— Où est Mary Ann ? demanda Connie Bradshaw, qui se tenait sous l’arche aux pompons rouges de Mme Madrigal. Je croyais que tu avais dit qu’elle serait là ?
Brian choisit un joint sur une assiette Wedgwood.
— Elle est là. Du moins… je l’ai aperçue, en-haut.
— Mince, ça fait des millions d’années lumière qu’on ne s’est plus vues !
— Vous êtes de bonnes amies, toutes les deux ?
— Oh oui, les meilleures amies du monde ! En fait… on s’est un peu perdues de vue et tout ça, mais bon… Tu sais comment ça se passe dans cette ville.
— Ouais.
— Euh… Brian ? Je crois qu’il y a quelqu’un qui veut te parler.
— Ah… Salut, Michael.
— Salut. Dis, t’aurais pas vu notre G.O., par hasard ?
— Qui ça ?
— Mary Ann.
Brian tira une bouffée du joint, puis le passa à Connie.
— On en parlait, justement. Je me demande ce qu’elle fout. Je croyais que c’était elle qui orchestrait cette orgie ?
— C’est bien elle. Je suppose qu’elle se maquille, ou quelque chose comme ça. Hé, t’en va pas. J’ai quelque chose pour toi.
Il s’esquiva dans la cuisine et en revint avec un petit paquet enveloppé dans du papier aluminium.
Brian rougit :
— Oh, mec, dit-il. On avait dit pas de cadeaux.
— Je sais, lui renvoya Michael, mais ceci n’est pas vraiment pour Noël. J’ai juste oublié de te l’offrir avant.
— C’est sympa ! lança Connie, radieuse.
Brian jeta un coup d’œil en sa direction, puis regarda à nouveau Michael. Le sourire de celui-ci était plus malicieux encore que de coutume.
— Michael, ce n’est quand même pas…
— Allez ! s’écria Connie. Je ne peux plus supporter ce suspense !
Brian regarda Michael droit dans les yeux et sourit :
— J’y vais ?
— Ben ouais. Plus vite tu l’ouvriras, plus vite tu pourras l’utiliser.
— Exactement ! renchérit Connie.
Brian déchira le paquet. Il avait déjà deviné quand le lourd anneau métallique jaillit du papier cadeau.
— C’est un beau spécimen, Michael. Très joli.
— Tu es sûr ? Je peux aller l’échanger si tu…
— Non. J’en suis dingue.
Michael garda son sérieux :
— J’espère qu’il est à ta taille.
— Qu’est-ce que c’est ? demanda Connie.
Brian le lui tendit pour qu’elle puisse l’admirer.
— Chouette, hein ?
— C’est ravissant. À quoi ça sert ?
Le regard de Brian se détourna sur Michael pendant une fraction de seconde, avant de se poser à nouveau sur Connie.
— C’est… une décoration, dit-il, l’air comblé. On la pend au sapin de Noël.
Michael prit un plateau de brownies dans la cuisine.
— Ils sont fourrés avec ce qu’il faut ? s’enquit-il.
Mme Madrigal ne fit qu’esquisser un sourire.
— Je m’en doutais, conclut Michael.
— Mary Ann est déjà descendue ?
— Pas encore.
— Mais qu’est-ce qui peut bien la…
— Je peux aller voir, si vous voulez.
— Non, mon grand, merci… J’ai besoin de toi ici.
— Vous attendez d’autres personnes ?
Elle regarda sa montre.
— Une seule, dit-elle vaguement, mais je ne suis pas sûre que… Enfin, rien de certain.
— Mme Madrigal ? Est-ce que… tout va bien ?
Elle sourit et l’embrassa sur la joue.
— Je suis avec ma famille, non ?
Quand Michael retourna dans le salon, il faillit lâcher les brownies.
— Mona !
— En chair et en os.
— Merde alors ! Et qu’est-ce qui s’est passé avec D’orothea ?
— Elle fête un Noël blanc avec ses parents. À Oakland.
— Il neige à Oakland ?
— Oh, c’est une trop longue histoire, Mouse !…
Il déposa le plateau et la prit dans ses bras :
— Putain, ce que tu m’as manqué !
— Ouais. Même chose pour moi.
— En tout cas, tu n’as pas l’air de t’en porter plus mal.
— Oui, lâcha-t-elle en souriant. Toujours la même Mona : souriante face à l’adversité — que dis-je ? — à la perversité !