Août

Le 3, Céline écrit à Denoël : « J’ai envoyé à Steel une lettre de verte engueulade à propos des comptes. Il me dégoûte. [...] Ce Figuière est bien aussi con que Steel ce qui n’est pas facile. »

D’emblée l’écrivain prend en grippe son associé américain, dont il estropie systématiquement le nom, à cause des « comptes ». Par ailleurs il aimerait voir son livre paraître sous la forme d’une édition de luxe, et trouve que son éditeur, qui est en vacances, ne s’en préoccupe pas assez : « je n’ai vu jusqu’ici aucun Segonzac ou autres Matisses se précipiter sur les rangs... Alors j’avance Mahé. Peut-être songez-vous à pressentir ces papes ? Car enfin c’est votre rôle et je crois qu’il est temps. »

On ne sait s’il y croit vraiment, car il écrit au même moment à Henri Mahé : « Si tu pouvais faire dans le sinistre, il y a l’édition de luxe du Voyage qui reste à prendre. Mais ce n’est pas tes cordes, crois-je ? »

Denoël n’est pas emballé par cette idée d’édition de luxe : le temps de la bibliophilie aisée est révolu. Il avait néanmoins accepté de recevoir Mahé mais avait suggéré « de s’adresser à un dessinateur illustre comme Dunoyer de Segonzac, par exemple, dont le nom joint au vôtre assurerait le succès de la publication. » Ce qui l’intéresse bien davantage c’est Mort à crédit dont Céline a entrepris la rédaction, mais dont il pressent qu’elle risque fort de prendre plusieurs années, comme l’auteur le lui a laissé entendre

Le 19 : L’Intransigeant signale la parution d’une brochure distribuée aux critiques littéraires par les Editions Denoël et Steele. Publiée à l’occasion de la 180e édition de Voyage au bout de la nuit, elle reprend cinq articles de presse parus en 1932 et 1933, ainsi que le texte de la « postface » au roman que Céline a fait paraître, le 16 mars, dans Candide sous le titre « Qu’on s’explique ».