Effervescence cette semaine autour de l'ouverture prochaine aux Etats-Unis d'une offre Kindle Unlimited chez Amazon. Le site GigaOm a dévoilé des écrans de tests ainsi qu'une première vidéo promotionnelle qui ont été depuis promptement supprimés. Amazon proposera sans doute dans les prochaines semaines cette offre au prix de 9,99$/ mois en lecture illimitée sur l'ensemble de son environnement propriétaire (ses tablettes Fire, ses liseuses en téléchargement, mais aussi son prochain smartphone). Un modèle en abonnement illimité qui prend résolument la voie de modèles dans la musique (Spotify, Deezer) ou dans la vidéo avec Netflix. Certains acteurs se sont déjà positionnés aux Etats-Unis sur la lecture numérique en streaming comme Oyster, Scribd ou Comixology déjà racheté par Amazon. Le géant américain, qui représente déjà un vrai monopole sur le marché anglo-saxon avec 60% de parts de marchés aux Etats-Unis et même 80% au Royaume-Uni dans le téléchargement à l'unité, les rejoindrait avec une offre de titres certainement similaire. On parle de 600.000 titres disponibles au démarrage. Tout va dépendre bien évidemment de l'étendue des catalogues, notamment ceux des majors de l'édition américaine qui sont la clé du système.
Aucune annonce officielle pour la France si ce n'est des distributeurs approchés, ce n'est pas nouveau. On peut imaginer qu'Amazon pourrait étendre rapidement avec une surface identique à celles de pionniers comme Youboox ou Youscribe, voire même pourquoi pas avec celle d'Iznéo dans la bande-dessinée, encore que ce soit plus difficile puisque les éditeurs sont à la fois "juges et partis" sur cette plateforme. Rappelons que la "Bibliothèque de prêt Kindle" existe déjà, accessible en souscrivant un abonnement Amazon Premium à 49€ par an en France. Les membres Amazon Premium possédant un Kindle peuvent emprunter gratuitement un livre par mois, sans date limite de retour (un seul emprunt à la fois) parmi plus de 6.000 titres en français figurant dans cette bibliothèque de prêt. On est pour l'instant bien loin d'une offre réellement en accord avec ce que les lecteurs recherchent véritablement, suffisament large et ciblée sur des titres best-sellers. La "longue traine" n'aura pas eu de succès dans l'imprimé, aucune raison qu'elle ait plus d'avenir dans l'univers dématérialisé.
L'enjeu est bien là pour convaincre de dépenser 9,99€ par mois, une somme importante si on la compare avec l'achat mensuel de livres en France, qui plus est dans le seul environnement numérique. Comme le rappelle DigitalBookWorld, avec de telles offres le lecteur n'est pas certain de rentrer dans ses frais. On est très loin de playlists comme dans la musique ou de séries/ films consommées en deux heures en famille. Avec un prix moyen de 6,33$ pour les livres numériques à succès, l'abonné devra lire 20 livres par an pour y parvenir -à condition qu'il trouve réellement tout ce qu'il souhaite-. Or, seulement 14% des Américains lisent autant, d'après une étude du Pew Research Center. Pour séduire vraiment un public de masse, il faudra aller au-delà, 6,99€ voire moins, avec les dégradations de revenus pour les auteurs et les éditeurs que cela suppose. Après, vous me direz, s'il n'y a plus d'éditeurs à rémunérer comme le souhaite Amazon à terme, c'est évident que cela résoud une grande partie de l'équation.
PS: MAJ: Amazon a ouvert aujourd'hui son offre Kindle Unlimited, premier mois gratuit. Il aura sans doute dû se résoudre à un plan B dans l'urgence, avec moins de 30.000 titres disponibles pour l'instant. Dans les conditions d'utilisations de ce service, Amazon limite le téléchargement à 10 livres en prêt à la fois sans date de retour. Il se réserve également la possibilité de surveiller attentivement toute utilisation frauduleuse sur les comptes: "We reserve the right to accept or refuse membership in our discretion. You may not transfer or assign your membership or any Kindle Unlimited benefits. We may take reasonable actions necessary to prevent fraud, including placing restrictions on the number of titles that can be accessed from the program at any one time". A suivre...
PS: Confirmation, les majors de l'édition américaine sont pour l'instant tous absents de cette offre (lire le billet du NYT). Dans un contexte de négociations très tendues -notamment avec le goupe Hachette-, Amazon semble bien mettre une pression supplémentaire.