Elle dirait oui. Oui avec son petit corps ardent de chat maigre épousant celui de l’homme. Oui à son beau visage pareil à une lune. Oui à ses yeux nickel étonnés. Oui à sa voix, un baryton profond et naturel. Oui à ce qu’elle percevait finement comme la bonté de cet homme, sa droiture. Oui à sa bouche qu’un mot inconsidéré de sa part pouvait blesser. Oui à son courage. À son audace. Car elle avait été mariée à un autre homme, même si elle n’avait pas été sa femme. Un autre homme l’avait épousée, même s’il ne l’avait pas aimée. Elle était vierge en amour et vierge dans sa chair quoiqu’elle eût senti la semence de son jeune mari couler acide et brûlante comme de la bile sur son ventre, et dans les poils humides et broussailleux, entre ses jambes. Mais oui, elle épouserait Dirk Burnaby. Oui au bouquet de fleurs des champs. Oui aux caresses de ses grosses mains douces, et de sa langue. Oui à la chaleur, à la solidité, à la taille et au poids étonnants de son pénis. Cette pensée aurait paru à Ariah une heure auparavant, avant deux rapides verres de champagne, la plus interdite de toutes. À présent, c’était la plus luxuriante, la plus charmante des pensées. Oui aux baisers, aux morsures de sa bouche. Oui à ses épaules, ses cuisses, son dos musclés-un-peu-empâtés. Oui à ses cheveux tombant sur son visage, et sur le sien. Oui bien qu’une partie d’elle-même sût qu’il la quitterait, lui aussi. Oui bien qu’une partie d’elle-même sût qu’elle était damnée. Oui bien qu’étant damnée, elle ne méritât pas un tel bonheur. Oui bien qu’étant damnée, elle se moquât pas mal de savoir si elle méritait le bonheur ou si elle était damnée. Oui à l’intelligence évidente de cet homme. Oui à ses bonnes manières et à son sens de l’humour. Oui parce qu’il les faisait rire tous les deux, sans en avoir l’intention. Oui parce que son rire était un rire franc et profond qui empourprait son visage gamin. Oui à son poids se coulant sur le sien. Oui à cette fluidité, qu’elle n’aurait pu prévoir. Qu’elle n’aurait pu imaginer. Oui au risque de grossesse, qui ne préoccupait pas davantage Ariah dans la soudaineté du moment qu’il n’aurait préoccupé n’importe quelle être femelle dans le feu de la première copulation. Dans le feu du premier amour. Dans le feu, la frénésie, la folie du premier amour. Oui bien que (dans sa morbidité) elle vécût dans la terreur d’être déjà enceinte des suites de sa désastreuse nuit de noces. De cet unique jaillissement de sperme acide et brûlant comme de la bile. Mais oui au désir nu de cet homme pour elle. Oui à son odeur de pain au four. Oui à ce qui brillait dans ses yeux, son amour pour elle. Oui au fait (elle le savait !) qu’il la connaissait à peine. Oui à cette sensation dans ses reins comme une flamme. Oui au fait qu’elle montait plus haut, toujours plus haut, comme le jet d’une fontaine. Oui au fait que cela la fît gémir, crier. Oui bien que sa bouche dût être hideuse, béante ainsi. Les lèvres retroussées sur ses dents serrées. Oui à l’homme qui lui faisait si agréablement l’amour, comblant son corps qui était à la fois petit et infini, inépuisable.