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Jean-Noël Orengo : La Fleur du Capital

FleurducapitalUn magnifique livre en ce début d'année, celui de Jean-Noël Orengo, "La Fleur du Capital", sorti aux Editions Grasset. Un livre exigeant de près de 800 pages. Une symphonie, plutôt une vaste fresque théâtrale dans sa construction. La Fleur du Capital, c'est l'épuisement d'un lieu celui de Pattaya, station balnéaire de Thaïlande internationalement connue pour son tourisme sexuel, située dans la province de Chonburi, sur la baie de Bangkok dans le golfe de Thaïlande. Cinq personnages se succèdent, nous les suivons dans leurs errances, leurs fantasmes, leurs conditions, leurs destins, leurs perditions. Même si les deux parties centrales me semblent un peu plus faibles, l'ensemble est somptueux. Beauté de la dernière partie, éblouissement en forme de rédemption finale, une vraie réussite. J'ai reconnu bien des univers littéraires au travers des pages, compagnons en lecture, Baudelaire, Rimbaud, Saint-Simon, Sade, Selby, Lowry, Dick, Céline, Joyce, Guyotat, Perec. Mais aussi Manset, Gauguin, Herzog, Coppola, Antonioni. Tant d'autres encore qui me sont moins familiers mais que je sens intuitivement. Il y a du Vollmann aussi dans l'ampleur du projet. Attention, nul intérêt de dresser un catalogue, nous ne sommes pas dans la convocation vulgaire, une pose de mise. Les références sont subtiles, dans les dits et les non-dits. Un vaste melting pot, descriptions de la ville, des paysages, des odeurs, des sons. Folie d'une ville entre sexe et argent, l'image d'une capitale à l'échelle du monde qui nous submerge entre fascination et écoeurement, les deux physiques. La mort qui rode aussi en filigrane. Jeu subtil aussi dans la construction, dans les écritures, les styles correspondants à chaque personnage, un travail littéraire colossal. Des passages drôles aussi, le couple houellebecquien Monique et Michel m'a fait hurler de rire, malgré leur destin réfrigéré tragique, je ne vous en dis pas plus. Tout cela pour vous dire que l'on sort rincé par ce foisonnement et conquis.

Un grand livre dont Jean-Noël Orengo peut être fier, j'espère qu'il fera son chemin dans la critique et chez les lecteurs. Vertige de savoir qu'il s'agit de son premier roman.
En ce début d'année c'est heureux de découvrir des livres comme le sien dans toute cette littérature marketée, sans originalité, trop souvent médiocre. Le dernier livre de Houellebecq semble bien vide, celui d'une feignasse au côté de celui-ci. Le nouveau Despentes sort du lot heureusement, on va voir la suite en mai. Grasset encore, pour ces deux livres. Rarement ma tasse de thé depuis longtemps mais force est de reconnaitre et saluer leur courage pour ce pavé hors-norme incroyable. Des éditeurs comme Bourgois, Nadeau et plus loin De Roux auraient sans doute salué ce livre. Je vais regarder Grasset d'un autre oeil. J'espère que je vous aurais donné envie de découvrir ce livre, il le mérite, perdez-vous dans Pattaya.

Lire également l'interview de l'auteur dans les colonnes de LaTribunedeGenève et l'article dans le Figaro. Si j'en vois d'autres, je rajouterais.

PS: un livre bien cher en version numérique, ne pas hésiter à vous le procurer dans sa version imprimée; tant que l'on ne peut accéder à des offres couplées, un pavé pareil le mériterait bien pour l'emporter partout avec soi. Bravo également à Grasset de ne pas transiger sur la qualité du papier, aucune concession.

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