DRM: la recherche du point G
IDATE: les marchés du livre numérique

Simon&Shuster : quel marché de l'édition?

Reidy Très intéressante interview de Carolyn Reidy, Presidente et CEO de Simon&Shuster, sur l'indispensable Teleread, l'occasion de faire le point sur le marché actuel et de poser quelques réalités pour un groupe d'édition comme le sien, embarqué dans la conduite du changement:

"Carolyn Reidy: réaction au protocole de réglement Google Book Settlement: déçue mais pas trop surprise. Espère que c'est juste une autre halte sur la voie d'un réglement définitif. La marché pas "au point d'inflexion" d'une transformation, mais au milieu de la transformation. L'inflexion a eu lieu depuis pas mal de temps, mais nous sommes arrivés au milieu plus vite que prévu. La facilité de l'achat et de la vente de livres explose et il y a une grande quantité d'opportunités qui nous font face. Optimiste. La plus grande question est de savoir si nous pouvons élargir le marché de la lecture plutôt que de le maintenir stable. La vente de livres traditionnnelle : je suis dans le métier depuis plus de trente ans, et il y a toujours quelque chose qui périclitait! Alors ce n'est pas si différent, chaque mutation a fait naître des opportunités. Risque qu'il y ait plus de réduction du côté de la grande distribution, Walmart, etc., si leurs ventes ne restent pas fortes. Les consommateurs découvrent les livres dans un environnement physique, même s'ils ne les achètent pas là. N'ont pas encore trouvé comment gérer ça. Croient qu'il y aura plus qu'une seule librairie internet — Amazon n'a plus d'exclusivité sur les livres électroniques. Il y aura beaucoup plus de concurrence en ligne — libraires spécialisés en ligne, par exemple. Leur tâche est de trouver ces vendeurs, développer ces vendeurs. Les consommateurs ne disparaissent pas, mais il faut trouver comment les atteindre à travers d'autres canaux. Le plus grand défi pour les éditeurs est de prouver qu'ils ont de la valeur pour les auteurs, pas de devenir un métier de vente directe. A toujours été un métier de vente directe — ils ont toujours fait ça mais maintenant ils sont plus directement impliqués.

Toujours su que le bouche à oreille est la meilleure façon de vendre des livres et toujours trouvé des moyens d'augmenter ce bouche à oreille, et c'est une opération de vente directe. Les éditeurs ont toujours fait ça: le travail éditorial pour tirer le meilleur du livre; commercialiser et trouver les lecteurs, cela a été le principal de ce que les éditeurs font pour les auteurs, toute l'intendance; leur donner une avance afin qu'ils puissent vivre tandis qu'ils écrivent. Pense que beaucoup de grands auteurs ne sont pas passés à l'auto-édition parce qu'ils veulent écrire et ne pas faire toutes ces autres choses. L'éditeur n'a jamais été la marque, l'auteur est la marque, et l'éditeur est la marque vers l'auteur. Beaucoup de grands auteurs ne veulent simplement pas s'occuper de toutes les choses qui sont fastidieuses à faire. Tout cela doit pourtant être fait et si c'est pas effectué par l'éditeur, c'est à faire par l'auteur. Les maisons d'édition doivent promouvoir une marque plus forte avec les consommateurs, mais ils n'ont pas encore trouvé le truc. Ne crois pas qu'une concentration est inévitable. Cela dépend vraiment de ce que les véritables propriétaires veulent faire, mais c'est pas nécessaire pour les affaires. Dans l'espace en ligne chaque livre est comme qui dirait à égalité. Wall Street n'attache pas tant de valeur que ça à l'édition, alors y aura pas de pression pour concentrer. 

Le numérique a transformé la plupart des choses, mais c'est l'éditorial qu'il a le moins été transformé. Tous leurs livres ont un plan de marketing numérique, des événements numériques, de la publicité numérique. Transformé la conception et la création des jaquettes, transformés la fabrication et la publicité. Chaque service a une composante numérique et a été transformé dans une certaine mesure. Le numérique constituait un service distinct et il y a à peu près 3 ans, on s'est aperçu que cela ne marchait pas et on l'a réparti dans tous les services. J'ai eu beaucoup à apprendre. Le plus gros changement pour moi, c'est d'essayer de comprendre, pendant que le monde de l'ebook grandit, comment équilibrer livre numérique et livre imprimé, spécialement tandis que les ventes physiques baissent. Qu'est-ce que cela signifie financièrement, du point de vue de l'édition (combien d'électronique, combien d'imprimé faut-il publier et quelle est la proportion). L'organisation est probablement plus souple que vous ne le penseriez, car on ne cherche pas à passer toute la société, on essaye de faire bouger les services indépendamment. Appris que lorsque vous tentez de changer, il faut 3 essais avant de trouver le bon. Si on devait créer une entreprise aujourd'hui on se concentrerait sur les systèmes parce que la chose la plus difficile à faire est de changer ces anciens systèmes et de le faire bien. Très cher, d'autant plus que les coûts de personnels. Le coût d'auteur est le plus grand coût, suivi par les coûts techniques. 

Nous ne vendons pas encore d'ebooks aux bibliothèques, parce qu'on n'a pas trouvé de modèle économique qui les satisfasse. Lit un grand nombre de manuscrits en numérique, préfère un iPad au Kindle à cause de l'ergonomie. N'a pas vraiment de préférence entre lecture imprimée et lecture numérique. Nous sommes réellement en train de changer, configurer et réaliser l'industrie. Croit que de nouvelles formes du livre seront développées. Un moment excitant d'être dans l'édition, parce que est en train de se créer toute une nouvelle industrie. 

Les livres numériques représentent à présent 15 à 20% des exemplaires vendus —  difficile à dire si tôt dans l'année et B&N a quelques problèmes de reporting. N'ont pas le pourcentage en dollars. S'attend à ce que les ventes soient d'environ 20% cette année et dans 5 ans cela sera de l'ordre de 50%, peut-être plus. Dans les premières semaines de mise en vente pour n'importe quel titre, y a presque toujours 50% en numérique. Avant la fiction était toujours plus élevée que la non-fiction, et maintenant la fiction a moins d'avance. Dans les premières semaines parfois, on atteind 60% en livre numérique dans les premières semaines si l'livre a beaucoup de recensions. Le marché des livres enrichis n'est pas très important et certaines des plus grosses ventes sont toujours inférieures à 2.000 exemplaires. Toujours en expérimentation, il ne semble pas que le public soit enthousiasmé par le concept. On ne fait plus d'applications ('apps') parce qu'elles sont très coûteuses à réaliser et se perdent dans l'App Store. On ne sait pas comment les rendre visibles dans la masse de trucs en magasin. On ne peut pas mettre les applications dans la librairie ce qui les rend plus difficiles à trouver. Pense pas que les livres imprimés seront obsolètes. Pense qu'ils peuvent devenir plus précieux, parce qu'un marché d'«élite» va se développer. L'impression à la demande va se répandre plus largement. 

On ne parle généralement pas de taux de droits en public, mais les auteurs ne gagnent généralement pas moins d'argent sur les ebooks si l'on considèrent tous les formats. Le livre physique a une durée de vie déterminée, pas l'ebook et cela doit être pris en compte. Les ventes à l'international sont une grosse opportunité pour les éditeurs et les auteurs parce qu'on peut les pousser dans le monde entier. Selon l'évolution du marché, leurs taux de droits devront également changer. L'édition n'est pas le business de la musique. La raison des ennuis de la musique c'était que les consommateurs voulaient une chanson, pas un disque et Apple l'a compris. L'"avalanche" d'ebooks, c'est comme n'importe quel tas de gadoue et ça rend très difficile pour les éditeurs de trouver quoi que ce soit parmi les ebooks sur le web. De temps en temps on y cueillera un livre auto-publié, mais il est très difficile de les trouver. Pour être choisi, il faut créer les ventes. 

On a rencontré différentes personnes à propos des solutions pour la bibliothèque, mais on n'a pas encore trouvé. Dire que les ebooks "dévaluent" le livre imprimé n'est probablement pas la bonne façon de le dire. Ils vendent le contenu du livre, pas la forme, alors mettre le prix d'un ebook bien en dessous du prix d'un best-seller, un livre, par exemple, dévalue la "propriété intellectuelle" qui est incorporée dans le livre, que ce soit électronique ou imprimé." 

(un grand merci à Alain pour la traduction)

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