Libération: les journalistes passent à l'eBook
Des Kindle Fire d'Amazon sur Qoqa

La colère gronde sur les prix

ColereVincent Monadé, directeur du MOTif, qui résume assez bien la situation. Après un mois de baisse de la TVA sur le livre numérique, on ne voit toujours absolument rien venir chez la très grande majorité des éditeurs. Un non-événement. On se fiche de nous, c'est le sentiment qui revient chez tous ceux que je rencontre, étudiants, libraires, lecteurs en général. 400/500.000 personnes qui s'essayent en ce moment à la lecture numérique et qui ne sont pas content du tout face à une offre légale indigente, continuez comme cela messieurs les éditeurs... Et si on multipliait les initiatives comme celle de La Roche-sur-Yon?

PS: on relira avec intérêt la page consacrée à la TVA sur le livre numérique sur le site du SNE (Syndicat National de l'Edition), la belle victoire pour les éditeurs... C'est ici. Je la recopie ci-dessous si par hasard elle disparaissait. On en était tout ému à l'époque, chacun jugera.

La position française

Après un intense travail d’information auprès des parlementaires, le vote en loi de finances, le 15 décembre 2010, de l’harmonisation du taux de TVA du livre numérique sur celui du livre imprimé à partir du premier janvier 2012, représente une belle victoire pour les éditeurs. Plus largement, ce vote engage pour l’avenir la position résolue de la France en faveur de la promotion de la lecture à l’heure du numérique.
Plusieurs arguments présidaient à cette décision des parlementaires français: tout d’abord, la discrimination fiscale à l’encontre des livres sous format numérique apparaît illogique et discriminatoire. Un livre se définit en effet avant tout comme une œuvre de l’esprit, quel que soit son support. Des offres aux contenus équivalents doivent être proposées à des conditions concurrentielles équivalentes. Un taux de TVA fort pour le livre numérique pénalise injustement les premiers consommateurs, parfois obligés, du livre numérique, qui sont les populations handicapées et âgées (Le livre numérique permet l’agrandissement des caractères et la synthèse vocale, fonctions essentielles notamment pour les malvoyants.), ainsi que les étudiants et les chercheurs, premiers clients de livres numériques. Il semble donc tout à fait contraire à cette Europe de la connaissance, de la culture et de l’information que la stratégie de Lisbonne appelait de ses vœux.
En outre, il est particulièrement incompréhensible de pénaliser les livres numériques alors qu’ils représentent un marché émergent porteur de croissance et d’innovation dont tous les acteurs, y compris la Commission européenne, souhaitent l’essor rapide. La France s’est montré en pointe dans ce dossier principalement européen et a adopté une position ferme en faveur du développement économique de ce secteur. En effet, si les livres numériques sont actuellement vendus en France à environ -20 % du prix de leur équivalent en papier, l’internaute attend un prix du livre numérique encore moins cher (cf étude GfK 2010). Le renchérissement du coût du livre numérique par rapport au livre papier de 14 points de TVA va à l’encontre de cette attente d’une offre légale attractive, dont le développement constitue la priorité des éditeurs et est la meilleure réponse au piratage. Du point de vue de la compétition internationale, il convient de souligner que  les trois pays où le marché du livre numérique est le plus développé (Etats-Unis, Japon, Corée) pratiquent pour les ebooks des taux de TVA inférieurs ou égaux à ceux du livre papier équivalent. Enfin, l’application d’un taux de TVA réduit pour le livre numérique n’engendrerait aucun effet d’aubaine: les éditeurs ont intérêt à répercuter intégralement la baisse de la TVA sur les prix. Car si le prix des livres numériques ne peut suffisamment baisser, l’internaute se tournera vers l’offre gratuite et le piratage.
Le levier fiscal pourra contribuer, via le développement du marché, aux recettes fiscales de demain; il pourra également permettre aux libraires et aux plateformes françaises de se positionner sur un marché actuellement très dominé par quelques très grands acteurs extra-européens.

Convaincre nos partenaires européens

La commission européenne interdit l'application d'un taux de TVA réduit à la vente de livres numériques en ligne, au motif qu'il s'agit de prestation de services. Pourtant, l'annexe 3 de la Directive TVA consolidée spécifie une liste de services bénéficiant du taux réduit, et l'annexe 2 autorise le taux réduit pour les services audiovisuels.  Pour intégrer au droit européen un taux de TVA minoré sur le livre numérique, il faut  l’adhésion à l’unanimité de tous les membres de l’Union européenne: c’est pourquoi le Président de la République a confié à Jacques Toubon, le 9 décembre 2010, une mission pour la modernisation de la fiscalité culturelle européenne. Monsieur Toubon est chargé de convaincre la Commission européenne, le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne de réformer le droit communautaire de façon à permettre aux Etats membres qui le désirent l’instauration d’un taux minoré pour les biens et services culturels en ligne.
Le président de la Commission européenne José Manuel Barroso nous a lui-même exprimé son soutien le 10 janvier; plusieurs autres commissaires soutiennent cette idée, ainsi que de nombreux députés européens.

Réforme de la TVA au niveau européen : une opportunité pour le livre numérique ?

La Commission européenne a publié le 1er décembre 2010 son «Livre vert sur l'avenir de la TVA – vers un système de TVA plus simple, plus robuste et plus efficace»1. Elle se place notamment dans un contexte où «l’impact du vieillissement de la population sur les marchés du travail, les structures d’épargne et les dépenses publiques impliquera d’adapter la fiscalité». Elle part ainsi du principe que le financement de l’État-providence devra peut-être moins compter sur la fiscalité directe qu’indirecte. D’où l’importance de moderniser et simplifier le système de la TVA et de le rendre plus efficace.
Dans le cadre de cette consultation, la Commission pose plusieurs questions, notamment en ce qui concerne le lieu de la taxation. Il est particulièrement encourageant de constater que parmi les sujets soulevés, elle note les incohérences au niveau des taux de TVA appliqués à des biens ou des services comparables. Elle mentionne le cas des produits culturels soumis à un taux réduit qui sont taxés à un taux standard quand ils prennent la forme de services en ligne tels que des livres numériques ou des journaux. Elle cite la Communication de la Commission «Une stratégie numérique pour l’Europe» qui incite à traiter toutes les questions –y compris fiscales- posées par la convergence et reconnaît qu’il s’agit bien de discriminations.
La Fédération des Éditeurs Européens (FEE) a saisi l’occasion de cette consultation pour mettre en avant l’argument politique selon lequel le taux réduit de TVA contribue à la promotion du livre et de la lecture, les arguments économiques relatifs à l’élasticité de la demande et aux externalités positives d’une telle mesure pour la société, le fait qu’une telle mesure est préférable à tout système de subvention et, pour le cas spécifique du livre numérique, la nécessité d’un traitement fiscal neutre.
Fin 2011, la Commission devrait présenter une Communication sur la base des résultats de cette consultation.

Commentaires