Intéressant débat qu'a amorcé Hadrien sur la version française du blog de Feedbooks (bravo pour l'initiative). A partir de la vidéo mise en ligne par Editis sur les usages du livre électronique dans un futur proche, il revient point par point sur ce qui est déjà possible, probable ou de l'univers de la fiction... Si je rejoins son analyse sur ce modèle à deux écrans qui imite le livre traditionnel et qui n'a strictement aucune utilité, cela les fabricants l'ont bien compris (pourquoi pas faire une première et une quatrième, ou même plus, IOI!), en revanche je ne suis pas trop d'accord avec son interprétation sur le rôle du libraire. Je ne reviendrais pas sur le rôle de conseil, évident, mais c'était aussi le cas des disquaires, il y a quelques années. Non, c'est ailleurs. Tout d'abord, et le film ne le montre pas, la librairie n'est pas une seule pochothèque avec des couvertures en facing et c'est tant mieux, on trouve dans les librairies quantité de livres qui ne sont pas "digérables" facilement sur livres électroniques (excusez-moi ce mot, mais il veut bien dire la chose) et c'est tant mieux... Le livre d'art en fin de vidéo en est un très bon exemple. Et si le couple avaient des enfants, je pense aussi qu'ils trouveraient difficilement de quoi alimenter le livre électronique... D'autre part, c'est bien joli de vouloir cantonner le libraire dans un rôle d'hyper-spécialisation de niches, sempiternel refrain de ceux qui veulent du bien à nos chers libraires... Ce serait oublier qu'il y a des critères économiques incontournables à la rentabilité de la librairie (et cela Diderot le disait déjà à son époque, 1763, ce n'est pas d'hier, "Un fonds de librairie est donc la possession d'un nombre plus ou moins considérable de livres propres à différents états de la société, et assorti de manière que la vente sûre mais lente des uns, compensée avec avantage par la vente aussi sûre mais plus rapide des autres, favorise l'accroissement de la première possession. Lorsqu'un fonds ne remplit pas toutes les conditions, il est ruineux". Ah, si Diderot s'était penché sur le phénomène de la longue traîne, il aurait remis un certain nombre de choses au point...
Tout cela pour dire que je ne vois pas pourquoi les libraires se priveraient de fait, de la vente facile d'un certain nombre d'ouvrages en téléchargement sur livres électroniques comme on le montre sur la vidéo, c'est bien non? Cela en arrangerait quelques-uns et des très gros qu'ils n'y viennent pas, mais c'est pour moi une évidence que les libraires doivent aller dans ce sens. Cela vient faire échos d'ailleurs à la récente intervention brillantissime de John MacNamee (Président de la Fédération Européenne des libraires) lors du dernier colloque Alire/ Dilicom «Les libraires doivent démontrer aux éditeurs qu’ils sont capables de répondre à la demande quel que soit le support: papier ou numérique». Et vous? vous en pensez quoi en tant que lecteurs? Débat à suivre...