NOTE DU TRADUCTEUR

Née à Cracovie dans une famille d’universitaires profondément marquée par la culture germanique, Sophie est bilingue et parle avec autant de naturel l’allemand que sa langue maternelle, le polonais. En outre, elle émaille volontiers ses propos de mots français, signalés dans le texte par des astérisques.

Jusqu’à son arrivée aux U. S. A., en 1947, elle ignore tout de l’anglais. Deux ans plus tard, au début de ce récit, elle est devenue capable de s’exprimer dans cette langue avec aisance et spontanéité ; son anglais demeure néanmoins marqué par de « savoureuses impropriétés » que William Styron s’est appliqué à rendre de manière systématique. Ces « petits faux pas dans les fourrés du vocabulaire et de la syntaxe » se font de plus en plus rares avec le temps et finissent par ne plus se manifester que dans les moments d’intense émotion, en particulier sous l’empire de la tristesse ou du désespoir.

Par souci de fidélité au parti pris de l’auteur, on s’est efforcé de reproduire ces légères anomalies, qui expliquent la présence dans le texte de certains « polonismes » caractéristiques, en nombre volontairement restreint. On ne s’étonnera donc pas de voir que Sophie évolue avec peine dans le maquis des verbes et des conjugaisons, qu’elle s’obstine entre autres à former ses futurs et ses conditionnels avec la plus grande fantaisie. Par ailleurs, elle bute fréquemment sur l’emploi et la place des prépositions, tandis que, de façon très slave, elle jongle avec les adjectifs et les articles qu’elle n’hésite pas à supprimer à l’occasion.

Les progrès rapides de Sophie en anglais expliquent la disparition progressive de ces anomalies. Pourtant elle ne se départira jamais d’une certaine gaucherie, d’une raideur d’expression qui suffisent à rappeler que l’anglais n’est pas sa langue maternelle.