Mardi, je suis très distrait pendant la séance. À moins que Quinlan ou Marjorie ne s’adressent directement à moi, je n’écoute pas ce qu’ils disent, et je n’ajoute rien. Heureusement, ils sont tous les deux suffisamment absorbés par leur discussion pour ne pas remarquer mon absence.
Ce à quoi je pense, c’est à Arcadia. Je pense que je vais devoir y aller demain, pour découvrir ce qui se passe. J’ai l’impression que la meilleure façon de faire est d’aller au snack au moment où les ouvriers arrivent pour déjeuner, et d’écouter ce qu’ils ont à dire.
Bien sûr, le danger est qu’on puisse me reconnaître plus tard. Je me demande s’il n’y a pas un magasin d’accessoires dans le coin, où je pourrais acheter une moustache qui n’ait pas l’air fausse. À moins que je ne me laisse pousser la moustache ? Que je sois rasé de près demain, et moustachu quand j’obtiendrai enfin le poste ?
Je n’ai pas encore décidé, pour la moustache ni pour le reste, quand la séance prend fin. Marjorie et moi rentrons à la maison en silence, et je broie toujours du noir, vaguement conscient qu’elle me regarde et se pose des questions à mon sujet.
Il y a un message sur le répondeur, dans la cuisine. Marjorie appuie sur le bouton et je m’arrête sur le pas de la porte, indifférent, et la voix féminine dit :
« Ceci est un message du bureau de Mr John Carver, d’Arcadia Processing, pour Mr Burke Devore. Nous sommes mardi 1er juillet. Mr Devore, pourriez-vous s’il vous plaît rappeler Mr Carver d’ici mercredi 2 juillet au plus tard ? Son numéro est le 518 398 41 42. Merci. »
Marjorie me regarde, et je sais que je souris à m’en exploser les joues. « Burke ? me demande-t-elle. Qu’est-ce que c’est ?
— Mon nouveau boulot », dis-je.