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73 notes en novembre 2010

Le Motif: droits d'auteur en Europe

Magnifique travail de Laure Pécher et Pierre Astier proposé par Le Motif (Observatoire du Livre et de l'Ecrit en Ile de France) autour du droit d'auteur en usage en Europe (nos voisins proches) avec notamment cette carte de synthèse. L'ensemble des documents d'étude est téléchargeable sur le site.

Motif





Lire en bonne "company"

Mymajor Intéressant billet de Romain Péchard (Cabinet Persuaders) sur Techcrunch France qui revient longuement sur le phénomère MyMajorCompany dans le domaine de la musique.

"Après avoir été un phénomène de mode, les labels communautaires ont pour la plupart fermés par incapacité à trouver un artiste capable de rapidement être grand public comme Grégoire, artiste signé chez MyMajorCompany. Mais aussi par incapacité à produire une véritable valeur ajoutée pour les visiteurs de ces sites qui se retrouvent bien souvent confrontés à des artistes très formatés. La promesse de produire de nouveaux artistes, et par “nouveau” entendez différents, n’est pas tenue. Joyce Jonathan et Grégoire sont de bons exemples du formatage musical. Car ce modèle de label ne se repose pas sur la prise de risque mais l’investissement de particuliers qui espèrent bien gagner de l’argent après le lancement de stars, comme cela a pu être le cas avec l’artiste Grégoire. La direction artistique peut être faite en amont par une pré-sélection de l’entreprise, comme il fait chez MyMajorCompany, mais ce sont les investisseurs qui décident de produire tel ou tel artiste, sans connaissance artistique ni expertise du milieu musical. Ce qui fait qu’ils vont investir dans des artistes qui ressemblent à ce qu’ils aiment actuellement, empêchant alors à cet artiste de sortir du lot car bloqué par la star du moment. La faiblesse de ce modèle réside donc dans la notion du particulier qui prend le rôle d’expert et qui investit dans des artistes qui ressemblent à des artistes grand public.  Le billet complet ici.

A l'heure où les Editions Fixot ont rejoint le modèle avec MyMajorCompanyBooks et la sortie de trois premiers livres, on peut là-aussi se demander si ceux-ci ne sont pas déjà "pré-formatés" à entrer dans un catalogue déjà bien identifé. Reste à savoir s'ils feront de l'ombre aux stars de la maison!


Baisse de la TVA: le Sénat est pour

Sénat Allié de taille dans le débat actuel, le Sénat a adopté aujourd'hui, contre l'avis du gouvernement, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2011 (PLF), l'abaissement de la TVA sur le livre numérique à 5,5% au lieu de 19,6%. Trois amendements issu du groupe Union Centriste (UC), du RDSE (à majorité radicaux de gauche) et du CRC-SPG (communistes et parti de gauche) allant en ce sens ont été adoptés. Il s'agit, a plaidé Catherine Morin-Desailly (UC) qui a déposé l'un des amendements, adopté à l'unanimité par la commission de la Culture du Sénat, d'avoir "le même taux réduit de 5,5% de TVA que le livre papier afin d'éviter toute distorsion de concurrence". "Papier ou numérique, qu'importe le support ? c'est toujours un texte, une oeuvre de l'esprit à laquelle un taux réduit doit s'appliquer. Ce serait beaucoup moins coûteux que la TVA à taux réduit dans la restauration!", a renchéri Jack Ralite (CRC-SPG). "Cet amendement est contraire au droit européen. Nous travaillons à l'élaboration d'une position commune à vingt-sept", a plaidé en vain François Baroin (Budget) qui a été mis en minorité (via AFP). Le chemin va encore être long avant une adoption effective!


On n'échappera pas à l'ebook!

Ebook_logo2 Si vous êtes un peu attentif à la communication qui accompagne les différents sites de ventes depuis quelques semaines, vous conviendrez avec moi que nous n'échapperons à l'anglicisme "ebooks" en France. Tous les libraires en ligne reprennent allègrement le terme dans leurs différents onglets, la Fnac en tête mais aussi Sony, Darty, etc. Seul ePagine, Numilog et nos amis canadiens font encore un peu de résistance... Même si on peut le regretter, je pense malheureusement que l'on fera difficilement marche arrière maintenant tant la vague est forte. Le Robert et le Larousse suivront dans leurs versions 2012, vous verrez. Si le terme pour le fichier semble acté, quid du support de lecture? Du coup, la place est libre pour le terme "livre numérique" aisément compréhensible pour le public. C'est le choix de la Fnac d'ailleurs qui a choisi de communiquer largement sur son "Fnacbook: Découvrez le premier livre numérique signé Fnac", Pixmania avec sa rubrique, "lecteur numérique" pour France-Loisirs, "livre électronique" pour Bookeen et Sony avec son incontournable "reader"! Pour la "liseuse" en revanche, les carottes ont l'air désespérément cuites. Et vous? Vous les appelez comment?


BPI : présentation de livres enrichis

Bpi A signaler une initiative intéressante à la BPI Beaubourg le lundi 29 novembre prochain autour du livre gras (pardon, enrichi). [Attention peut-être à l'excès de cholestérol!]

"Trois auteurs impliqués dans un projet de recherche expérimentale sur le "livre enrichi" évoquent leur travail de création de livres numériques mêlant textes, enrichissements audiovisuels et fonctionnalités de connaissance et de partage associées au récit. Ils présentent leur livre prototype. Présentation sur Ipad. Leur prise de parole est suivie d'une intervention de Christophe Evans, sociologue de la Bpi, qui livrera les premiers résultats d'une enquête menée auprès des publics sur la réception de ces trois ouvrages".

Ces "livres" multimédias (c'est bien de cela dont il s'agit, je préfère ce terme à celui d'enrichi - comme si les livres n'étaient pas riches par nature!) sont issus du projet de recherche expérimentale mené par l'éditeur et libraire numérique Leezam, l'Institut de Recherche et d'Innovation du centre Pompidou (IRI) et la Bibliothèque publique d'information (Bpi); un programme soutenu par le ministère de la Culture et de la Communication.

Associé, le nouveau site d'informations Idboox. Le programme complet est ici.


Bragelonne arrive en numérique

Bragelonne A signaler l'arrivée sur le numérique d'un éditeur que beaucoup attendait dans le domaine de la Fantasy. Ce sont les Editions Bragelonne qui ont fêté leur 10 ans d'existence cette année. Plus de détails sur le blog. "En plus de proposer des tarifs attractifs, entre 2.99€ et 12.99€, de nombreuses opérations seront mises en place comme des ventes. Cette première fournée comptera 52 titres en Fantasy, 12 titres en bit-lit, 17 titres en science-fiction, 8 titres en Terreur, 7 titres en Licences et 2 titres en ados/jeunesse. Au fil des mois de nombreux autres opus seront ajoutés et certaines sorties seront même simultanées en version papier et numérique." (via Lilie, merci).


DRM: ne dégoûtons pas les acheteurs de livres numériques

Drmepub_m Déjà plusieurs sites relaient ce tutoriel diffusé par Clément Bourgoin, libraire et développeur web, (Lybris) pour supprimer les DRM sur des livres que vous avez achetés et qui sont intolérables. Charles Kermarec (Librairie Dialogues) nous l'expliquait parfaitement il y a quelques jours seulement. Il ne peut quand même pas être taxé de pirate, de corsaire brestois tout au plus! Je me joint de manière solidaire avec d'autres sites (eBouquin, Actualitte, Fond des Poches, Immatériel, etc), je crois que plus nous serons nombreux à relayer ce tutoriel dans l'ensemble des métiers du livre, plus on avancera sur une situation qui de toute façon est voué à l'échec, tout le monde le sait bien, et qui va à l'encontre des vrais acheteurs de livres. Au moment où la résonnance est très forte en ce moment autour du livre numérique (les pages vues sur Aldus ont presque doublé au quotidien depuis quelques semaines) il s'agit de ne pas reproduire les mêmes erreurs désastreuses du marché de la musique il y a quelques années. Comme nous l'évoquions récemment avec Michael Dahan chez Bookeen, nous sommes à un moment crucial en France où nous pouvons basculer soit dans l'offre légale responsable soit dans le téléchargement illégal massif car attisé par la politique des éditeurs. Rien n'est couru pour l'instant mais l'année qui s'annonce va être décisive... DRM et prix élevés sont sur la sellette, nous le savons tous. A l'heure où l'on va beaucoup communiquer sur le livre numérique, les enjeux sont très importants. Ne pas le comprendre serait une erreur historique et je pèse mes mots. Si nous ne voulons pas dégouter les vrais acheteurs, message clair: suppression pure et simple des DRM, pour la musique -après un long calvaire de la profession- c'était début 2009 à MacWorld, rappelez-vous. Vous trouverez désormais ce tutoriel en évidence dans la rubrique à ne pas manquer. Je relaie aussi le message dans les commentaires de Jean-Claude Marguerite, auteur du "Vaisseau Ardent" aux Editions Denoël sur lequel la DRM a été enlevée:

"Pas question de se substituer à l'éditeur ni au libraire pour vendre mon livre en direct. Ils font un travail souvent remarquable, c'est un contrat moral entre eux et moi. Mon site ne comprend aucun lien marchand, c'est juste un relai d'informations sur Le Vaisseau ardent.
Nous avons beaucoup bataillé pour que Le Vaisseau ardent bénéficie d'un prix d'exception, la politique du groupe Gallimard (et Antoine Gallimard est président du syndicat national des éditeurs, ce qui pourrait suffire à justifier sa position actuelle) l'affichait à plus de 25€. Nous demandions (mon éditeur et moi) 15€ – la poire a été coupée en deux (drôle de comparaison: un roman, une poire…). La publication en feuilleton permet de se faire une idée du livre pour 5€ (pour ceux qui auraient raté les 100 premières pages en PDF mise en téléchargement libre dès le mois de mai).
Sur les DRM, nous n'avons pas eu de compromis. C'est fort dommage et néanmoins compréhensible. Le marché de l'édition numérique est tellement jeune que nul ne sait ce qu'il va devenir. C'est pourquoi mon contrat n'est pas à durée perpétuelle pour sa version électronique, contrairement à la version papier. Bien des auteurs devraient y regarder deux fois avant de signer les contrats standards…
Sur la rémunération de l'auteur, fondée par défaut sur le prix de vente (moyenne entre les coûts de production et le prix psychologique), il y a fort à dire. Plus un livre rapporte et plus on peut consacrer de temps au suivant : je vote pour une augmentation de mon pourcentage (mais pas au détriment du porte-monaie du lecteur). Une offre m'a été faite en ce sens, fort alléchante, mais qui doit être pondérée de ma première remarque : le rôle de l'éditeur ne s'arrête pas à la diffusion d'un texte mise en page, celui d'un libraire du classement d'un titre selon le nom de l'auteur."

Au moment où vous vous apprétez à acheter un nouveau lecteur, exigez auprès du vendeur des livres sans DRM, purement et simplement, vous verrez, ça remontera..

Et je reprends avec Charles Kermarec : "Jouez ce jeu-là messieurs les fournisseurs, mes amis, si ça vous chante. Mais sans ma complicité".

PS: ajout blogs LaFeuille, Korben, ActueBooks, Actualitte,

PS: Où trouvez des livres 100% sans DRM, c'est ici, merci Clément! (24/11/10)

PS: reproduction en totalité du tutoriel ci-dessous, encore un grand bravo à Clément pour avancer de la sorte hors de l'ombre des forums.

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Comment retirer facilement les DRM d'un livre numérique au format ePub

On l'a beaucoup dit: les DRM (dispositifs de cryptage des livres numériques empêchant leur copie ou leur prêt) ne servent à rien, ils enquiquinent les acheteurs légitimes et sont de toute façon faciles à contourner pour les pirates malhonnêtes. En ce qui concerne ce dernier point, en voici la démonstration.

Le fichier utilisé dans l'exemple est le premier épisode du Vaisseau ardent de Jean-Claude Marguerite. J'ai choisi ce livre parce qu'il se trouve que je voulais le lire depuis un moment et que la version papier ne rentre pas dans mon sac. J'y prends d'autant plus de plaisir qu'il s'agit d'un roman mettant en scène des pirates et que les DRM ont été imposés par le Groupe Gallimard contre l'avis de l'éditeur et de l'auteur.

Il va de soi que pirater un livre numérique pour le distribuer gratuitement est un acte que cet article n'encourage en aucune façon et je le dis sans hypocrisie, étant moi-même gérant de la plateforme numérique du Bélial'. L'objet de cet article est simplement de montrer que le retrait des DRM d'un fichier ePub est un acte d'une facilité déconcertante, à la portée d'à peu près n'importe qui.

Outre l'argument idéologique, supprimer les DRM d'un fichier ePub peut aussi avoir un intérêt pratique : utiliser ses fichiers ePub avec DRM Adobe sur une plateforme non-compatible, comme l'iPhone/l'iPad.

La méthode suivante a été testée avec un livre acheté légalement chez l'ami Bibliosurf (donc via la plateforme ePagine et le distributeur EDEN), sous Windows 7 (C'est théoriquement possible aussi sur Mac, mais l'installation de Python et PyCrypto est plus corsée). Ma liseuse est le Sony Reader PRS-600.

Décortiquons un livre numérique avec DRM

Une fois le livre acheté, on reçoit par courriel un lien pour télécharger un fichier URLlink.acsm. Il ne s'agit pas du livre lui-même (le fichier ne pèse que 4 ko) mais d'un fichier XML, avec diverses informations pour identifier le client et le livre acheté. On l'ouvre avec Adobe Digital Editions, on s'identifie avec son ID Adobe et le véritable livre numérique se télécharge. On peut alors le lire directement dans ADE ou le transférer sur sa liseuse compatible avec les DRM Adobe.

Si l'on est curieux et que l'on se rend dans le dossier où ADE stocke les livres numériques (C:\Users\Clément\Documents\My Digital Editions\ pour ma part), on découvre un fichier Le_vaisseau_ardent_episode_1.epub tout ce qu'il y a de plus normal. On peut le disséquer sans difficulté (un fichier ePub étant en réalité un fichier Zip avec une extension .epub) même si ça n'est pas nécessaire pour le craquer. Une fois à l'intérieur, on distingue une différence avec les ePub sans DRM : les fichiers rights.xml et encryption.xml qui contiennent naturellement les informations de droits et d'encryptage.

Une autre différence, donc, est que les fichiers HTML contenant le texte du livre sont cryptés. Voici par exemple à quoi ressemble un chapitre du Vaisseau ardent :

epub_encryption.png

Pas idéal comme confort de lecture. Evidemment, Adobe Digital Editions et ma liseuse se chargent de décrypter tout ça pour m'afficher un livre en français plus traditionnel. Par contre, imaginons que je veuille lire mon livre acheté légalement sur mon iPhone (ou iPad) avec iBooks... et là, c'est le drame.

ibooks_drm_error.png

Solution : acheter une nouvelle fois le livre avec des DRM Apple s'il est disponible sur l'iBookstore (en l'occurrence, non), en trouver une version piratée sans DRM (mais dans ce cas, pourquoi l'acheter au départ ?), ou retirer les DRM de notre propre fichier ePub. Et justement...

Supprimons ces saloperies de DRM de notre livre numérique acheté légalement

Voici donc la méthode simple, comme promis. On va utiliser un script Python pour décrypter le fichier, ce qu'il signifie qu'il faudra installer Python. Il n'y a rien de plus compliqué dans cette méthode qu'installer des logiciels, créer des dossiers et y déplacer des fichiers. Allons-y !

  1. Une fois le livre numérique téléchargé dans Adobe Digital Editions grâce à notre ID Adobe, on récupère le fichier ePub équivalent qui se trouve dans le dossier Digital Editions (par défaut dans notre dossier système Documents).
  2. On télécharge et on installe Python (logiciel permettant de faire tourner les scripts en langage python).
  3. On télécharge et on installe PyCrypto (logiciel de cryptographie écrit en langage python). Attention à bien prendre la version de PyCrypto correspondant à la version de Python que vous avez installée (actuellement, la 2.7).
  4. On télécharge les scripts Python ineptkey.pyw et ineptepub.pyw qui vont permettre de décrypter notre fichier ePub. On les trouve très facilement en cherchant sur Google.
  5. On double-clique sur le fichier ineptkey.pyw : celui-ci va récupérer la clé qu'utilise Adobe Digital Editions pour crypter les fichiers et créer avec un nouveau fichier adeptkey.der (ADEPT pour Adobe Digital Experience Protection Technology, les fameux DRM d'Adobe)
  6. On double-clique ensuite sur le fichier ineptepub.pyw, qui nous propose trois champs à remplir : Key file, qui contient par défaut le fichier adeptkey.der que l'on vient de créer (on n'y touche pas), Input file, où l'on pourra sélectionner notre fichier ePub protégé et Output file, dans lequel on choisira où enregistrer le nouveau fichier ePub sans DRM.
  7. Une fois les trois fichiers sélectionnés, on clique sur Decrypt, et c'est terminé !
(Si vous obtenez l'erreur Problem decrypting session key, il est possible que votre version du fichier ineptkey.pyw soit trop ancienne, téléchargez une version la plus récente. A l'heure où j'écris ces lignes, la bonne est la 4.3 pour Adobe Digital Editions 1.7.2.)

Nous voilà maintenant avec un beau fichier ePub dépourvu de DRM ! On peut l'utiliser sur n'importe quel support de lecture gérant le format ePub (soit à peu près toutes, sauf le Kindle d'Amazon) y compris ceux ne gérant pas les DRM Adobe, comme l'iPhone.

epub_ibooks_nodrm.png

Elevons-nous dans la joie

Achetez des livres numériques, téléchargez des livres numériques, retirez les DRM de vos livres numériques, lisez des livres numériques, prêtez vos livres numériques à vos amis, mais c'est tout. Ne les envoyez pas sur les sites pirates ou sur les réseaux P2P, sous peine de donner raison aux éditeurs frileux qui bardent leurs fichiers de DRM ou de décourager ceux qui prennent le risque de s'en passer.

Tout artiste a droit à une rémunération pour son oeuvre, s'il le souhaite. Si certaines expériences montrent que la mise à disposition gratuite d'un texte (piraté ou non) peut en faire décoller les ventes (comme le Blindsight de Peter Watts ou plus récemment le comic Underground de Steve Lieber), ce n'est pas forcément le cas. 

Quoiqu'il en soit, c'est à l'auteur et à lui seul de décider d'une éventuelle mise à disposition gratuite de ses textes, et pas à nous. Il y a trop d'auteurs au Bélial' qui refusent la publication de leurs livres en numérique par peur du piratage (sans réaliser, d'ailleurs, que c'est précisément l'absence de version numérique commercialisée qui encourage le piratage). N'encourageons pas cette paranoïa.

Clément Bourgoin


Edition aux Etats-Unis: le milliard de dollars

Milliard Sans nul doute à mettre en relation avec le billet précédent. Le cabinet d’étude Forrester vient de publier les résultats d’une enquête sur l’avenir des e-books aux États-Unis dans les cinq prochaines années. On en retiendra notamment un chiffre: les ventes d’e-books devraient frôler le milliard de dollars, 966 millions de dollars précisément, d’ici fin 2010. Autre chiffre marquant de cette enquête: seulement 7% des lecteurs américains consomment des livres numériques. La marge de progression est donc encore importante et, selon les estimations de Forrester, les ventes de e-books devraient atteindre 3 milliards de dollars en 2015. C’est donc une métamorphose en profondeur de l’industrie du livre que prédit cette enquête. Comme l’explique son auteur, James McQuivey, l’e-book est bien devenu "un membre à part entière dans le club des grands médias (…). Quand vous pesez un milliard de dollars, on doit vous prendre au sérieux. Dans l’industrie du livre, cela signifie que les éditeurs traditionnels ne peuvent plus vivre dans le déni et la procrastination. (…) C’est pourquoi nous devons célébrer l’atteinte de ce seuil du milliard, car à partir de maintenant, les choses vont aller si vite que l’industrie du livre pourrait être devenue essentiellement numérique d’ici très peu de temps, bien qu’elle ait amorcé sa transformation en dernier." Selon cette enquête, il n’y a donc aucun doute sur le fait que les éditeurs doivent se préparer au jour, proche, où les livres papiers ne seront plus qu’une activité annexe venant en soutien des publications numériques. L’auteur à succès John Grishman, dont le dernier opus The Confession s’est vendu à 70 000 exemplaires en version numérique en une seule semaine, résumait ainsi la situation dans une interview accordée au Wall Street Journal: "le futur est arrivé, et nous le regardons en face (via Non-Fiction dont je me suis permis de reprendre l'intégralité de l'article tant tout me semblait important, merci).


Hachette avec Google

Rififi C'était couru, la belle unité qui vole en éclat. Après Amazon, Apple, le troisième étage de la fusée, le numéro un français du secteur, Hachette Livre a décidé de faire cavalier seul et de passer un accord avec Google pour la numérisation des livres épuisés. Arnaud Nourry, PDG d'Hachette Livre et Dan Clancy, responsable de Google Book ont annoncé, lors d'une conférence de presse la signature d'un accord, donnant enfin un cadre légal à la numérisation des ouvrages épuisés du fonds de catalogue d'Hachette livre. Cet accord concerne entre 40.000 et 50.000 livres anciens: de la littérature générale (Grasset, Fayard, Calmann Lévy), des ouvrages universitaires (Armand Colin ou Dunod) ou des ouvrages documentaires (Larousse). Une fois le livre numérisé, Google conservera un fichier numérique et un autre sera remis à Hachette Livre qui pourra l'exploiter. Cet accord a une portée économique assez faible, puisque la vente d'ouvrages épuisés représente un chiffre d'affaires potentiel faible. En revanche, l'accord a une forte portée symbolique. Car Hachette enfonce un coin dans le front uni des éditeurs français face à Google. Google Edition à la française, c'est parti! (via LeFigaro).

PS: Cela concerne des milliers d’œuvres, régies par le droit d’auteur français dont Hachette contrôle les droits et qui sont commercialement indisponibles, soit, selon Hachette Livre, «la grande majorité de toutes les œuvres publiées à ce jour».
L’objectif affiché est de donner une seconde vie aux œuvres épuisées «tant au bénéfice des auteurs que des universitaires, des chercheurs et du grand public».
Les deux partenaires soulignent que cet accord, qui intervient alors que la profession travaille à un amendement du Code de la propriété littéraire et artistique sur les œuvres indisponibles, a vocation à être étendu à tous les éditeurs qui le souhaitent.
Arnaud Nourry, P-DG d’Hachette Livre, précise dans un communiqué qu’il ne s’agit pas «d’un quitus donné à Google pour son comportement passé, mais d'un cadre permettant de repartir sur de nouvelles bases, équitables, équilibrées et respectueuses de nos droits et de ceux de nos auteurs».
L’accord repose sur trois grands principes. D’abord, le contrôle de la numérisation des œuvres: c’est Hachette qui détermine quelles sont les œuvres épuisées exploitables en version numérique, celles-ci pouvant être proposées sous forme d’ebooks via Google Livres ou sous d’autres formes commerciales, comme l’impression à la demande.
L’idée étant de donner accès à des œuvres indisponibles jusque-là, Hachette aura la faculté d’utiliser ces fichiers numérisés par Google pour les exploiter lui-même, et les libraires pourront intégrer ces ebooks dans leurs offres commerciales. Deux cas se présentent ainsi concrètement: Hachette autorise la numérisation et la diffusion en ligne de l’œuvre, notamment sur la future plateforme d’ebooks, Google Editions; Hachette autorise la numérisation de l’œuvre par Google pour un usage limité à l’indexation et à la promotion et recevra copie du fichier pour ses propres usages non-commerciaux.
Enfin, Hachette Livre se réserve la possibilité de faire bénéficier les institutions publiques, telle que la Bibliothèque nationale de France, des œuvres numérisées dans le cadre de ce protocole (via Livres Hebdo).


Nook Color: première présentation

Première présentation du Nook Color sur le site Cnet. Une note excellente de 4/5. Il va être intéressant de voir comment ce modèle développé par le libraire américain Barnes and Noble va être perçu par rapport aux tablettes. D'autres billets encore signalés par TheDigitalReader. A signaler que l'anglais Waterstones propose un petit lecteur Elonex à £80!

PS: une autre présentation chez Engadget.


Blog selon Nietzsche

Nietzsche "L'éducation particulière et l'éducation par petits groupes se généralisant de plus en plus, on peut presque se passer de l'éducateur, tel qu'il existe maintenant. Des amis avides de savoir, qui veulent ensemble s'approprier une connaissance, trouvent, à l'époque des livres, une voie plus simple et plus naturelle que l'«école» et le «maître»." Quelle plus belle évocation de l'idée que je me fais du blog et de notre activité à quelques-uns! Elle est de Nietzsche et date de 1879! Merci à Martin pour cette belle trouvaille!


Guide du numérique 2011: Orizon en tête

Point Double page consacrée aux livres électroniques dans le traditionnel Guide du numérique publié par Le Point la semaine dernière. Tiercé gagnant: Cybook Orizon, Sony PRS-650 à égalité avec Samsung E65. L'ensemble des 9 lecteurs testés ci-dessous. Une note sur 100 décomposée de la façon suivante: Lisibilité sur 40, Ergonomie sur 30 et Fonctionnalités sur 30:

  • Bookeen Cybook Orizon : 92 (40,30,22)
  • Sony PRS-650 : 87 (40,25,22)
  • Samsung E65 : 87 (40,25,22)
  • Sony PRS-350 : 81 (40,25,16)
  • Amazon Kindle : 80 (40,25,15)
  • Bookeen Cybook Opus : 76 (40,25,11)
  • Amazon Kindle DX : 74 (40,20,14)
  • Apple Ipad 3G : 74 (30,20,24)
  • Apple Ipad wifi : 69 (30,20,19)

A noter que par rapport à la liste de l'année dernière (cinq lecteurs seulement), seul le Cybook Opus est présent, signe de l'accélération du marché. On regrettera quelques retardataires qui n'ont pas été testés: FnacBook, Oyo et PocketBook.


Fnacbook: premiers exemplaires en démonstration

Fnacbook_150 Prise en main du livre électronique FnacBook à la Fnac du Boulevard Saint-Germain ce midi. J'avoue que j'ai été très agréablement impressionné. Design très réussi, finalement les onglets que je trouvais trop imposants se font vite oubliés. La finition est excellente, le modèle ne fait pas du tout cheap. Petit, pratique, tactile est bon. Même si le fond de l'écran est plus gris que sur des lecteurs eInk, les caractères sont relativement contrastés. On s'approprie la navigation en quelques minutes. En revanche, il s'avère très lent. Dommage de ne pas pouvoir tester le catalogue, pas de connection wifi et de 3G dans le magasin, pour une Fnac Digital c'est quand même un comble! Divine surprise aussi, le flash de l'écran a été éliminé complètement ce qui rend la lecture plus agréable. Ma seule petite réserve concerne la barre d'outils en bas un peu encombrante en mode lecture que je n'ai pas réussi à enlever dans les options. En attendant de le tester plus complètement, de très bonnes premières sensations! Je vous invite à aller le découvrir par vous-même! En pré-commande pour l'instant, il sera disponible à partir de vendredi.


Les libraires placent des bornes

Motif On en parlait beaucoup il y a quelques mois, ces fameuses bornes numériques placées dans six librairies parisiennes. Retour d'expérience aujourd'hui sur le site du MOtif: "L’ergonomie de la borne et le mode de paiement sont améliorables" estime Didier Berthelemot. Par ailleurs le numérique pour le libraire, ouvre la possibilité de proposer à la vente des readers et autres tablettes de lecture. Mais l’urgence n’est pas là: l’urgence, pour l’instant, est de "capter les clients physiques existants", (dont certains ignorent encore que la librairie a déjà son propre site marchand), d’apprendre à "intégrer ce fameux fichier dans le métier de libraire", enfin "d’en être", autrement dit de "montrer que c’est là une pratique normale, ou destinée à l’être" explique François Milliet. La prestation de la société ePagine comprend d’ailleurs un module de conseil et de formation, de toute évidence très utile aux libraires.
Mais de nombreuses inconnues persistent, notamment eu égard au comportement des lecteurs et des clients. Car coexistent l’indifférence, voire un certain de degré de résistance de nombreux lecteurs au numérique dans le livre, et la tendance lourde d’un consumérisme toujours plus individualiste – qui induit, en l’espèce, que l’on commande ou télécharge de chez soi sans intermédiaire, donc sans libraire. Philippe Touron, Didier Berthelemot et François Milliet en sont bien conscients  mais ils savent la nécessité de leur métier, ils savent combien le lecteur a besoin de se repérer dans "le trop plein" et le flot continu des publications, et ils savent les limites du tout-virtuel: "au moment où la société se dématérialise de plus en plus, les gens sont d’autant plus prêts à payer pour du réel. " On aura toujours besoin d’un (bon) libraire." Le billet complet est ici.


Le Motif: prêt de lecteurs en bibliothèque

Lemotif Initiative intéressante, le MOTif (Observatoire du Livre et de l'Ecrit en Ile de France) fournit à 7 établissements des Yvelines et du Val d’Oise 23 lecteurs en papier électronique qui proposent une sélection d’oeuvres, aussi bien du domaine public que de la rentrée littéraire. Cette expérimentation de prêt portée par le MOTif et la BDP des Yvelines se déroule du 2 novembre au 30 avril 2011 dans six bibliothèques des Yvelines (Freneuse, Maurecourt, Le Perray-en-Yvelines, Méré, Saint-Arnoult-en-Yvelines, Septeuil) et une du Val d’Oise à Méry-sur-Oise. Les établissements situés dans des communes rurales se partagent 23 Cybook Opus de la marque Bookeen. Plus de détails ici.


Dialogues en libraire militant

Canards Charles Kermarec, le patron de la librairie Dialogues à Brest, avec sa verve habituelle, s'en prend vivement aux DRM sur son blog. Prendre son client pour un voleur, imbécilité technique, les arguments ne manquent pas: "A quoi, à qui ça sert les DRM si ça emmerde les honnêtes gens et que ça ne gêne pas les voleurs? Jouez ce jeu-là messieurs les fournisseurs, mes amis, si ça vous chante. Mais sans ma complicité". Fidèle dans ses actes, il vient de déréférencer ce week-end dans sa librairie tous les titres comportant une DRM, une paille!

Je reproduis son billet intégralement pour archive:

Faut pas prendre les enfants du bon dieu pour des canards sauvages

La librairie dialogues a été en France l’une des premières à ouvrir sur son site librairiedialogues.fr un rayon de vente de e-books. Un rayon et non pas l’hébergement du “corner” d’un fournisseur. Un rayon spécifique avec des e-books intégrés à la fiche article des livres de telle sorte que l’internaute puisse choisir en un clic d’acheter le livre soit dans sa version papier brochée ou poche soit au format numérique.

Il est dans l’ordre des choses que les accouchements soient douloureux. Et que les premiers pas soient hésitants. Et donc nous avons accepté les à-peu-près de nos fournisseurs, les informations insuffisantes, ou erronées, voire celles qui dans la même fiche article se contredisaient. Nous avons, dès le premier jour, dit notre hostilité aux DRM. Nous avons, dès les premiers couacs, fait remonter à nos fournisseurs les plaintes des clients mécontents de l’usage limité et frustrant qu’ils pouvaient avoir des livres numériques qu’ils avaient achetés. Ainsi ce mail d’un client canadien : “ Pour ma part c’est la dernière fois que j’utilise ce mode d’achat de manuel que je déteste au plus haut point. C’est inconcevable de penser lire un livre technique de cette façon surtout lorsque le graphique est 2 pages avant. $52 cdn pour rien apprendre sauf de ne plus jamais utiliser e-book et ne plus faire confiance à cet auteur qui pense que tout le monde est malhonnête. Est-il pensable d’avoir (…) une permission avec un code pour pouvoir l’imprimer”. Il dit exactement ce qu’il y a à dire des e-books vendus avec DRM.

 Aujourd’hui, c’est fini. Aller plus loin serait nous rendre complices d’une arnaque au lecteur. Nous arrêtons de vendre des e-books avec DRM. Pour trois raisons :

  1. La première raison, fondamentale, celle qui à elle seule m’a fait prendre cette décision est une raison d’ordre éthique. Quand on fait du commerce, acte équitable s’il en est, il ne faut pas prendre son client pour un voleur. Vendre un e-book avec DRM pour que le client acheteur ne puisse pas copier-coller son livre, pour qu’il ne puisse pas en imprimer à loisir tout ou partie, pour qu’il ne puisse pas le prêter, c’est se méfier a priori de ce client. C’est le menotter ou penser a priori que ce client est malhonnête. Prendre un client pour un voleur, ça m’est insupportable. Donc ça suffit. Jouez ce jeu-là messieurs les fournisseurs, mes amis, si ça vous chante. Mais sans ma complicité.
  2. Accessoirement, les DRM sont une imbécilité technique. Structurellement, fondamentalement, les DRM, ça ne marche pas. Ca n’a jamais marché. Ca ne pourra jamais marcher. Pourquoi ? Parce qu’une DRM c’est une clé cachée soit dans le logiciel nécessaire pour la lecture, soit sur un serveur. Dans le premier cas (celui des DRM d'adobe), un jour ou l'autre la clef sera trouvée (déjà le cas pour adobe), dans le second, le client est soumis au bon vouloir du fournisseur qui peut décider d'un jour à l'autre de couper le serveur, bloquant ainsi la copie d'un appareil à l'autre (cf. Yahoo Music 2008). Mettre des DRM dans des livres, c’est inciter ceux qui aiment se casser la tête sur des problèmes informatiques à chercher et à trouver un moyen de les supprimer ou de les contourner. Et, évidemment, ils trouvent. Ceux qui cherchent et trouvent pour la beauté du geste démontrent, ce faisant, l’inefficacité des DRM. Puis il y a ceux qui cherchent parce qu’ils ont l’intention de pirater. Ils trouvent parce que les premiers trouvent. Et donc eux aussi, les voleurs, les DRM ne les embêtent pas. Il y a une catégorie d’usagers que les DRM embêtent. Ceux qui ne sont pas informaticiens. Et ceux qui ne sont pas pirates. Ceux là s’arrachent les cheveux pour installer le logiciel Adobe Digital Editions d’Adobe permettant de lire un e-book, et ils passent des 20 ou des 30 minutes au téléphone avec notre SAV pour essayer d’installer le machin contre quoi ils pestent. Avec ces gens-là les DRM ça marche ! Hourrah ! Manque de chance ça ne sert à rien. Ils n’avaient pas l’intention de voler. Ni celle de pirater. Ni de disséminer. Mais peut-être de prêter leur e-book comme ils prêtent aujourd’hui leur livre Gutenberg. Car les livres Gutenberg, ces bons vieux livres papier, on les prête à loisir. On peut en photocopier des pages, ou un extrait : pour travailler. Pour illustrer un exposé. Pour inciter à lire. Sans que les auteurs s’en trouvent lésés.
  3. Et puis il y a une troisième raison pour laquelle nous arrêtons de jouer à ce jeu des DRM qui ont conduit les major-companies du disque, et avec elles les disquaires, au plus bel harakiri industriel de ces dernières années. Cette troisième raison est en forme de question : à quoi, à qui ça sert les DRM si ça emmerde les honnêtes gens et que ça ne gêne pas les voleurs ? Et si tout ça n’était pas une vaste arnaque des Adobe et autres gros revendeurs en « circuit fermé » (Apple – iPad / Amazon – Kindle) pour empêcher les petits poissons (les libraires trop petits) d’approcher du marché. Car enfin sans DRM (il n’y a plus de DRM sur les fichiers musicaux aujourd’hui) aucun libraire n’a de souci pour vendre des e-books aux clients qui souhaitent en acheter. Des e-books sans DRM, alors lisibles sur n’importe quelle tablette (avec DRM les clients de la fnac vont devoir se souvenir que c'est à la fnac qu'ils ont acheté leur livre. Et s'ils l'ont acheté chez Amazon ils vont devoir se souvenir que c'est chez Amazon, et si c'est chez Apple... Pas simple le progrès technique ! Nous allons continuer à vendre des e-books, bien sûr. Sans DRM, ou filigranés.)

Et pour finir, cette remarque : il paraît que les DRM ça sert à protéger les auteurs, en grand danger d’être pillés, privés de leurs légitimes droits d’auteur. Privés de leur moyen de subsistance. Hum ? est-ce qu’ils se sentent pillés les auteurs quand des lecteurs prêtent leur livre à leur entourage? les incitant à lire cet ouvrage qu’ils ont aimé, multipliant le bouche à oreilles, lequel est la meilleure des publicités. Celle qui fait vendre. Oserai-je être iconoclaste ? Si risque il y a, ce que je ne crois pas – le piratage des disques est plutôt moindre maintenant que l’offre légale est techniquement et économiquement acceptable – est-ce qu’un auteur ne serait pas aussi bien rémunéré avec des droits portés à 20% sur le numérique qu’avec des droits à 5% pour l’édition en poche, même avec un peu de dissémination illégale ?