Mauvais Genres sur Publienet : c'est fini
23 janvier 2012
Petite interview de notre ami Bernard Strainchamps qui me réserve l'exclusivité de la décision qu'il a prise d'arrêter la direction de collection de Mauvais Genres qu'il animait sur le site Publienet. Une collection de polars qui regroupait déjà des auteurs comme entre autres Didier Daeninckx, Marc Villard, Dominique Manotti... Elle a d'ailleurs déjà changée de nom, elle s'appelle aujourd'hui Publie.noir. A travers le retrait de Bernard, c'est aussi une certaine conception de la librairie sur le web qui ne se reconnait plus dans le projet:
Pourquoi arrêtes-tu la collection?
J'avais déjà décidé d'arrêter la collection à l'automne suite à l'arrivée des widget Kindle sur le site de Tiers livre.
C'est Marc Villard qui m'a demandé de revenir sur ma position, de dissocier mon activité de directeur de collection de celle de libraire.
Et je n'y suis pas parvenu.
Demander aux auteurs des textes, les scanner, effectuer les premières corrections, préparer des interviews, relayer l'information, les tenir au courant des ventes, tout cela est une activité chronophage - et cela pour quelques euros de revenus par titre.
Aujourd'hui, les deux principaux canaux de diffusion des titres de Publie.net sont Amazon et l'iBookstore.
Si j'aime les auteurs que j'ai publiés, est-ce que je les aime suffisamment pour passer tant de temps à nourrir ces molochs qui ne respectent aucunes règles?
C'est bien sûr non.
Qui va reprendre la collection?
C'est François Bon l'éditeur. Il sait que je ne suis pas contre qu'un auteur ou un passionné reprenne la collection.
L'ensemble des auteurs souhaitent d'ailleurs continuer.
Je garde juste le nom de domaine car il est un peu ma première bannière sur le web, le souvenir de six années de médiation sur le polar et la SF.
Pour info, François Bon a encore 3 textes à publier.
Est-ce que le circuit auteur-éditeur-distributeur-libraire existera encore?
Ce qui m'a frappé il y a deux mois quand j'ai annoncé aux auteurs que finalement je continuais la collection mais que je fermais la librairie Bibliosurf, tous ont dit super et un seul a ajouté un mot gentil sur la fermeture de la librairie. Ça a été terrible dans ma tête.
Aujourd'hui, le grand cheval blanc Amazon propose 50% aux auteurs alors que les éditeurs à peine 10%.
Quels sont les auteurs qui vont résister à cette proposition?
Mais quelle remise accordera Amazon aux auteurs dans 10 ans quand cette pseudo-librairie aura affaibli les principaux éditeurs?
C'est la stratégie de la division, le far-west total.
Les distributeurs ont rogné la remise des libraires. Ils n'ont qu'à rogner aussi un peu sur la leur et attribuer ces marges retrouvées ainsi que la baisse de la TVA aux auteurs. Le problème sera alors réglé.
Demain les auteurs ont besoin de médiateurs, qu'ils s'appellent journalistes, libraires ou blogueurs. Croire que les algorithmes d'Amazon vont remplacer les humains, c'est une grosse fumisterie.
Est-que tu étais en désaccord avec la stratégie de François Bon?
Oui bien sûr. Une trop grande proximité par rapport à ces deux acteurs qui condamnent le rôle du libraire sur le web.