101 notes dans la catégorie "HistoireLivre"

Les avenirs du livre

Sf A signaler une intéressante chronique à suivre cet été du côté de la Feuille, Hubert Guillaud nous propose une rétrospective sur l'avenir du livre dans la science-fiction: "J’avais envie de vous proposer pour l’été une courte série sur le livre dans la science-fiction. Comment les auteurs de science-fiction ont-ils regardé l’avenir du livre? Comment ont-ils projeté cet objet dans le futur? Le but n’est absolument pas d’être exhaustif, au contraire, juste de regarder l’avenir du livre via l’oeil de quelques auteurs et titres phares. Loin de moi de prétendre vous proposer une analyse encyclopédique du livre dans la SF. Juste de pointer via quelques lectures -emblématiques-, quelques visions de l’avenir du livre." Premiers billets sur Arthur C.Clarke et Isaac Asimov.

Le livre dans l'ère numérique

Esprit-2010-06-15 A signaler dans la revue Esprit de ce mois-ci, un entretien avec Pascal Fouché, docteur en histoire, éditeur et spécialiste de l'édition au XXème siècle, qui revient sur le livre et l'ère numérique. Le pdf est ici. Je pense que l'on a tendance à mélanger livre et lecture, l'histoire du livre numérique n'est pas l'histoire de la lecture numérique. A quoi bon disposer d'un fichier numérique si l'on ne dispose d'un dispositif de lecture toujours plus proche d'une expérience de lecture sur le papier. Qu'est ce que serait le format MP3 sans des petits baladeurs comme l'iPod? L'échec de Cytale en est bien la preuve à l'aube des années 2000. C'est bien l'apport d'une technologie d'affichage comme le papier électronique et son adoption par des acteurs comme Sony et surtout Amazon qui ont changé fondamentalement les choses. Nous ne serions pas là pour évoquer le "livre numérique" aujourd'hui, cela me paraît être une évidence. "Et, derrière les questions d'affichage du texte, il y a tout ce qu'on peut faire avec ce texte, tout ce que le numérique permet que le livre ne permettait pas  les commentaires, les renvois, les liens, etc. Les usages sont tout autant bouleversés parce que la lecture n'est plus aussi linéaire que sur un texte imprimé. La lecture devient ainsi un ensemble de lectures parallèles qui peuvent être interrompues par un lien, par des annotations, par des compléments d'informations faits par d'autres contributeurs. La façon de lire est en train de se métamorphoser. Les générations de gros lecteurs comme les nôtres sont habituées à lire de façon traditionnelle. Et, curieusement, les plus gros lecteurs sont ceux qui s'approprient le plus rapidement ces nouveaux modes de lecture. Des études récentes montrent que ceux qui achètent le plus de livres électroniques aux États-Unis sont déjà les plus gros lecteurs. Ils ne remplacent pas le livre physique par le numérique parce que finalement, ils ont une masse de livres physiques à disposition alors qu'il y a encore peu de livres numériques et qu'ils se sont appropriés le livre numérique comme un nouveau moyen de lecture en plus du livre physique. Mais cela va-t-il continuer? On pense aujourd'hui que le livre numérique ne va pas remplacer le livre physique. Le livre papier va continuer au moins pour une certaine partie de la production, bien qu'il y ait déjà une partie qui est dématérialisée ou va l'être rapidement."

Book, un produit révolutionnaire

Vous vous rappelez sans doute de nos deux moines devant leur nouveau dispositif de lecture, un moment culte qui avait fait le tour du web. Dans la même veine "Book", un nouveau dispositif révolutionnaire, une rupture technologique, que nous devons à nos amis espagnols, absolument génial. Merci à Mathias qui s'éclate en boucle dessus depuis une semaine!


L'Italie signe avec Google Livres

Italie Philippe Colombet (Google France) a annoncé ce soir à la Maison de la Chimie un accord avec le Ministère de la Culture italien en vue de la numérisation de fonds de bibliothèques. Un partenariat très important en Europe quand on sait la richesse du patrimoine imprimé conservé dans les bibliothèques italiennes (Ambrosienne, Laurentienne, Palatina, Marsiana, etc). Google compte numériser jusqu'à un million de titres en Italie. Est-ce que le Vatican va suivre? Le Saint-Père signer avec le diable, ce serait inédit... En tous cas, Alde Manuce aurait sans doute donner son feu vert à l'époque pour promouvoir ses propres ouvrages!

Livre numérique: pour un développement durable

000398614 Je ne voulais pas commencer cette nouvelle année sans revenir sur l'excellent rapport sur l'économie du livre et son avenir confié à Hervé Gaymard, publié à l'automne dernier aux Editions Gallimard/ La Documentation Française, que je viens de finir. Une excellente synthèse que tout les gens qui travaillent dans les métiers du livre (mais pas seulement) devraient se procurer. Face aux enjeux du numérique et de la vente sur internet, c'est bien le moment de faire le point. J'avais été séduit par la présentation qu'avait faite Hervé Gaymard de son rapport lors du dernier Salon du Livre. La lecture de son livre au titre heureux "Pour le livre" est passionnante de bout en bout. Notamment le rappel historique et le vaste comparatif du prix unique pays par pays. Une vraie loi de développement durable. Un petit livre face aux différents lobbying qui s'exercent à Bruxelles. Comprendre que si le livre est partout, dans sa diversité et son accès, autour de nous en France, nous le devons à l'égalité de tous les acteurs avec son prix unique. Un large chapitre en fin de volume est consacré au livre numérique avec cette évidence: "Le prix de vente devrait en touté état de cause être unique pour un même titre, si l'on souhaite éviter de retrouver sur internet ce que la loi de 1981 a permis d'éviter pour le livre papier, à savoir une guerre des prix entraînant une forte concentration de la diffusion et, à terme, un appauvrissement de l'offre. Les prix auront en revanche tout intérêt à être différents selon les titres (contrairement aux offres musicales aujourd'hui), en proposant le cas échéant des prix inférieurs pour les titres les plus anciens. Il est même envisageable d'imaginer des offres permettant l'acquisition de tout ou partie d'un livre, voire des possibilités d'abonnement. L'essentiel pour les acteurs de l'édition est, comme l'a rappelé Bruno Patino dans son rapport, de garder la maîtrise de la fixation du prix de vente et d'éviter qu'il soit fixé par les diffuseurs ou, plus probablement, par un opérateur dominant dont on peut présumer qu'il serait extérieur au secteur. On peut dès lors évoquer deux pistes principales: faire entrer le livre numérique dans le champs de l'application de la loi de 1981 ou développer la pratique du mandat, telle qu'elle existe, par exemple, pour la presse. Si cette dernière solution, qui repose sur le mode du contrat, est plus fragile que la voie législative, la première option pose quant à elle la question difficile de la définition du livre numérique. Le mandat pourrait également apporter de meilleures garanties en ce qui concerne le téléchargement de titres opéré sur des sites implantés dans des pays sans prix fixe." Les deux, loi pour un prix du livre "numérisé" strictement identique dans son contenu à la version papier, mandat pour des livres aux possibilités étendues? En tout cas, loi ou mandat, l'essentiel est bien de conserver, pour le livre dans sa version numérique, la même diversité dans l'accès au livre que nous avons aujourd'hui et que nous envient de nombreux pays à travers le monde.

Livres: l'ancien et le moderne

Exlibris 10.000 bibliophiles en France? 100.000 dans le monde? Des chiffres à réduire par dix? A lire du côté du blog du bibliophile qui nous offre aussi une revue de blogs. On lira également Frédéric Reitz, libraire à Montmorillon et rédacteur en chef du Magazine du Bibliophile qui revient sur le marché du livre ancien dans Le Berry: "On parle beaucoup du livre électronique. Ne va-t-il pas concurrencer les livres anciens? Ce n'est pas possible. D'abord, la télévision n'a pas supplanté le cinéma. Ensuite, il s'agit d'innovations qui se superposent et dont la vie est parallèle. Oui, l'ebook est plus léger. Oui, il pourra servir à des étudiants. Mais avant que le livre ne disparaisse complètement, vous et moi on n'existera plus." En ce qui me concerne, vous l'aurez compris, on peut s'intéresser aux livres électroniques et aux livres anciens. D'ailleurs, la meilleure librairie numérique de France, Dialogues à Brest, ne vient-elle pas aussi récemment de racheter le site Galaxidion? Comme quoi, ce n'est pas incompatible, bien au contraire, quand on aime les livres, tous les livres!

François Gèze sur le livre dématérialisé

Geze Intéressante intervention de François Gèze (directeur éditorial des Editions La Découverte) sur le livre dématérialisé à l'ENSSIB qui se livre à l'exercice périlleux d'une prospective à l'horizon 2019. Passionné et passionnant que François Gèze que l'on entend finalement trop rarement. Quelques remarques sur les aspects historiques qu'il rappelle. Tout d'abord, il y a dix ans en 1999, la technologie de l'encre électronique était encore sur les paillasses des laboratoires. Tous les professionnels des métiers du livre ne savaient absolument rien de cette technologie. Assimiler les premiers modèles de livres électroniques (2000-2001) à l'encre électronique, comme il semble le faire, est absolument faux. C'est à partir de 2004 que Sony a développé ce procédé pour une application au livre avec le Librié sur le marché japonais. D'autre part, une erreur grossière concernant la photocomposition qui ne date pas des années 90, comme il le dit, mais qui s'est développé entre 1950 et 1970, une évolution lente et constante (voir Wikipedia). François Gèze a connu bien évidemment cette évolution mais il semble un peu se perdre dans les dates. C'est à partir du début des années 80 que la Publication Assisté par Ordinateur (PAO) s'est développé avec l'accélération que l'on connait. Il passe sur les "illuminations de Jean-Marie Messier", ensuite il énumère les différents secteurs du livre et les implications du numérique. De manière très affirmative (trop me semble t-il), il passe à la trappe les livres pratiques, les guides de tourisme. Cela supposerait que nous ayons de l'internet haut débit sur l'ensemble du globe dans dix ans pour partir aussi bien à San Francisco qu'en Afghanistan ou en Irak (j'espère que l'on pourra y retourner à cette date). Je fais le pari contraire. Nous offrirons aussi toujours à nos proches des livres sur la cuisine au wok ou la santé par les plantes. Assez d'accord avec lui sur les scénarios "rose" et "gris" sur le marché du livre scolaire français qui dépend de l'implication de l'Etat dans le développement numérique dans les écoles. Pour le pari sur la littérature, moitié numérique/ moitié papier, je le rejoins complètement à la fois sur l'idée du livre-clos, d'une oeuvre finie qui est justement en  contradiction (et le restera) avec le flux du web. "Fixer à l'instant t une oeuvre finie, c'est absolument irremplaçable". J'ajouterais que la notion de livre en tant que "conservateur de notre mémoire" (je lance la formule) est au coeur de ces livres clos. Et les livres "non liquides" iront bien au-delà des livres de littérature, j'en suis convaincu. Il voit la FNAC en 2019? La maison est à vendre en ce moment et je ne sais pas si les futurs investisseurs sont aussi sûrs que lui là-dessus! Amazon en 2019? Cela me semble sûr, lui qui investit aussi dans nos chaussures. Google en 2019? C'est beaucoup moins sûr avec les enjeux du web sémantique. Prix unique du livre "numérique clos" en 2015 pour protéger des libraires spécialisés "anti-robots"? Bien avant, j'ai envie de dire si l'on veut protéger notre réseau de libraires incapables de pratiquer le dumping actuel d'Amazon. Merci à François de nous faire cogiter. A signaler d'autres interventions en vidéos (merci à Alain Pierrot).


Le livre soluble dans le web?

Muriel Puisque le livre serait une base de données, le flux serait l'avenir du livre... On lira le long plaidoyer de Hubert Guillaud sur LaFeuille pour un livre/web universel -suite aux remarques de Thierry Crouzet, hier, qui s'interrogeait sur l'inadéquation du passage de son dernier livre sur le web (900 téléchargements, 3 commentaires): "Les nouveaux formats ne sont pas adaptés à la lecture web, à la lecture à l’écran, avec les possibilités communicationnelles des écrans. Ces images de livres (le fameux pdf) n’ouvrent pas suffisamment de possibilités en terme d’interaction. Ils demandent de s’immerger dans un document, sans bénéficier des possibilités communicationnelles et relationnelles qu’a inventé le web: ces documents ne sont pas citables autrement que dans leur entièreté, ne proposent pas d’interaction poussées (difficiles à annoter, à partager, à commenter), ne sont pas indexables, mixables, cherchables, scriptables… Ils demeurent des silos, assez semblables à ceux que le papier à produit, hormis pour ceux qui les produisent. Google sera seul capable d’exploiter les contenus des livres qu’il va proposer dans ces formats: lui seul pourra en produire le graphe, car lui seul en disposera sous un autre format que celui qu’il proposera aux lecteurs. Lui seul pourra créer des graphes et des relations entre les contenus, car lui seul disposera de la base de données des livres: nous n’aurons accès qu’à une succession de fichiers, que nos outils auront du mal à interpénétrer. La structure web, elle, propose un autre contrat de lecture. Chaque partie de document est citable, anotable, commentable, accessible, indexable, cherchable, mixable, scriptable… De page en page, de billets en billets, de flux en flux, ces contenus sont agrégables et peuvent proposer des oeuvres finalisées, consommables comme on le souhaite. Mais leur flux n’est pas génératif. Si je m’abonne au flux RSS de la Feuille, j’obtiendrais les derniers billets et les prochains. Je ne pourrais pas obtenir l’oeuvre dans son ensemble, depuis le début, à une dose que je serais capable d’absorber, petit à petit. Si cela n’a que peut d’intérêt pour une oeuvre en continue, en devenir, qui se couple à l’actualité comme l’est un blog, cela n’est pas la même chose pour une oeuvre finie, aboutie, terminée. En passant au format numérique, le livre demeure un bloc qui n’est pas adapté au flux du web". Et si les livres n'étaient justement pas un contrat de type web, mais le passage d'une oeuvre finie, repérable, mémorisée, indépendante entre un auteur et un lecteur, entre un éditeur (lui-même à l'initiative du livre) et un lecteur. Est-ce qu'un livre suppose obligatoirement une glose infinie sur lui-même "indexable, mixable, cherchable, scriptable, citable, annotable, commentable, agrégable, consommable, accessable"? Je ne pense pas que le livre est soluble (dissolvable?) dans le web. Amazon, Barnes and Noble (et Apple demain) ne se posent pas trop la question en "singeant le papier" avec un contrat de lecture simple qui n'a rien à voir avec le web justement. Un livre, je vous le délivre en vingt secondes sur votre téléphone ou votre Kindle/Nook. Il semblerait que cela garde du sens et rencontre un certain nombre de lecteurs intéressés. Je me demande aussi si Marc Lévy a envie ce week-end d'échanger, de répondre à 300.000 lecteurs, voire de modifier son texte lundi matin? Le débat est ouvert...

PS: pour ceux qui auront du mal à lire complètement le billet, voici un fichier fini et exportable justement, une bonne alternative à l'imprimante.

@ photographie: Muriel Taragano (Espace Mica).


Réflexion autour du livre et de l'oeuvre numérique

"Texte envoyé par Alain Pierrot et Jean Sarzana (merci à eux):"

 La réflexion sur l’œuvre numérique en général, et sur sa définition en particulier, occupe les esprits depuis plusieurs mois dans le monde du livre. Il est en effet légitime de bien s’entendre sur ce dont on parle, pour mettre les notions nouvelles en perspective avec les anciennes, en termes de droit comme en termes de marché. Mais depuis longtemps le livre couvre des champs multiples, il se révèle étonnamment flexible, et de surcroît sa matière est en mutation. C’est dire combien l’exercice s’avère délicat.

Récemment, le SNE a apporté sa contribution à la réflexion collective sur ce thème dans le cadre de la commission dite post-Patino. Nous proposons ici la nôtre, en deux approches successives.

La première s’attache à cerner le champ du livre en tant qu’œuvre incorporelle, indépendamment de son support, qu’il soit imprimé ou numérique. C’est une démarche d’abord conceptuelle, apparue comme un préalable nécessaire à la réflexion sur le livre numérique lui-même.

La seconde approche, plus factuelle, porte sur les attributs du livre imprimé et propose un essai de typologie primaire de l’œuvre numérique.

Cette contribution ne prétend pas faire le tour du sujet. Elle tend simplement à clarifier le débat en cours en vue de faciliter les échanges en cours et à venir.

*

La réflexion sur le livre en tant qu’œuvre est partie d’une citation de Kant :

 «Un livre est l’instrument de la diffusion d’un discours au public, non pas simplement des pensées … C’est là que réside l’essentiel, à savoir qu’il n’est pas une chose qui est diffusée par là, mais … précisément un discours, et dans sa lettre même [1]».

Et encore: «L'auteur et le propriétaire de l'exemplaire peuvent dire chacun avec le même droit du même livre: c'est mon livre! mais en des sens différents. Le premier prend le livre en tant qu'écrit ou discours; le second simplement en tant qu'instrument muet de la diffusion du discours jusqu'à lui ou jusqu'au public, c'est-à-dire en tant qu'exemplaire [2] ».

Cette formulation du grand philosophe allemand, qui souligne la valeur propre de l’œuvre littéraire et rappelle les caractères principaux du droit d’auteur, nous paraît directement répondre aux interrogations actuelles sur le numérique [3].

On pourrait donc avancer que le livre en tant qu’œuvre présente les caractères suivants:
Le livre se présente comme l’inscription d'un discours à l’intention d’un auditoire indéterminé, qui va se l'approprier selon un mode aléatoire (1).
C'est son caractère de référence qui confère au projet de l'auteur le statut de livre. C'est donc nécessairement une oeuvre achevée, prototype qui va imposer sa structure à ses différents avatars (2).
Les techniques d'inscription et les formes de médiation de ce discours, précises et reconnues, permettent de combler la distance qui sépare, dans l’espace et dans le temps, l’auteur du discours et le public de ses lecteurs (3).
L'émetteur et son discours sont identifiés grâce à un code commun implicite -la publication- entre l’auteur et ses lecteurs. Ce code donne aussi l’assurance que la forme donnée au discours, les modalités de sa diffusion et les conditions de son appropriation par le public répondent bien à l’intention de son auteur (4).

       (1)   La référence au discours ne vise pas seulement la dimension textuelle de l’écriture (comme elle pouvait le faire pour Kant à son époque). Dans une bande dessinée, un livre d’art, un livre scolaire ou un guide de voyage, le discours est largement porté par l’image, qui représente bien davantage que la simple illustration d’un texte écrit [4].

      (2)  Pour répondre aux critères d’une œuvre, un livre doit nécessairement se présenter comme achevé - même s’il n’a pas reçu de l’auteur sa forme définitive [5] -et son auteur identifié comme tel- même s'il reste anonyme. Il doit également s’ériger sur un discours construit. Au-delà de son caractère achevé, qui définit l’œuvre par les limites qu’elle se fixe à elle-même, le livre doit exprimer une cohérence et apparaître comme un tout structuré, ces caractères étant perceptibles par d’autres que par son seul auteur [6]. Chaque livre constitue une référence unique, dans l’espace et dans le temps.

      (3)  Les techniques d’inscription vont de la copie manuelle à l’imprimé et de l’ouvrage papier numérisé à l’identique au fichier numérique né et diffusé sur Internet.

Par «formes de médiation précises et reconnues», on entend la transmission de l’œuvre en  direction de ses publics (par les ateliers monastiques, le colportage, la diffusion, les librairies, les foires et salons, les bibliothèques, la toile), sa conservation (dans les archives du libraire ou de l’éditeur, aux fins d’exploitation de l’œuvre, ou au dépôt légal, pour des raisons d’ordre administratif) et la communication faite à partir ou autour d’elle (la promotion du livre sous toutes ses formes: presse, émissions sur le livre, prix littéraires, lectures publiques,…). Ces formes de médiation sont précises et reconnues dans la mesure où elles font l’objet de pratiques et de normes arrêtées par les professionnels eux-mêmes et admises par le public des lecteurs, étant entendu qu’un livre peut être appelé à sortir de son bassin linguistique et du cadre de son époque.

(4) Ce code commun porte sur les métadonnées de l’ouvrage, qui changent selon les époques (nihil obstat, privilège royal, achevé d’imprimer, notice bibliographique).

Les autres conditions posées par le code commun définissent le champ du droit moral.

*

Cette base une fois établie –avec les correctifs qu’elle appelle– il est moins malaisé de cerner les différentes acceptions que recouvre la notion de livre, sous sa forme imprimée comme sous sa forme numérique.

Le livre imprimé pourrait donc se caractériser ainsi :

Un livre imprimé se présente comme l’inscription sur un support papier d'un discours établi par son auteur à l’intention d’un auditoire indéterminé, à l’issue d’un travail éditorial le plus souvent défini par contrat. Il constitue un ensemble graphique achevé, illustré ou non (1).

Un livre imprimé est reconnu comme tel à travers sa complexion matérielle et les métadonnées qui lui sont propres. Elles lui confèrent son identité et le garantissent comme référence (2).

Les techniques d'inscription de l’œuvre et les pratiques de sa médiation sont assurées par l’éditeur, qui garantit que la forme donnée à l’oeuvre, les modalités de sa diffusion et les conditions de son appropriation par le public répondent bien à l’intention de son auteur (3).

      (1)   Ici apparaît la fonction éditoriale, qui établit le texte et le met au jour, l’édite et le publie. Ce travail, auquel le contrat d’édition confère son caractère professionnel, donne vie et réalité formelle à une œuvre préexistant à son intervention. La formule «ensemble graphique» permet d’intégrer les bandes dessinées ou les ouvrages pour enfants d’où la forme textuelle peut être formellement absente, et qui n’en constituent pas moins des livres où c’est l’image qui porte le discours. En revanche, elle ne prend pas en compte l’image animée ni le son.

Le livre imprimé se distingue aisément de l’article de presse –à l’œil nu, peut-on dire-. Quant au catalogue de voyage, à la notice technique et au mode d’emploi, c’est le caractère interchangeable de leur auteur et le défaut de personnalité de leur discours qui en font des documents, et pas des livres. En revanche, ce caractère est reconnu aux catalogues d’exposition dès lors qu’ils ont un discours propre au-delà des œuvres qu’ils évoquent.

(2)   A côté de l’œuvre qu’il contient, identifiée par son titre, le nom de son auteur et la date de sa publication, chaque livre en tant qu’objet physique dispose de sa propre identité, distincte de celle de tout autre livre (langue, format, poids, ISBN,…). Le bon référencement – au-delà des nécessités de l’EDI [7] - est une exigence qu’imposent le respect de l’auteur et celui du lecteur [8].

(3)   Confiée aux mains de l’éditeur, l’œuvre doit y trouver non seulement sa forme matérielle et la garantie de son exploitation, mais aussi l’assurance que l’une et l’autre  offrent bien au public l’image que son auteur veut que celui-ci en reçoive. C’est la contrepartie du fait qu’à travers l’éditeur, l’auteur laisse le lecteur s’emparer de son œuvre (à travers les relais que constituent les librairies, les bibliothèques,…).

*

S’agissant du «livre numérique», la réflexion s’appuie sur deux éléments propres aux auteurs, c’est-à-dire aux tenants du «discours»:

            - à travers le démembrement du codex [9], la numérisation constitue pour les créateurs une véritable novation quant à la substance même de l’œuvre. Elle permet son éclatement, facilite sa dissémination à l’infini, interdit pratiquement tout suivi de son exploitation sur le Net –sauf marquage, peu efficace, et traçabilité, coûteuse– et peut conduire à la perte de son identité, partielle ou totale. Les auteurs estiment en conséquence que la numérisation introduit une différence de nature, et pas simplement de degré, dans la réalisation et dans l’exploitation de leurs œuvres.

- nombreux sont les auteurs qui ont directement acquis sur le Net une expérience vécue, à travers leur recherche personnelle. Explorant les spécificités de la lecture sur écran, moins linéaire que celle du livre, et tirant profit des possibilités de recherche plein texte et de navigation, ils ont souvent intégré dans la trame de leur “discours” les nouvelles conventions de communication du texte enrichi de liens internes et externes (hypertexte et hypermédia: images fixes, son, vidéo). Leur travail de création leur permet ainsi d’opérer une distinction entre différentes sortes d’œuvres, depuis le livre papier -oeuvre close et fixée dans sa forme- jusqu’à l’oeuvre numérique -oeuvre ouverte, protéiforme et constamment évolutive.

On en arrive ainsi à l’échelle suivante [10] :

A. Un livre est dit «numérisé» lorsqu’il est issu d’un ou de plusieurs ouvrages primitivement réalisés sous une forme imprimée qui ont simplement fait l’objet d’un changement de support. C’est un ouvrage «clos», achevé au même titre que l’œuvre papier dont il est directement issu. Il s’apparente à un fac-similé de celle-ci (1).

B. Un livre est dit «numérique» lorsque l'ensemble qu'il constitue est originellement réalisé sous la forme de fichiers informatiques par un ou plusieurs auteurs dont il exprime le discours construit sous une forme achevée avec le concours d’un ou de plusieurs éditeurs (2). Appelé à une large diffusion par la voie exclusive d'Internet, il ne peut être lu que sur un écran, qu’il soit fixe ou mobile (3). Lorsqu’une oeuvre numérique fait en totalité l’objet d’un téléchargement sur un support papier, cette opération lui confère sous forme dérivée les caractères essentiels d’un livre (4). 

      (1)  Lorsque le livre naît de la mise en forme numérique d’un ouvrage originellement réalisés sous la forme imprimée, il ne s’agit pas d’un livre numérique, mais d’un livre numérisé [11]. La différence est manifeste, dans la mesure où le premier a une origine et une forme exclusivement informatiques, alors que le second doit son existence aux antécédents papier dont il procède.

      (2)  Les deux caractères constitutifs du discours –construit et achevé- étaient implicitement réunis dans le livre, à la fois objet physique et œuvre de l’esprit. L'approche numérique met à jour cette dualité originelle du codex imprimé. Or il faut bien la reconstituer autrement qu’à travers l’imprimé, afin qu’un lien subsiste dans l’immatériel entre le tout et les parties.

      Pour être numérique, l’ouvrage se doit d’échapper aux techniques autres qu’informatiques. Il ne peut être réalisé, publié, exploité et transmis que sous la forme immatérielle d'un fichier. A défaut d’une édition première intégralement numérique, l'ouvrage ne peut plus mériter ce qualificatif.

L’intervention d’auteurs multiples sur ou dans une même œuvre est un des nouveaux aspects de la création numérique, qui échappe aux paradigmes de la littérature générale. De même, l’œuvre numérique invite à la conjonction de deux types d’intervention éditoriale, l'une sur le ou les textes constitutifs de l'oeuvre, l'autre sur la création entre eux d’un réseau d’hyperliens qu'on peut au-delà d'une certaine masse critique considérer comme une base de données.

      (3)  Un ouvrage numérique ne peut être diffusé en tant que tel que via un réseau de même nature, et ce à titre exclusif, sauf à perdre sa nature pour en prendre une autre : celle de cédérom s’il fait l’objet d’une gravure, ou de livre s’il est téléchargé à partir d’une imprimante. Il ne peut donc faire l’objet que d’une représentation, toute reproduction lui imposant un changement de support et lui faisant ainsi perdre son caractère originel.

Par voie de conséquence, une œuvre numérique ne peut être lue que sur un écran, quel que soit cet écran, fixe (ordinateur) ou mobile (téléphone, assistant personnel,…)

(4) Lorsque l’oeuvre numérique adopte par téléchargement la forme imprimée, celle-ci appartient ipso facto au champ du livre, sous sa forme de codex (impression à la demande). Le livre apparaît dans ce cas de figure comme un produit directement issu de l’oeuvre numérique. On est donc à front renversé par rapport aux conditions classiques d’exploitation du livre pratiquées jusqu’ici.

C. Le livre numérique se distingue d'autres espaces interactifs en constante évolution et ouverts à tout intervenant extérieur:

            - le blog est sans doute la forme la plus répandue de ces ensembles numériques, dont les participants ne sauraient être reconnus comme les co-auteurs de l'ensemble, pour autant qu'il reste ouvert. Si un blog fait l'objet d'une édition, fixant billets et commentaires d'une période donnée, les échanges de cette période peuvent acquérir le caractère d'œuvre achevée -et ses participants celui d'auteurs d’une œuvre collective– voire prendre la forme familière d’un livre imprimé [12].

            - certains espaces numériques collectifs du type Wiki (Wikipédia, Wikisource,…), se présentent comme une maquette permanente, une sorte de périodique en écriture continue. A la différence du blog, chaque contribution vient amender l'ensemble sans pour autant prétendre lui donner sa forme achevée.

            - il existe bien entendu beaucoup d’autres formules intermédiaires, notamment des espaces partie figés, partie ouverts, où peuvent s’incrémenter les apports des internautes [13].

La multiplication de ces initiatives montre que si les contenus nourrissent, les formats structurent. Il faut admettre que ces espaces, sous l’infinité de leurs formes, se prêtent mal à une définition générique et relèvent plutôt de la simple description, tout au moins au stade où nous en sommes.

*

On s’est accoutumé depuis longtemps à la double nature du livre, objet matériel et œuvre incorporelle, sans éprouver dans la sémantique ou la pratique éditoriale le besoin de les distinguer. Le développement de la numérisation et les nouvelles perspectives d’exploitation qu’elle offre aux œuvres de l’esprit conduisent naturellement à revenir sur cette ambivalence et, à travers elle, à retrouver les analyses de ceux qui ont fondé l’économie de l’édition. C’est ce souci qui a guidé notre démarche.

Celle-ci est loin d’être achevée: outre qu’elle peut être amendée et affinée, reste à préciser la portée juridique des notions qu’elle s’est efforcée de cerner.

  Alain Pierrot / Jean Sarzana (mars-avril 2009)


[1] Emmanuel Kant, Qu’est-ce qu’un livre ? PUF / Quadrige 1995 (traduction Jocelyn Benoist) p. 123

[2] Ibidem, p. 131

[3] Un roman, un poème, un manuel scolaire, un livre pour enfants, une bande dessinée, un essai, une pièce de théâtre sont autant de «discours», au sens où l’emploie Kant.

[4] Autre exemple, tiré de la littérature: Le Petit Prince de Saint-Exupéry.

[5] Les Pensées, Bouvard et Pécuchet, L’Homme sans Qualités, les écrits de Pessoa...

[6] Exemple paradoxal d’un livre hors langage, sans titre et sans auteur : Le Code Voynich, publié en 2005 par Jean-Claude Gawsewitch.

[7] Echange de données informatisées.

[8] Il n’en a pas toujours été ainsi. Le codex se présente souvent comme la compilation sans cohérence de plusieurs ouvrages de genres différents, sans rien qui les lie, que leur reliure. La relation d’unicité entre livre, œuvre et auteur apparaît rarement avant le 15è siècle.

[9] Le codex existait bien avant la découverte de l’imprimerie. Celle-ci a donc beaucoup moins affecté la nature et la substance mêmes de l’œuvre que ne le fait aujourd’hui la numérisation.

[10]  Cette échelle a donné lieu lieu à une réflexion suivie au sein de la Société des Gens de Lettres.

[11]  Exemple des livres accessibles à travers Google Book Search.

[12] Cf www.l-autofictif.over-blog.com et L’autofictif, d’Eric Chevillard, chez L’Arbre Vengeur.

[13] Cf www.livresdesmorts.com (Le Livre des Morts, oeuvre poétique interactive de Xavier Malbreil présentée au Salon du livre 2008) ou encore http://futureofthebook.org.uk/blake/book.html (Songs of imagination and digitisation).

@ Copyright Alain Pierrot/ Jean Sarzana


Umberto Eco: le livre indépassable

Eco Surtout ne pas manquer l'interview de Umberto Eco dans Télérama de cette semaine. Quand on interroge un passionné des livres comme lui sur l'avenir des livres... "N'espérez pas vous débarrasser des livres. Avec cet avertissement en guise de titre à ses joyeux entretiens avec le scénariste Jean-Claude Carrière (éd. Grasset, sortie le 21 octobre), Umberto Eco nous prévient: ne comptez pas sur lui pour rejoindre le choeur des Cassandre qui annoncent régulièrement la disparition du livre ou de la lecture!" Joint une version ePub pour conserver dans son lecteur favori. Penser à archiver les trois versions: le journal papier, le lien web et le fichier. Laquelle pourra t'on relire en 2050?

I want you for the U.S. Army

Books wanted Le pocketbook est expérimenté à partir de 1935 en Grande-Bretagne avec les «Penguin Books», livres de poche à couverture brochée, vendus au prix concurrentiel de 6 pences. La formule est perfectionnée pendant la Seconde Guerre mondiale par les éditeurs américains afin de fournir de la distraction aux soldats en campagne. Avec une colle au dos très peu résistante, les GI's déchiraient les pages au fur et à mesure de la lecture... Nul doute qu'aujourd'hui, l'armée américaine ferait appel à Sony!
(photo sur Bibliophilie).

Musée de l'imprimerie à Tours

100_7252 Si vous avez l'occasion de venir sur Tours, ne manquez surtout pas, entre deux escapades sur les bords de Loire à la découverte de Balzac ou Léonard de Vinci de venir faire une visite à Muriel Méchin, un typographe passionné qui vient d'ouvrir un petit musée de l'imprimerie. Un agréable local situé dans une petite rue discrète derrière le théâtre. C'est là que Muriel a déployé sa collection de documents et de matériels qui retrace l'aventure de l'imprimerie. Impressionnant de voir réunies autant de pièces de la part d'un amateur éclairé. Gravures, papiers imprimés par ses soins, presses, caractères mobiles... Bref, un petit inventaire des arts et techniques du Livre. Je vous conseille aussi de vous procurer son livre "La Touraine typographique" (ISBN: 2-9531385-0-4) déjà sous sa deuxième édition, qu'il a complètement édité par ses soins et qui est remarquablement bien fait. Bien plus que la typographie en Touraine, c'est, en un peu moins de deux cents pages, un panorama complet de l'histoire des techniques avec des documents bien choisis. Maquette soignée, le résultat est digne d'un bon éditeur. Voir aussi l'article que lui a consacré La Nouvelle-République avec ses coordonnées. Le succès est au rendez-vous, le bouche à oreille fonctionne, son local s'agrandit même vers l'arrière du bâtiment dans quelques semaines. Un conseil, appelez-le avant de venir tant il est souvent parti à la recherche de nouvelles trouvailles!

PS: Attention: le musée de la typographie qui se trouvait auparavant au 13 rue des Cordeliers à Tours a été dans l'obligation de déménager suite à la vente des locaux et il est situé maintenant au 13 rue Albert Thomas, à proximité immédiate de la cathédrale Saint-Gatien, en face l'extrémité est de la rue Colbert.
En un mot à environ 200 mètres de son ancien emplacement.
L'entrée est gratuite, Muriel vous propose seulement mais sans aucune obligation d'acquérir pour une très modique somme ses créations ce qui lui permet d'honorer les charges afférentes au local.
Faites-lui une visite, vous n'en ressortirez pas déçus. (24/07/2011)


ONNI soit...

C'est la question provocante que pose François Bon avec la mise en ligne de cette oeuvre sur Tiers-Livre. Livre? Pas Livre? Une ONNI (oeuvre numérique non identifiée) en attendant les évolutions de nos pratiques de lectures et de nos mentalités! A mettre en relation, bien sûr, avec les entretiens de Roger Chartier.
PS: le débat est également sur Textes, LaFeuille et Amontour.


Qu'est-ce qu'un livre?

N49128714727_3331 A noter la parution cette semaine d'un nouveau numéro des "Cahiers de la Librairie", publié à l'initiative du Syndicat de la Librairie française, intitulé "Qu'est-ce qu'un livre?" avec la participation d'Olivier Carrérot, Roger Chartier, Milad Doueihi, Nicholas Carr, Marcel Gauchet, Eric Vigne, Olivier Bomsel, Bernard Lahire, Lionel Ruffel, Serge Regourd, Olivier Assayas, Laurent Mauvignier et Pierre Bergounioux. Un numéro sans aucun doute passionnant compte tenu de la qualité des intervenants. Courez vite chez vos libraires.
(une pensée pour Hélène Clémente et Sophie Saint-Marc)


Concours des plus beaux livres

Voici la liste des 25 ouvrages lauréats, toutes catégories confondues du Concours des plus beaux livres 2008. Nos amis allemands le faisaient depuis des années. Grâce à l'initiative de quelques-uns, c'est maintenant un événement qui commence à compter en France. En piste pour le concours international maintenant... Merci à ObjetsLivres et à Florence.
PS: à signaler aussi une sélection de bons livres de typographie, de graphisme et d'histoire du livre.


Un entretien avec Roger Chartier

Merci à Alain Pierrot, notre Saint-Veilleur à tous, de nous orienter vers l'entretien avec Roger Chartier: "Le livre, son passé, son avenir"  mis en ligne hier du côté de la vie des idées. Incontournable, forcément (version Sonyreader Chartier.pdf). A noter la présentation très complète dans toutes les versions, vidéo, texte, audio, papier, biblio, tout y est, un formidable exemple!


L'avenir est collectif

Bernard Strainchamps continue ses chroniques de lectures sur le Cybook et a eu la bonne idée de réaliser une interview de Stéphane Michalon à l'origine du projet "Service de Presse" chez Tite-Live (communiqué ici). (Via Textes)
Ils reviennent ensemble sur les enthousiastes et les sceptiques, le Guardian vient d'ailleurs d'ouvrir deux espaces pour chacuns d'entre eux... (via Actualitte). Débat très réducteur, comme si aimer les uns faisait haïr les autres... Comme si les bibliophiles ne lisaient jamais de livre de poche, les mêmes sceptiques qui en leur temps vilipendaient le livre de poche, les éditions de club, le livre à 10 francs... Seraient-ils prêts à les brûler, les livres électroniques, on va jusqu'à se demander... Se rappeler de Jean-Paul Sartre qui n'était aucunement choqué par le livre qu'on jette, car disait-il, le livre, contrairement aux autres objets de consommation, ne disparait pas du fait qu'on le détruit, puisqu'on s'est approprié son contenu. Ce même Jean-Paul Sartre, très grand lecteur, dont la cécité à la fin de sa vie ne lui permettait plus d'accéder à la lecture et qui aurait pu continuer à lire aujourd'hui avec ces bidules électroniques...
Plus prometteur, Stéphane revient sur l'adhésion des libraires et des éditeurs à l'opération: Actes Sud,  Allia, Belfond, Buchet-Chastel, Chambon, Christian Bourgois, Denoël, Flammarion, Florent Massot, Folies d'encre, Galaade, Gallimard, Gallmeister, La Différence, Les Allusifs, L'Olivier, Mercure de France, Métailié, Michalon, Noir sur Blanc, Phébus, Plon, POL, Presses de la cité, Robert Laffont, Le Rocher, Le Serpent à Plumes, Le Seuil, La Table ronde et Verticales. L'occasion pour vous, peut-être, d'interroger votre libraire préféré (qui a peut-être reçu un Cybook) et de lui demander ce qu'il en pense. Pour reprendre Stéphane: "En bref, cet avenir je le vois collectif, sinon je ne le vois pas."


Ergonomie des bidules

Merci à Alain d'avoir attiré mon attention sur ce nouveau concept de lecture présenté par Peter Brantley sur son blog. Il est initié par un groupe de travail de l'Université de Maryland. Cela vaut le coup d'oeil, on reste confondu devant le boulot accompli.
Néanmoins, je suis assez sceptique, avant que ma femme mette cela dans son sac et que cela fasse un article dans Elle! J'ai éclaté de rire quand j'ai vu les pages qui tournent quand on bouge le bidule! Les deux morceaux... Pourvu que Starck ne nous donne pas son avis la-dessus... Un truc à mettre dans un coin et à ressortir de temps en temps du côté de la paléontologie des bidules. Avec les mêmes questionnements que ceux de nos amis de Gutenberg, vous savez bien!


Prospectives du livre

Très intéressante interview sur l'avenir du livre de Francis Pisani dont le blog Transnets est une mine (mais vous le savez sans doute déjà). J'aime beaucoup cette notion d'écosystème/coexistence des médias sur laquelle il revient. A croiser avec l'article de Anthony Grafton dans le New Yorker (signalé par Olivier-Affordance) et l'excellent livre Où va le livre? dont j'avais parlé et que reprennent l'excellent BBF et l'Humanité qui met le doigt sur le terme de bibliodiversité... Vers un écosystème du livre et de l'écrit, c'est aussi le titre du hors-série de l'Aquitaine numérique (merci Alain), décidément... Bref, de quoi commencer la semaine en bonne intelligence, tout cela en attendant bien évidemment les podcasts de Roger Chartier au Collège de France... Au fait, ça vient quand? C'est si compliqué? On rêve de podcasts le jour même pour les pauvres "collégiens" non-parisiens que nous sommes!