J'avais lu "Le Vieil Homme et la Mer" d'Ernest Hemingway quand j'étais adolescent, le souvenir d'un poche usé, vacances, la lecture ne m'avait pas passionné plus que cela. Je n'avais gardé en tête que l'histoire sans apprécier l'intensité, le style. J'avais beaucoup plus aimé "L'Adieu aux armes" et "Pour qui sonne le glas", lus plus tard. Ils étaient tous deux je me rappelle sur une bibliographie idéale, polycopiée par un professeur de français. Des poches classiques qui se balladent au hasard des greniers depuis des générations maintenant. Belle occasion qui se présente aujourd'hui de relire ce petit texte, je ne reviendrais pas sur la polémique qui s'est développé autour de cette traduction proposée par François Bon. On rappelera que le livre numérique n'est pas disponible chez l'éditeur, on se demande bien pourquoi.
Nous connaissons tous l'histoire. Combat éternel entre l'homme et les éléments. Mais bien plus ici, on dépasse le fait divers et l'anecdote. Ce qui m'avait complètement échappé plus jeune. Texte magnifique, épuré, poli, coupant comme un bel harpon forgé dans le plus bel acier. Cet acier que l'homme n'a plus à la fin du livre pour se défendre des attaques des requins qui lui dévorent son beau poisson. Lutte âpre entre l'homme et le poisson, le fil de la mort qui peut basculer à tout moment d'un côté ou de l'autre, tout sonne juste. L'intensité du récit qui monte crescendo au fur et à mesure du livre. On ne décroche pas, je l'ai relu deux fois pour en apprécier plus la qualité, le style, le vocabulaire des hommes de mer, les évocations sensuelles de l'univers marin. Un texte d'une humanité profonde, le jeu parfait entre ce que l'homme dit à voix haute et ce qu'il dit dans sa tête. François Bon a sans doute poli cette traduction depuis des années, cela se sent. En bon artisan pour le travail bien fait. Je ne sais pas si la traduction de commande de l'auteur d'Au bon beurre est objectivement médiocre ou pas, il est à souhaiter que l'éditeur se penche sérieusement sur la question, en toute honnêteté. Une belle métaphore également de François Bon lui-même, qui s'est vu dévorer sa belle traduction en quelques jours seulement: "Dix-huit pieds de la tête à la queue, dit le pêcheur qui avait mesuré". En attendant, nos amis québécois vont héberger soigneusement ce très beau texte qui prend la mer du web, qui honore Ernest Hemingway -confiance là-dessus-, à la fois en défenseurs de la francophonie et hommes de mer qu'ils sont. Ce que je sais, c'est que j'ai beaucoup aimé la traduction de François Bon et qu'elle tient fichtrement bien la mer...
PS: si vous aimez le livre, je vous invite à acheter quelques bons livres sur Publienet et lui glisser en prime un petit mot de remerciements.
Lu dans le cadre du club des lecteurs numériques.