13.
On a tant et plus décrit et célébré les illuminations et les dancings d’Empire City – cette ville éblouissante ! –, ses boîtes de nuit et ses clubs de jazz, ses avenues de néon et de chrome, ses hôtels chics, leurs thés dansants sur les toits éclairés par des chapelets de lampions. Mais, par cet après-midi automnal d’acier, notre destination est un endroit à mille lieues des avertisseurs et du tohu-bohu. Ce soir, nous descendons sous terre, dans un local situé bien loin des talons hauts et des marteaux-piqueurs, plus bas que les rats et les légendaires alligators, plus bas même que les ossements des Algonquins et des terribles loups. Au bureau 99, un petit box bien rangé, tout blanc et privé d’aération, au bout d’un couloir du troisième sous-sol de la bibliothèque municipale d’Empire City. Ici, à une table de travail qui se trouve à de plus grandes profondeurs que les voies mêmes du métro, siège la jeune Miss Judy Dark, sous-assistante documentaliste des volumes retirés du prêt. C’est ce que nous apprend la plaque nominative posée devant elle. C’est une créature pâle et menue, en tailleur gris uni, qui, à l’évidence, ne sait pas ce qu’est la vraie vie. Deux fois par semaine, un bonhomme au teint couleur de papier journal bouilli passe à son bureau pour emporter les livres qu’elle a officiellement déclarés morts. Toutes les dix minutes environ, les murs sont ébranlés par le grondement du métro qui roule à toute vitesse dans les quartiers chics au-dessus de sa tête.
En ce jour d’automne particulier, seule la perspective d’une nouvelle soirée solitaire s’offre à elle. Elle fera griller sa viande et s’endormira sur son livre, probablement une histoire d’amour et de magie. Puis, dans des rêves qu’elle-même trouve banals, Miss Dark connaîtra de nouvelles aventures en soie et en cotte de mailles. Demain matin, elle se réveillera seule et suivra la même routine.
Pauvre Judy Dark ! Pauvres petites bibliothécaires du monde entier, ces jeunes filles secrètement ravissantes, à la beauté défigurée à jamais par la cruauté d’une paire de grosses lunettes à monture noire !
Judy ferme sa serviette et éteint sa lampe, sans oublier de prendre son parapluie au portemanteau. Elle-même est une sorte d’ombrelle humaine, repliée, bien sanglée. Elle suit le long couloir et marche accidentellement dans une grande flaque ; chaque fois qu’il pleut, il y a des infiltrations au troisième sous-sol. Ses pieds sont trempés jusqu’à la cheville. Avec des chaussures qui grincent, elle pénètre dans l’ascenseur. Telle une plongeuse, elle remonte lentement à la surface de la ville. Après avoir relevé son col, elle se dirige vers la porte d’entrée de la bibliothèque. Ce soir, comme tous les soirs, elle est la dernière à quitter les lieux.
Un policier est posté à l’entrée. Il est là pour aider à garder le Livre.
— Bonne nuit, Miss, dit le policier en déverrouillant la lourde porte de bronze pour elle.
C’est un gars aux larges épaules, avec un menton en galoche et des yeux qui pétillent parce que les chaussures de la retardataire grincent.
— Bonne nuit.
Miss Dark est mortifiée par le bruit de ses pieds.
— Je m’appelle O’Hara.
Il a des cheveux drus et brillants, luisants comme une giclée de peinture noire.
— Judy Dark.
— Eh bien, Miss Dark, j’ai une petite question à vous poser.
— Oui, monsieur O’Hara ?
— Qu’est-ce qui pourrait vous arracher un sourire ?
Une douzaine de réponses cinglantes se bousculent sur ses lèvres, mais elle ne dit rien. Elle s’efforce ardemment de pincer la bouche, mais, à sa consternation, ne peut s’empêcher de sourire. O’Hara profite de sa confusion pour prolonger un moment leur conversation.
— Avez-vous eu l’occasion de voir le Livre dans tout le remue-ménage d’aujourd’hui, Miss Dark ? Vous aimeriez que je vous le montre ?
— Je l’ai regardé, répond-elle.
— Et qu’en avez-vous pensé ?
— Il est ravissant.
— Ravissant ? tente-t-il. Vous trouvez ?
Elle incline la tête, fuyant son regard, et sort dans la nuit. Il pleut, bien entendu. Le parapluie fait ce dont sa propriétaire n’a jamais été capable et Miss Dark rentre chez elle. Elle fait griller sa côte de veau et allume la radio. Elle dîne en se demandant pourquoi elle a menti au policier. En réalité, elle n’est pas allée voir le Livre de Lô, même si elle en meurt d’envie. Elle voulait y aller pendant l’heure du déjeuner, mais il y avait trop de monde massé autour de la vitrine. Elle se demande aussi ce qu’est donc le Livre, sinon ravissant.
Le Livre de Lô était le livre sacré des mystérieux anciens Cimmériens. L’année précédente – ainsi qu’il avait été largement rapporté à l’époque –, ce texte mythique, considéré depuis longtemps comme perdu, avait été retrouvé dans l’arrière-boutique d’une cave à vins de Manhattan. C’est le plus vieux livre du monde : trois cents pages d’antiquités, dans un étui de cuir incrusté de rubis, de diamants et d’émeraudes, consacrées aux étranges détails du culte de la grande déesse papillon de nuit cimmérienne, Lô. Aujourd’hui, il était montré au public dans le majestueux hall d’exposition de la bibliothèque municipale, derrière une vitrine en verre armé. La moitié de la ville, semblait-il, était venue l’admirer. Chassée par la cohue, Miss Dark était revenue au bureau 99 sans y avoir jeté ne serait-ce qu’un coup d’œil et avait pris son déjeuner sur place. À présent, levant les yeux de son assiette vide pour contempler les murs de son appartement vide, elle ressent un vif pincement de regret. Elle aurait dû accepter la proposition du policier. Il n’est peut-être pas trop tard, se dit-elle. Elle met son chapeau, son manteau et une paire de chaussures sèches et repart dans la nuit. En arrivant là-bas, elle prétextera auprès de l’agent O’Hara qu’elle a oublié quelque chose.
Mais, à son arrivée, l’agent O’Hara paraît avoir déserté son poste et, qui plus est, il a laissé la porte d’entrée ouverte. Curieuse et vaguement contrariée – et si quelqu’un essayait vraiment de dérober le Livre de Lô ? –, elle pénètre doucement dans le hall d’exposition. Là, sur le sol de marbre noir, des hommes masqués de sombre entourent le corps allongé de l’agent O’Hara. Miss Dark plonge derrière une tapisserie providentielle. Elle frémit d’horreur pendant que les inconnus – un trio simiesque en chandail de docker et casquette de vendeur de journaux – utilisent un ouvre-boîtes armé d’un diamant pour fendre le couvercle de la vitrine et délester ainsi Empire City de son livre. À la hâte, ils fourrent la relique dans un sac. Maintenant, que faire d’O’Hara ? Un des voleurs est certain, dit-il, que le flic l’a reconnu. Lui et O’Hara ont grandi dans le même pâté de maisons il y a bien longtemps. Ils auraient peut-être intérêt à supprimer ce pauvre crétin.
C’en est trop pour la sous-assistante documentaliste des volumes retirés du prêt. Elle se précipite dans le hall empli d’échos avec le vague plan d’effrayer ou, au moins, de détourner les bandits de leur funeste projet. À moins qu’elle ne puisse les éloigner en attirant leur attention de son côté. Profitant de la confusion momentanée créée par son apparition et son « Non ! » retentissant, elle s’empare du sac contenant le Livre sacré de Lô et sort de la galerie en courant. Ayant retrouvé leur présence d’esprit, les voleurs se lancent à sa poursuite, pistolet au poing. Des jurons jaillissent de leurs lèvres en torrents de signes typographiques et de ponctuation erratique.
Miss Dark, terrifiée, mais pas au point que cela l’empêche de nourrir la pensée ironique que, pour la première fois de sa vie, elle sait l’effet que cela produit d’avoir des hommes qui lui courent après, fonce vers l’endroit le plus sûr qu’elle connaisse : son coquet petit trou carré sous terre. Elle ne peut pas se permettre d’attendre l’ascenseur. En dévalant l’escalier de secours tête baissée, elle a l’étrange sensation que le Livre de Lô s’est animé dans ses bras et palpite. Mais non, c’est juste l’écho de son cœur battant !
Ils la rattrapent dans l’interminable couloir du troisième sous-sol. Elle se retourne, un pistolet étincelle, puis pousse une éclatante fleur blanche. Mais, dans ce couloir sombre et exigu, le projectile se perd. Il ricoche, tricotant un indescriptible réseau de traînées de vitesse d’un bout à l’autre du couloir avant de se loger, finalement, au cœur d’une canalisation du plafond. La conduite se casse en deux. De celle-ci dégringole une ligne à haute tension, tel un serpent qui choit d’un arbre sur un porcelet. Elle atterrit dans la flaque même qui a abîmé les chaussures de Miss Dark un peu plus tôt. Maintenant, une foultitude de watts parcourt son corps frêle et le circuit de fil d’or et de pierres précieuses incrusté sur l’étui en cuir du Livre de Lô. Un éclair inonde tout de blanc, sauf le squelette röntgen noir de Miss Judy Dark, qui pousse un cri peu distingué : « Aïe ! »
— Joli coup, commente un des malandrins.
Ils dégagent le livre de sa molle étreinte et décampent avec lui vers le monde de la surface, laissant Miss Judy Dark pour morte.
Ce qu’elle est peut-être. Elle s’envole, cheveux au vent, dans une colonne spiralée de fumée et de lumière. Étonnamment, la première chose qu’on note à son sujet n’est peut-être pas qu’elle semble voler nue, son intimité artistiquement voilée par les spires de son hélice astrale. Non, ce qu’on remarque en premier, c’est qu’on dirait qu’il lui a poussé une immense paire d’ailes de papillon à deux pointes. Elles sont vert d’eau, d’aspect diaphane. Comme l’avion de Wonder Woman, elles sont même peut-être visiblement invisibles, à la fois spectrales et solides. Tout autour d’elle, à l’extérieur de la colonne qui monte en spirale à l’infini, la réalité se dissout en paysages oniriques et prodiges géométriques délirants. Des échiquiers se diluent, des paraboles se recourbent en astérisques, en volutes et en soleils. De mystérieux hiéroglyphes fusent, telles les étincelles d’une chandelle romaine. Agitant régulièrement ses grandes ailes fantomatiques, Miss Dark accepte étrangement tout cela sans sourciller. En effet, morte ou vivante, il n’y a aucun doute que Judy Dark, cette ombrelle humaine, s’est enfin ouverte vers le ciel.
Finalement, dans le lointain vaste et intemporel, elle distingue quelque chose qui a une apparence de solidité, une tache de gris minéral, vacillante. En se rapprochant, elle aperçoit un éclair argenté, un massif spectral de cyprès, le socle et le péristyle d’une ébauche de temple pyramidal, à la fois druidique et babylonien, lui rappelant de surcroît vaguement la grande institution dans les entrailles de laquelle elle a si longtemps passé ses journées à rêver. Il paraît toujours plus imposant, puis la spirale finit par s’effilocher autour d’elle et s’évanouit pour la déposer sur le seuil du temple, vêtue désormais de ses seules ailes. Les énormes portes, coulées en argent massif et ornées de croissants de lune, grincent en s’ouvrant lentement vers l’intérieur pour la laisser entrer. Après un dernier regard à la chrysalide brisée de son ancienne vie, Judy Dark franchit le portail et pénètre dans une chambre haute. Là, dans un rayonnement surnaturel émis par la queue de mille vers luisants qui se tortillent, siège sur un trône barbare une géante aux cheveux de jais, avec d’immenses ailes vertes, des antennes sensuellement fourrées et une expression pénétrante. De toute évidence, c’est Lô, la déesse papillon cimmérienne. Nous le savons avant même qu’elle n’ouvre sa bouche couleur de sorbe.
— Toi ? s’étonne la déesse, ses capteurs s’inclinant de consternation. Tu es celle élue par le Livre ? C’est toi qui vas être la nouvelle Maîtresse de la nuit ?
Miss Dark – pudiquement enveloppée à présent de volutes de fumée de neige carbonique – concède que cela semble improbable. Nous remarquons seulement maintenant, peut-être pour la première fois, que notre Judy ne porte plus de lunettes. Ses cheveux lâchés ondoient autour de son visage avec l’abandon de Linda Darnell{75}. Tout d’un coup, l’idée de sa qualité de Maîtresse de la nuit – quoi que cela puisse signifier – est on ne sait pourquoi moins difficile à avaler.
— Sache qu’avant que ma patrie, la grande Cimmérie, ne soit plongée dans des ténèbres éternelles, explique la déesse, elle était gouvernée par des femmes.
Ah ! se souvient-elle, le visage pensif, les yeux noyés de larmes. C’était le paradis ! Tout le monde était heureux au royaume de Cimmérie, paisible, content. Les hommes, en particulier. Et puis un mécontent au cœur racorni, Nanok, se forma aux voies de l’effusion de sang et de la magie noire, et s’installa sur un trône d’obsidienne. Il envoya ses armées de démons combattre les pacifiques Cimmériens ; l’issue était inévitable. Les hommes prirent le pouvoir dans le monde entier, Lô fut bannie dans les régions infernales et le royaume de Cimmérie plongé dans sa légendaire nuit perpétuelle.
— Et depuis que la Cimmérie est tombée dans les ténèbres éternelles, reprend Lô, les hommes ont créé un beau gâchis. Guerres, famines, esclavage. Les choses allaient si mal au bout d’un moment que je me suis senti le devoir d’envoyer de l’aide. Une championne, sortie du monde des ténèbres pour voler dans les ténèbres, mais toujours à la recherche de la lumière. Une guerrière, ayant assez de pouvoir pour aider à réparer les nombreuses injustices répandues dans le monde.
« Malheureusement, poursuit la déesse, son pouvoir n’est plus ce qu’il était. Elle est capable de garantir, pour ainsi dire, une seule Maîtresse de la nuit à la fois. La précédente incarnation ayant enfin, après mille ans, passé la limite d’âge, la déesse papillon a envoyé son livre sacré pour trouver une nouvelle jeune fille digne d’endosser les ailes vertes magiques du grand papillon lune.
« J’avoue que j’avais en tête quelqu’un d’un peu plus… robuste, ajoute-t-elle. Mais je pense que tu devrais faire l’affaire. Pars, maintenant. (Elle agite son antique main fine et, entre elle-même et Judy, trace le contour d’une lune dans les airs.) Retourne dans le royaume des mortels pour hanter la nuit où le mal rôde si souvent. Tu possèdes à présent tout le pouvoir mystique de l’ancienne Cimmérie.
— Si vous le dites, balbutie Judy. Mais, enfin…
— Oui ? Qu’y a-t-il ?
— Je crois vraiment qu’il me faut des vêtements.
La déesse, une vieille routière, ne peut réprimer le vague croissant pâle d’un sourire.
— Tu vas t’apercevoir, Judy Dark, que tu n’as qu’à imaginer quelque chose pour qu’il en soit ainsi.
— Mince alors !
— Prends garde… Il n’y a pas de force plus puissante que celle d’une imagination débridée.
— Oui. Je veux dire, oui, maîtresse.
— D’habitude, les filles trouvent toujours une tenue exigeant des bottes. J’ignore pourquoi. (Elle lève les épaules, puis déploie la large envergure de ses ailes.) Maintenant, pars. Et n’oublie pas : si jamais tu avais besoin de moi, tu n’as qu’à venir à moi dans tes rêves.
À des mondes et des éternités de là, dans un vieil immeuble délabré en bordure du fleuve, deux des voleurs s’attaquent aux pierreries de l’étui du livre ancien au moyen d’un ciseau et de pinces. Ligoté et bâillonné, l’agent O’Hara est affalé sur une chaise, dans un coin. Il pleut toujours, l’air est un peu frais et le troisième voleur tente d’allumer du feu dans un vieux poêle noir ventru.
— Tiens, dit le premier voleur en tendant le bras pour arracher une liasse de pages du Livre de Lô. Je parie que ce vieux bouquin va bien brûler.
On entend un léger froufroutement, comme une robe de bal bouffante ou une immense et soyeuse paire d’ailes. Levant les yeux, ils voient une ombre géante entrer par la fenêtre.
— Une chauve-souris ! s’écrie un des voleurs.
— Un oiseau ! dit un autre.
— Non, une demoiselle ! braille le troisième, pas fou, s’élançant ventre à terre vers la porte.
La demoiselle se retourne, ses yeux lancent des éclairs. La toilette qu’elle a imaginée pour elle est vert irisé, partie La Veuve joyeuse, partie Norman Bel Geddes{76}, ornée d’ailettes et de rémiges, et lacée devant avec une savante complexité. Dans sa culotte moulante verte, le bas de son corps est à peine dissimulé par un semblant de jupon, ses quinze kilomètres de jambes galbés dans un collant résille noir, et ses bottines ont des talons aiguilles. Elle porte un capuchon violet, surmonté d’une paire d’antennes richement fourrées, qui lui couvre les yeux et le nez mais laisse ses boucles noires dégringoler librement sur ses épaules nues. Et dans son dos resplendit une paire de grandes ailes à double pointe, non plus fantomatiques mais vertes comme des feuilles, chacune parée d’un œil fixe aveugle.
— C’est ça, rentre dans ton trou de souris, crie-t-elle à l’adresse de celui qui a pris la direction de la porte.
Elle allonge le bras. Une lumière vert vif ondoie de ses doigts tendus et prend le voleur dans son filet avant qu’il puisse atteindre la sortie. On entend un grésillement désagréable, un craquement de brindilles et de pommes de pin, au moment où un squelette humain entier est rapidement comprimé à l’intérieur d’une peau très exiguë. Puis un silence. Enfin un tout petit cri aigu.
— Zut ! s’exclame la femme papillon.
— Elle a transformé Louie en souris ! hurle le premier voleur.
Lui aussi court maintenant.
— Plus un pas !
La lumière verte bondit une nouvelle fois. Avec un bruit encore plus répugnant que la fois précédente, les atomes et les fibres du corps du voleur sont réarrangés et réduits à de froids atomes de glace bleutée. Il scintille, tel un homme de diamant. Les bords de son chapeau mou étincellent.
— Hop là ! murmure la femme papillon. Bonté divine !
— Quel genre de poupée es-tu donc ? exige de savoir le dernier voleur. Pourquoi tu nous cherches ?
— Je veux juste vous en faire baver, mon grand, répond-elle.
D’un seul coup, le bonhomme explose en flammes d’une telle intensité qu’elles font fondre son complice d’antan et le transforment en une petite flaque sur le sol. La queue roussie et fumante, la souris fonce se mettre à l’abri de la latte de parquet la plus proche.
— J’ai encore de petites choses à apprendre, je crois, songe la Maîtresse de la nuit de fraîche date.
Elle détache le policier, qui a commencé à reprendre connaissance dans toute cette agitation. Il ouvre les yeux à temps pour voir une femme court vêtue, avec d’énormes ailes vertes, s’élancer dans le ciel. Un moment encore, il se racontera, sans y croire totalement, que cette vision était la dernière image d’un rêve déjà à demi effacé. Ce n’est qu’après être rentré chez lui et être allé examiner sa belle gueule cabossée dans la glace, qu’il découvre sur sa joue la trace rouge en forme de papillon des lèvres de l’inconnue.