1699 : Naissance à Grenoble du grand Pierre Beyle, grand-père de Stendhal, futur procureur au Parlement de Grenoble.
1728 : Naissance à Grenoble d'Henri Gagnon, grand-père maternel de Stendhal.
1747 : Naissance à Grenoble de Chérubin Beyle, père de Stendhal. En 1757 naît Henriette Gagnon, sa mère. En 1781 a lieu le mariage de ses parents.
1783-1799 : L'ENFANCE GRENOBLOISE
Le 23 janvier 1783 naît Henri Beyle, à Grenoble, dans la maison paternelle de la rue des Vieux-Jésuites, aujourd'hui rue Jean-Jacques Rousseau. Trois ans plus tard viendra sa sœur Pauline, et en 1788 naîtra sa deuxième sœur Zénaïde-Caroline, qu'il détestera et accusera de « rapporter ». Le 23 novembre 1790, le jeune Henri aura le chagrin de voir mourir sa mère, dont il était, de son propre aveu, amoureux fou. De son père le sépare déjà une haine inexpiable ; Chérubin Beyle, désespéré par la mort de sa femme, vit dans la retraite et, selon son fils, dans l'ennui et la petitesse. Cette première enfance laissera à Henri Beyle d'amers souvenirs. Sa tante Séraphie, que, croit-il, son père courtisait, l'aurait persécuté ; il ne trouve de tendresse et de compréhension que près de son grand-père Gagnon, médecin renommé, et homme éclairé, et de la sœur de celui-ci, la tante Élisabeth au cœur « espagnol » et aux maximes généreuses. Il passe de très longues heures chez son grand-père, près de la place Grenette, dans une fort belle maison, dont il existe encore la terrasse ombragée d'une treille.
1788 : C'est l'année des premiers souvenirs révolutionnaires. Henri Beyle, dont le grand-père sera, en décembre, député aux États provinciaux de Romans, assiste entre autres à certaines scènes de la fameuse « journée des Tuiles ».
1791 : Henri, qui n'a vu encore que les alentours de Grenoble, où son père possède des domaines, et où il doit faire de mornes promenades, trouve un éphémère bonheur à séjourner chez son oncle Romain Gagnon, aux Échelles, en Savoie ; les forêts et les torrents le ravissent.
Décembre 1792 : C'est le début de la pire époque de son enfance, la tyrannie Raillane ; ce prêtre réfractaire et austère, « vrai jésuite », l'aurait opprimé et dégoûté à jamais de l'hypocrisie et de l'autorité. Le prêtre exécré rejoint dans ses souvenirs le Père, dont il n'est que l'instrument despotique. Cet esclavage dure jusqu'en 1794.
1793 : Par une prompte revanche, Henri voit son père atterré par la mort de Louis XVI. Il se vantera plus tard d'avoir été déjà un jacobin et un patriote intransigeant. Chérubin Beyle, « notoirement suspect », est arrêté, et ne sera libéré définitivement qu'en juillet 1794. Henri Beyle assiste à la Terreur à Grenoble, il s'amuse parfois de l'effroi de ses parents, royalistes ou « modérés », chez qui se dit le dimanche une messe clandestine. Un soir de l'hiver 1794-1795, il s'échappe et assiste avec un peu de répulsion à une séance de la Société des Jacobins. Mais la vue des beaux cavaliers de l'armée républicaine l'enthousiasme.
1796-1799 : Henri Beyle entre à l'École Centrale de Grenoble. Son grand-père a participé à l'organisation de l'École et prononce un discours à la séance d'ouverture. Henri jusque-là solitaire, et esclave, jouit d'un peu plus de liberté. D'autant plus que la terrible Séraphie meurt en 1797. Il connaît enfin des jeunes gens de son âge, dont certains resteront ses amis. Il demeurera trois ans à l'École Centrale, d'abord assez médiocre sujet, puis élève brillant ; il remporte des mentions, puis des prix en dessin, en belles-lettres, en mathématiques surtout ; il compte, pour quitter Grenoble, sur un succès à Polytechnique. C'est aussi l'époque des premières passions : il aime timidement la sœur de son ami Bigillion, et non moins timidement l'actrice Virginie Kubly. Enfin, le 30 octobre 1799, il part pour Paris, où il doit passer l'examen d'entrée à Polytechnique. Il y arrive le 10 novembre, soit le 19 brumaire.
1799-1806 : AMOURS ET LECTURES.
1799 : Henri Beyle oublie bien vite l'examen, il s'enferme dans la solitude et l'ennui ; il doit loger chez les Daru, rue de Lille, qui entreprennent de le protéger. Dès le mois de janvier 1800, Pierre Daru le prend dans ses bureaux au ministère de la Guerre.
1800 : C'est la grande année beyliste. Pierre Daru, inspecteur aux revues, le fait participer à la campagne d'Italie. Henri Beyle passe le Saint-Bernard et reçoit le baptême du feu au fort de Bard. Son arrivée en Italie n'est qu'une suite d'enchantements ; à Ivrée, il entend « le Mariage secret » de Cimarosa ; à Milan, il découvre l'amour vénal, et l'amour-passion en la personne d'Angela Pietragrua, qui sera sa maîtresse, mais en 1811, à l'automne, grâce à ses protecteurs, il revêt l'uniforme du 6e dragons, et se trouve sans coup férir sous-lieutenant. Il va de garnison en garnison en Lombardie. L'année suivante le trouve dans l'Italie du Nord, errant de ville en ville, à la suite du général Michaud, dont il est l'aide de camp. Mais l'ennui vient, et à la fin de 1801 il obtient un congé et rentre en France. Il a appris l'italien, écrit ses premiers essais dramatiques, et commencé son Journal.
1802-1805 : Henri Beyle vit à Paris, qu'il ne quitte que pour des séjours plus ou moins longs à Grenoble. C'est là qu'en janvier 1802 il connaît Victorine Mounier, sa nouvelle passion, aussi platoniquement aimée que les précédentes. Surtout, Beyle dévore livres sur livres et se forge sa doctrine personnelle, la « Filosofia Nova », consignée dans des cahiers de notes et de réflexions. Il a démissionné de l'armée, et ne rêve plus que d'égaler Molière. Il est amoureux de sa cousine Adèle Rebuffel : il ne réussit qu'à être l'amant de sa mère. Il pénètre le monde du théâtre, prend des leçons de déclamation, et fait la connaissance de la jeune actrice Mélanie Guilbert, qu'il séduira non sans peine, grâce à sa minutieuse stratégie, ou malgré elle. La politique le tente parfois : il réagit en républicain à l'avènement de l'Empire. Mais le grand fait, plus que la conception de Letellier, pièce jamais achevée, c'est la lecture passionnée de L'Idéologie de Tracy.
1805 : Il est devenu un dandy, mais son père est avare. D'où l'idée de « faire de la banque » à Marseille avec son ami Mante. Justement Mélanie a un engagement là-bas. A la fin de juillet, le voilà établi à Marseille, amant de Mélanie, et employé dans la maison de produits coloniaux Ch. Meunier et Cie. Est-ce le départ vers une rapide fortune dans le grand négoce ?
1806 : Non, c'est encore l'ennui. Beyle, qui a continué lectures et réflexions, se fatigue de Mélanie et du commerce, que la guerre condamne à stagner. Il lui faut se rallier, renouer avec les Daru, participer à la ruée vers les places. Revenu à Paris en juillet, il en repart le 16 octobre, à la suite de Martial Daru. Est-il entré à Berlin à la suite de Napoléon, comme il le prétendra, avec ses pistolets chargés ? Toujours est-il qu'il se trouve à la fin de l'année à Brunswick en qualité d'adjoint provisoire aux commissaires des Guerres.
1806-1814 : LA PASSION DE L'AMBITION.
1806-1808 : Pour gagner fortune et titres, et vivre enfin à sa guise, Henri Beyle se fait fonctionnaire impérial à la suite des Daru. Il reste d'abord à Brunswick dans le même poste, puis est chargé d'administrer les domaines impériaux dans le département de l'Ocker, et, en outre, de surveiller les biens du roi de Westphalie. Il aime, sans espoir, Mina de Griesheim. Il écrit le Voyage à Brunswick et divers essais historiques ; il s'initie à la littérature anglaise. Il parcourt l'Allemagne, et doit tenir tête à une émeute en septembre 1808.
1809 : Rappelé à Paris, à la fin de 1808, il repart en avril pour la campagne de Wagram. Il suit l'armée, n'assiste pas, malgré ses dires, à la grande bataille, mais recueille d'atroces impressions de guerre. A Vienne, où il entend le Requiem pour la mort de Haydn, il appartient aux services de Martial Daru, intendant de la province, qui lui donne une mission en Hongrie. Il aime une certaine Babet, et s'éprend de la comtesse Pierre Daru, la femme de son protecteur.
1810-1811 : C'est l'apogée de sa carrière. En août 1810, il entre comme auditeur au Conseil d'État ; il est vite nommé inspecteur du mobilier et des bâtiments de la Couronne. Il a cocher, voiture, maîtresse entretenue, l'actrice Angeline Béreyter. Il travaille pourtant, et l'on a de lui de scrupuleux rapports sur les mobiliers des demeures impériales et les musées. Mais il ne sait pas faire sa cour, ni porter les fameux bas de soie du solliciteur. Un seul point noir : après de mûres réflexions, et la « Consultation pour Banti », il a engagé la bataille pour avoir la comtesse Daru. Mais c'est une bataille perdue. Il prend sa revanche : un voyage en Italie, dont il tient le Journal, fait de lui l'amant comblé et sans doute trompé d'Angela Pietragrua. Il revoit Milan, découvre Florence, Rome, Naples, a la première idée de l'Histoire de la Peinture en Italie. Mais au retour l'ambition marque le pas, et Beyle ne progressera guère plus.
1812 : Le 23 juillet, après une audience de l'Impératrice, il part rejoindre le quartier général de l'Empereur, muni du portefeuille des ministres ; il y parvient le 14 août, et un mois plus tard entre à Moscou. Il en repart, précédant la retraite, le 16 octobre, chargé de diriger les approvisionnements a Smolensk, Mohilev et Vitebsk. Il supporte les dangers et les souffrances avec un inaltérable sang-froid. Mais il perd les manuscrits de l'Histoire de la Peinture.
1813 : Son nouveau poste est en Silésie, à Sagan, où il remplit les fonctions d'intendant. Il est las et déçu : il n'est ni baron, ni préfet, ni maître des requêtes. Il a vu Bautzen, et a été attaqué par les cosaques. Un bienheureux congé lui permet de revoir Milan, et sa chère Lombardie.
1814 : Il est à Grenoble, adjoint au comte de Saint-Vallier, commissaire extraordinaire dans la 7e région militaire. Il faut organiser la résistance à l'invasion. Mais « le feu sacré » est éteint ; las des tracasseries administratives, las de l'ambition, et de l'Empire, il demande son rappel. Il se trouve à Paris lors de l'entrée des Alliés. C'est la chute de sa fortune ; Beyle adhère aux actes du Sénat, espère encore un poste de la protection de Mme Beugnot. En mai et juin, il écrit les Lettres sur Haydn, Mozart et Métastase, où le plagiat est cynique. Enfin, en juillet, il quitte Paris pour Milan : fuit-il les Bourbons, fuit-il l'obscurité et la gêne ? Il commence sa vraie vie, enfin écrivain, enfin dilettante.
1814-1821 : MILANESE.
1814 : A milan il retrouve sa liaison orageuse avec Angela. Tandis que son père, ultra, est décoré de la Légion d'honneur, et devient maire de Grenoble, il voyage, écrit, désespéré des mépris d'Angela.
1815 : Le retour de l'île-d'Elbe ne lui fait pas regagner la France ; mais Waterloo le navre. Il voyage à Turin et Venise. Il travaille beaucoup à l'Histoire de la Peinture. Avec Angela, c'est la rupture, douloureuse, vers la fin de l'année.
1816 : Il passe presque toute l'année à Milan, qu'il ne quitte que pour un séjour d'avril à juin à Grenoble, et pour un séjour à Rome à la fin de l'année. Il se trouve à Grenoble, sans doute par hasard, au moment du complot de Didier. On le tracasse pour son traitement de non-activité : il songe à faire fortune en Russie. Mais surtout, un soir à la Scala, dans la loge de Mgr di Breme, il est présenté à Byron. Et cette année, il a la révélation du vrai romantisme avec l'Edimburgh Review.
1817 : Stendhal est à Rome, à Naples, Milan, puis, au printemps, à Grenoble et à Paris, enfin à Londres au mois d'août ; il revient à Milan à la fin de l'année. L'Histoire de la Peinture en Italie, signée M.B.A.A., paraît à la fin de juillet et Rome, Naples et Florence en 1817, de M. de Stendhal, Officier de cavalerie, est annoncé en septembre à la Bibliographie de la France. Les Lettres sur Haydn traduites en anglais ont paru à Londres. Nouvelle rencontre mémorable : celle de Destutt de Tracy le 4 septembre à Paris.
1818 : L'année se passe à Milan, sur les lacs, dans la Brianza. A deux reprises il travaille à la Vie de Napoléon, commencée l'année précédente et d'ailleurs impubliable ; il entreprend d'intervenir dans la querelle du « romanticisme » : il s'est lié avec le futur groupe du Conciliatore. Mais en mars il est tombé amoureux de Métilde Dembovski, qui presque tout de suite le traite fort mal. C'est peut-être l'événement majeur de sa vie, qui va l'occuper entièrement pendant de longues années, et qu'il ne pourra jamais évoquer sans être bouleversé.
1819 : Il commet pour Métilde mille extravagances. En vain : elle n'accepte presque plus de le voir. Stendhal ne quitte l'Italie que pour Grenoble et Paris : son père est mort, il faut régler la succession, qui se révèle fort mince. Comme il est électeur, il en profite pour voter pour le conventionnel Grégoire.
1820 : Sa passion est sans espoir. Nouveau chagrin : ses amis milanais le prennent quelque temps pour un espion. Il écrit De l'Amour, qu'il termine et envoie en France.
1821 : Stendhal est pris dans le tourbillon des conjurations libérales. Ses amis sont carbonari : Métilde elle-même est suspecte. On lui conseille de partir : et le 13 juin, désespéré, il quitte Milan, où il ne reviendra qu'en 1828, pour être immédiatement expulsé. Il s'installe à Paris, et va passer quelques semaines à Londres.
1821-1830 : LA VIE PARISIENNE.
1822 : A Paris, Stendhal publie De l'Amour, annoncé le 17 août à la Bibliographie de la France, et commence à collaborer aux revues britanniques, qui, malgré certaines interruptions, recevront des articles de lui jusqu'en 1828. Il fréquente déjà le salon du comte de Tracy et le grenier de Delécluze.
1823 : Stendhal, qui vit dans l'intimité de la Pasta, connaît son premier véritable succès en présentant au public français Rossini : sa Vie de Rossini est annoncée en novembre à la Bibliographie de la France. Il s'est placé en première ligne sur le front du romantisme littéraire par le premier Racine et Shakespeare, paru en mars. Il termine l'année par un séjour à Florence et Rome.
1824 : En mai il devient l'amant de la comtesse Curial, dite Menti, qui l'aimera avec violence jusqu'en 1826. Dilettante expert, il écrit sur la peinture et la musique dans le Journal de Paris ; le Globe accueille des articles de lui ; il devient presque important dans le romantisme libéral.
1825 : C'est l'année des pamphlets, le deuxième Racine et Shakespeare en mars, d'Un nouveau complot contre les industriels en décembre. Ami de Courier, de Mérimée, de Jacquemont, habitué des grands salons libéraux, il va être redouté pour son « esprit ».
1826 : Fin de l'amour de la comtesse Curial. Voyage en Angleterre. Il publie une deuxième édition très remaniée de Rome, Naples et Florence, et écrit Armance, qui verra le jour en 1827.
1827 : Année mi-parisienne, mi-italienne.
1828 : ler-2 janvier, Stendhal est expulsé de Milan. Il est financièrement aux abois ; les revues anglaises ne paient plus ; il n'a plus qu'un traitement de réforme. Il faut solliciter : sera-t-il archiviste, bibliothécaire ? Il est nommé vérificateur-adjoint des armoiries, titre qui ne lui rapporte rien. Il songe au suicide. Pris par la mode des « scènes historiques », il écrit Henri III.
1829 : Il écrit et publie les Promenades dans Rome, qui sont annoncées le 5 septembre par le Journal de la Librairie. On prend au sérieux sa connaissance de l'État romain, et le gouvernement lui aurait demandé un rapport sur les cardinaux papables. Liaison avec Alberthe de Rubempré, dite Sanscrit, ou Mme Azur, qu'il aime vigoureusement. Se sentant délaissé, il part en voyage dans le Midi et en Espagne (d'où il est expulsé) : à son retour, en décembre, il se voit définitivement supplanté par son ami Mareste. Mais il rapporte l'idée du Rouge et écrit Vanina vanini, Le Coffre et le Revenant, qui vont paraître dans la Revue de Paris, et Mina de Vanghel, qui restera inédit de son vivant.
1830 : Il écrit Le Philtre, Le Rouge et le Noir, collabore au National et au Temps, il rencontre en janvier l'autre chef du romantisme, Hugo. A la même époque, Giulia Rinieri lui déclare qu'elle l'aime malgré son âge, et sa laideur ; prudemment, il ne lui cède pas tout de suite ; le 22 mars, il est son amant. Tandis qu'il achève Le Rouge, la Révolution de 1830 le ravit, et le venge. Il note les progrès de l'émeute dans les marges du Mémorial de Sainte-Hélène. Pour la première fois il aime et estime les Parisiens. Il sollicite un poste de préfet, puis de consul ; le 25 septembre il est nommé consul à Trieste. Il part le 6 novembre ; le même jour il demande Giulia en mariage. Le 13 le Journal de la Librairie annonce Le Rouge et le Noir.
1830-1842 : LE CONSUL DE FRANCE.
1830-1831 : La police et le gouvernement autrichiens s'inquiètent, et le 4 décembre, alors que Stendhal a rejoint son poste depuis quelques jours, les Débats annoncent que Vienne lui a refusé l'exequatur. Il quitte Trieste le 31 mars, il a été nommé consul à Civita-Vecchia. Le gouvernement pontifical, que cette nomination n'enchante pas, préfère éviter tout incident avec la France et accorde l'exequatur le 25 avril. Stendhal, qui est arrivé à son poste le 17, va et vient entre Civita-Vecchia et Rome. Du milieu d'août au milieu de septembre, voyages à Sienne, Florence, Prato, Viterbe. Il écrit, à la fin de septembre, San Francesco a Ripa, qu'il ne publie pas.
1832 : Stendhal est chargé du service financier des troupes françaises débarquées à Ancône. Après cette mission, il voyage et délaisse son poste ; on le voit à Rome, à Sienne, où il retrouve Giulia, encore aimée passionnément, à Florence, dans les Abruzzes. Du 20 juin au 4 juillet, il écrit les Souvenirs d'égotisme et, en septembre-octobre, ébauche un roman : Une position sociale.
1833 : Il va encore à Sienne pour Giulia. Mais elle se marie en juin. Stendhal a trouvé les « manuscrits italiens » et commence à en préparer l'adaptation. Du 11 septembre au 4 décembre il est en congé à Paris. Au retour, il voyage de Lyon à Marseille avec Musset et George Sand partant pour Venise.
1834 : Année de résidence et de tracas : il ne quitte Civita-Vecchia que pour Rome. Premières escarmouches avec son chancelier, Lysimaque Tavernier, et le ministère pour ses absences. « Je crève d'ennui. » Stendhal, en mai, entreprend de traiter pour son compte une idée de roman de son amie, Mme Gaulthier : c'est Lucien Leuwen, auquel il travaille « de rage-pied » pendant dix-neuf mois.
1835 : Encore résidence et ennui. Stendhal sent son poste menacé. Il est vrai qu'en janvier il a reçu la Légion d'honneur à titre d'homme de lettres. Il est quelque peu amoureux de la comtesse Cini, qu'il appelle Sandre. En septembre, il abandonne Lucien Leuwen et en novembre il commence la Vie de Henry Brulard. Mais le dégoût va croissant, et l'inquiétude : « Faudra-t-il vivre et mourir sur ce rivage solitaire... J'ai tant vu le soleil... » Enfin ! en mars 1836, il a un congé de trois mois ; il laisse en plan Henry Brulard et, le 24 mai, débarque à Paris.
1836-1839 : Son congé de trois mois dure, grâce à la protection du comte Molé, trois ans. Il essaie d'abord de renouer avec la comtesse Curial ; puis il livre bataille, mais en vain, à Mme Gaulthier, sa vieille amie. De novembre 36 à juin 37, il travaille aux Mémoires sur Napoléon ; d'avril à juin 1837, il écrit le Rose et Vert ; en 1837 encore, il fait paraître dans « la Revue des deux Mondes », Vittoria Accoramboni (1er mars) et Les Cenci (1er juillet). De la fin de mai au début de juillet 1837, il fait dans le centre et l'ouest de la France un voyage ; aussitôt revenu, il écrit les Mémoires d'un Touriste, qui seront annoncés en juin 1838 à la Bibliographie de la France. De mars à juillet 1838, il repart pour une longue tournée dans le sud-ouest et le sud-est de la France, en Suisse, en Rhénanie, en Hollande et en Belgique. A son retour, il publie La Duchesse de Palliano (15 août) ; en septembre, il a la première idée de La Chartreuse, mais c'est au retour d'un court voyage en Bretagne et en Normandie qu'il écrit son chef-d'œuvre, du 4 novembre au 26 décembre 1838. Il publie ensuite dans la Revue des deux Mondes L'Abbesse de Castro, qu'il avait commencée en septembre 1838 : la première partie paraît le 1er février 1839, la seconde le 1er mars. La Chartreuse est annoncée par le Journal de la Librairie le 6 avril. Il ébauche encore deux nouvelles italiennes : Suora Scolastica, Trop de faveur tue, deux nouvelles françaises, Le Chevalier de Saint-Ismier, Feder, et conçoit le roman de Lamiel. Mais le 24 juin, il faut partir pour rejoindre son poste : le 10 août, le consul est dans son consulat.
1839-1841 : Il ne quitte son poste que pour Rome, Naples, où il va avec Mérimée (octobre-novembre 1839), Florence pendant l'été de 1840 et toujours pour Giulia qu'il avait d'ailleurs revue à Paris. A Civita-Vecchia il s'occupe de fouilles et de chasse, et poursuit inlassablement Lamiel, commence une nouvelle, Don Pardo, corrige La Chartreuse. En 1840, il s'éprend d'Earline ; mais cette nouvelle « guerre » pour une mystérieuse inconnue est encore perdue en juin. Le 15 mars 1841, il a une attaque d'apoplexie ; il se remet assez vite, mais il s'est « colleté avec le néant ». Dernière intrigue avec « Madame Bouche » ; puis muni d'un congé, il rentre en France en novembre 1841.
1842 : Stendhal ne peut se remettre au travail qu'en mars 1842 : il songe à un nouveau recueil de nouvelles. Mais le soir du 22 mars il a une nouvelle attaque dans la rue, sur le trottoir de la rue Neuve des Capucines. Il meurt dans la nuit sans avoir repris connaissance.