CROCODILUS NILOTICUS

C’est de manière endémique que le crocodile du Nil (Crocodilus niloticus) sévit sur le continent africain : à l’est, on en trouve de Madagascar jusqu’à l’Afrique du Sud ; à l’ouest, dans tout le bassin du Niger. Rapide, féroce et inexorable, cet animal compte au nombre des crocodiliens les plus gros et les plus craints de l’espèce. Les spécimens les plus développés atteignent jusqu’à vingt pieds de long et pèsent parfois leurs deux mille cinq cents livres. Placés dans les meilleures conditions, les jeunes grandissent d’environ un pied par an. Une fois arrivées à l’âge de cinquante ans pourtant, ces bêtes croissent plus en poids et en circonférence qu’en longueur proprement dite. Voilà pourquoi la différence de poids entre plusieurs animaux de quinze à seize pieds de long peut atteindre deux cent quatre-vingts livres, soit le poids moyen d’une bête de neuf pieds de long.

En règle générale, le Crocodilus niloticus se nourrit de poisson mais, chasseur actif, il dévore aussi tout ce qu’il peut attraper. Cela va du babouin à la tortue en passant par la gazelle, le gibier d’eau, le crocodile d’à côté, le léopard et l’homme. Les petites proies sont avalées d’un coup. Les grosses sont maintenues sous l’eau jusqu’au moment où elles se noient. Après quoi, elles sont démembrées et dévorées à loisir. Comme d’autres reptiles, le crocodile est incapable de mastiquer.

La peur que les Égyptiens avaient de cet animal s’est, au cours des siècles, transformée en une adoration de type fétichiste – le culte du crocodile. On a retrouvé de grands spécimens momifiés dans les tombes de certains pharaons. Un des rituels en honneur dans la tribu des Igbo Ukwu voulait que l’on sacrifiât régulièrement des chèvres aux divinités du fleuve et que, deux fois par an, l’on donnât des vierges à manger à deux crocodiles au ventre flasque parqués entre quatre murs tout spécialement à cet effet. Au IVe siècle avant Jésus-Christ, les armées de Perdiccas furent décimées par des crocodiles tandis qu’elles traversaient le Nil à Memphis : près d’un millier d’hommes périrent au cours de cet incident. Un siècle plus tard, c’est du moins ce que l’on raconte, le poète grec Callimaque se fit un jour voler sa lyre par un crocodile tandis qu’il composait des vers dans une barque flottant sur le Nil. Entendant de la musique le lendemain matin, il descendit sur la berge du fleuve et là, fut tout étonné de voir une énorme gueule verte sortir des flots… avec son instrument entre les dents ! Le poète se pencha en avant pour le lui reprendre. Bêtement.