"Ce roman est une libre inspiration de la vie de Gil Scott-Heron, un des musiciens noirs les plus importants des ces dernières années. Il a emprunté au jazz au blues, a planté les premières graines du rap et du slam, et pourtant, comme beaucoup, je ne le connaissais pas. Enfin, ça c'est ce que je pensais avant d'ouvrir le livre et de faire des recherches sur Gil Scott-Heron. Et là, je découvre que je connais au moins deux titres: The bottle et Me and the devil. Et ces deux titres sont tellement excellents que je vais continuer à découvrir l'œuvre de cet homme.
Le roman est malicieusement construit. Le narrateur, ce vieux chat roux est un raconteur d'histoire hors pair qui n'oublie pas de raconter ses propres mésaventures, qui ressemblent à celles de beaucoup d'Etats-uniens pauvres. Très attaché à Sammy, il le suit partout: "Un jour, après une course-poursuite mémorable, à bout de souffle, il m'a confié que je suis sa lune. Je lui ai rétorqué qu'il est mon soleil. Nous avons éclaté de rire. Un rire franc et massif, sous les yeux des passants ahuris. (...) Je peux vous garantir que pas une fois je ne l'ai quitté d'une semelle car le soleil n'est rien sans la lune, et la lune rien sans le soleil". Parfois, il s'éloigne de son soleil pour raconter ses aïeux: le père Reginald Kamau, Jamaïcain débarqué aux Etats-Unis, qui deviendra joueur de football, sera le premier joueur noir à évoluer en Écosse, puis finira sa carrière sportive au Brésil. Les pages consacrées au Brésil et à l'Afrique qui y a laissé son empreinte surtout dans certaines régions sont sublimes: poétiques, musicales, sensuelles... Il parlera aussi un peu de la mère de Sammy et beaucoup de Lily, sa grand-mère, celle qui l'a élevé les douze premières années de sa vie, cette femme née en Afrique et arrivée en Amérique, qui fut de toutes les campagnes menées par les noirs américains pour les droits civiques. Des pages aussi sur l'esclavage, pour bien redire que les noirs n'ont pas demandé à être envoyés en Europe ou en Amérique.
Mais bien sûr le livre s'attarde sur Sammy Kamau-Williams, nous donne envie de (re)découvrir sa musique. Sans faire une biographie complète, détaillée et linéaire, il insiste sur des points importants, des concerts mémorables, des morceaux qui ont marqué l'histoire de la musique, des descentes aux enfers, des passages à vide, de sa voix profonde, et toujours cette lumière qui émane de Gil Scott-Heron et qui illumine le roman. Normal me direz-vous pour un soleil."
[La Divine chanson de Abdourahman A. Waberi chez Zulma]
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