattons les clichés, vivent les libraires numériques!