Adam et Ève


— Prue ?

— Mmm ?

— Tu veux du café ?

— Mmm… Ne te lève pas déjà. Je suis si bien.

— Tu as l’air. Tu es belle.

— Merci.

— Et ton chauffeur ?

— Quoi, mon chauffeur ?

— Tu es partie depuis trois heures. Il ne va pas s’inquiéter ?

— Il a l’habitude d’attendre. C’est pour ça que je le paie.

— Mais… S’il appelle la police ?

— Il n’appellera pas la police. Pourquoi l’appellerait-il ?

— Pour rien. Parce qu’il commence à faire nuit, c’est tout. Je me disais qu’il s’inquiéterait à ton sujet.

— Il fait déjà noir ?

— Mmm…

— Si tu veux que je m’en aille, je…

— Je ne veux pas que tu t’en ailles.

— Tant mieux.

— Si j’en avais le pouvoir, tu ne t’en irais jamais. Nous nous couperions tous les deux de la folie qui règne en ce monde et… Dieu que c’est bon !

— Mmm…

— Tes cheveux sont si doux. Comme ceux d’un bébé.

— Mmm…

— C’est sincère, ce que je dis, Prue.

— Mmm…

— Tu reviendras ?

— Mmm…

— Tu ne mens pas ?

— Non.

— Tant mieux. Continue comme ça.

— Mmm…

— Je sais qu’il ne faut pas qu’on nous voie ensemble. Je le sais bien.

— Luke…

— Non, écoute-moi. Je te connais. Je sais que ce n’est pas facile pour toi. Promets-moi seulement que tu ne te tortureras pas à cause de ça, plus tard.

— Me torturer ?

— Que tu ne te sentiras pas coupable. Que tu ne te puniras pas pour avoir aimé un homme qui ne peut pas faire partie de ton monde.

Silence.

— C’est la vérité, n’est-ce pas ? Tu le sais, et je le sais aussi. Ce qu’il y a entre nous ne peut exister qu’ici. Et ce ne sera jamais assez. Je sais tout ça, Prue, et je l’accepte. Je veux que tu en fasses autant.

— Luke, jamais je ne…

— Oublie le mot « jamais ». Oublie le mot « toujours ». Tout ce que je veux, Prue, c’est que tu viennes ici de temps en temps. Promets-le moi et je serai heureux.

— Je te le promets.

— Je peux te montrer des choses merveilleuses.

— Tu m’en as déjà montré.

— Je crois qu’il vaut mieux que tu t’en ailles, à présent.

— Très bien.

— N’aie pas peur, Prue. Je t’en prie.

— De quoi ?

— De nous.

— Je n’en aurai jamais peur.

— Rien n’est moins sûr.

— Je ne comprends pas.

— Reviens-moi, c’est tout. OK ?

— Bientôt.

— Je t’attendrai.