FATIMA

Un garçon entre brusquement dans la tente, une rapière à double tranchant à la main. Dassoud lance un regard méchant, Johnson frémit. Mungo se remet debout à la hâte, remonte ses chausses et boucle sa ceinture.

— J’aimerais bien savoir quel crime nous avons… commence-t-il.

Dassoud l’expédie à terre. Un deuxième garçon se rue alors dans la tente, porteur d’un message pour Ali. Dassoud s’étant retourné vers ses compagnons, il s’ensuit un furieux colloque. Des doigts y sont secoués, des bras brandis, des barbes tirées. Dans tout cela l’explorateur ne parvient à reconnaître qu’un seul mot qu’on répète encore et encore comme une incantation : Fatima, Fatima, Fatima… En gardant les yeux fixés sur ceux qui confèrent, il sort subrepticement la main de sa poche pour tirer son compagnon par la toge.

— Johnson, lui glisse-t-il, qu’est-ce qui se passe ?

Johnson a les yeux grands ouverts.

— Chut ! lui répond-il.

Un instant plus tard, Ali se lève. Le Borgne ramasse son coussin de damas. Dassoud, de dégoût, jette sa rapière par terre, et tous les trois sortent de la tente d’une démarche majestueuse. L’explorateur et le guide restent seuls avec la sentinelle nubienne. Et les mouches de sable.

— Pssssiit ! Johnson ! reprend Mungo. Qu’est-ce que c’est que cette Fatima dont ils n’arrêtent pas de caqueter ?

— J’en sais foutre rien. Quoi qu’il en soit pourtant, je vous fiche mon billet que vous ne trouverez pas là de quoi perdre la tête…