Les écrivains et l'iPad
27 avril 2010
Un écrivain s'essaye à l'iPad! Après François Bon bien sûr, c'est Jean-Philippe Toussaint!
Un écrivain s'essaye à l'iPad! Après François Bon bien sûr, c'est Jean-Philippe Toussaint!
Claude Durand toujours qui revient, dans une interview qu'il a donné à Karl Zéro pour son dernier livre, sur la situation de beaucoup d'écrivains ayant publiés de nombreux livres et qui se retrouvent complètement "jetés comme des kleenex" du système éditorial français. Il envisage de nouvelles solutions orientées vers les nouvelles technologies pour "mettre en circulation" ces textes. Versions numériques, certes, mais on ne peut s'empêcher de penser également au cas de Marc-Edouard Nabe qui a pris son destin en main sur les versions papier. C'est vers la 6ème minute mais je vous conseille de regarder l'ensemble!
PS: à écouter aussi le podcast sur Europe1 avec Frédéric Taddéi.
Alors que beaucoup s'extasient sur la dernière version d'Alice aux Pays des Merveilles développé sur l'iPad (marketing oblige), lisez donc le billet du dernier des blogs aujourd'hui (merci Hubert). Cela relève en effet plus du jeu-interactif que du livre. Et il semblerait que l'on fasse peu de cas du droit moral de Lewis Caroll avec un texte réduit à 10% de l'original! Maheureusement pendant ce temps-là, on cherchera vainement une bonne version du texte français en version numérique chez les éditeurs (une excellente version anglaise sur Planetebook bien sûr).
"L'idée d'un contrat séparé ne sera pas acceptée par le groupe Média, son argument principal étant que livre papier et livre numérique sont une seule et même création, financée par l'éditeur. L'édition numérique et l'édition doivent absolument rester indissociables, pour Média.
Nous avons pour notre part rappelé que l’objectif du contrat séparé était la visibilité, la transparence des conditions de cession des droits numériques dans un acte séparé du contrat d’édition, ce qui peut en particulier permettre plus facilement des spécificités sur les modalités de cession, par exemple sur la durée.
Sur cette question de la durée: Média refuse de limiter l'étendue de la cession des droits, aux vues des sommes investies dans la création d'Iznéo, qui représentent un risque pour l'entrepreneur.
Nous avons pour notre part insisté sur le fait que limiter la durée de cession (par exemple à 3 ans, comme l'a proposé Jean Van Hamme lors d'une discussion sur ce sujet), avec «tacite reconduction» si les deux parties restent en bon terme, n'impliquait pas obligatoirement pour les auteurs le fait de quitter leur éditeur à l'issue de cette période, comme Média semblait le penser, mais permettait surtout de laisser aux auteurs une « porte de sortie », en cas de réelle mésentente (une sorte de clause permettant le divorce dans un contrat de mariage). Sans cette durée limitée sur le numérique, un livre sera lié à son éditeur pour la durée de la vie de l'auteur plus 70 ans, et ce sans possibilité de divorce, et surtout sans que l'éditeur s'engage à aucun devoir explicite en contrepartie, alors qu'actuellement, lorsque nous cédons nos droits pour le livre «papier», la durée de cession que nous accordons se fait précisément en échange d'un certain nombre de devoirs imposés à l'éditeur (dont le devoir d'exploiter l'oeuvre). Sur le net, quels seront les nouveaux «devoirs» de l'éditeur, justifiant une cession à vie?
Au sujet de ce devoir d'exploitation, au passage, Claude de Saint Vincent a reconnu être d'accord pour dire que l'exploitation du livre papier et celle du livre numérique devraient effectivement être distinguées (de manière à éviter que la seule mise en ligne d'un livre suffise à parler de «juste exploitation de l'oeuvre par l'éditeur»). De même, il a été envisagé au cours de l'entretien que les recettes du numériques ne servent pas à rembourser l'à-valoir de la création du livre papier.
Concernant l'accord de l'auteur pour l'adaptation de son oeuvre: la position officielle de Média est de dire que puisque la mise en ligne des pages est semblable à une publication papier (dans le cas de la mise en ligne page par page sur Iznéo), et qu'il n'y a donc pas d'adaptation, il n'est pas réellement nécessaire de demander l'accord de l'auteur, du strict point de vue du droit moral.
Nous avons demandé à préciser ce point, car il nous semblait totalement différent de ce qui nous avait été présenté par les responsables de Dargaud, qui assurent demander l'accord de tous les auteurs avant une éventuelle mise en ligne. Ce à quoi Claude de Saint Vincent nous a répondu que s'il était certes important de travailler en bonne entente avec les auteurs, il ne serait pas possible de demander leur avis à chacun d'entre eux, d'autant qu'il ne s'agissait pas ici de droit moral, puisque selon lui (une fois encore) «l'oeuvre papier est semblable à l'oeuvre numérique». Il a clairement ajouté que si l'avis d'auteurs connus serait à priori systématiquement demandé, il n'en serait pas de même pour des auteurs débutants (de la même manière que pour n'importe quel contrat, plus on est reconnu, plus on peut négocier avec son éditeur).
Il nous a pourtant semblé qu'il y avait là une réelle ambiguïté, puisque sont liées par une même clause sur le numérique des oeuvres dites «non adaptée» (diffusées sur Iznéo, page par page) et celles qui seront «clairement adaptées» pour de nouveaux médias tels que le I-Phone (nécessitant un re-découpage complet, voire l'ajout de musique). Ambiguïté qui touche entre autres aux modèles économiques potentiellement différents qui en découleront et nous paraît une fois de plus aller dans le sens de la création d'un contrat séparé.
La rémunération: il s'agissait bien entendu d'un point essentiel de notre discussion, mais aussi d'un point évident de désaccord.
Là encore, contrairement à ce que nous avions cru comprendre lors de nos discussions avec les responsables de Dargaud, c'est bien l'idée du «livre papier semblable au livre numérique» qui servira de mètre-étalon chez les différents éditeurs du Groupe Média Participations ainsi que chez les éditeurs extérieurs travaillant avec Iznéo.
A ce titre, Claude de Saint Vincent nous a expliqué que la clause sur les droits dérivés des contrats actuels de Dargaud faisait clairement figure d'exception et devrait donc disparaître d'ici la fin de l'année, faisant place aux pourcentages classiques de rémunération du livre papier (à savoir 8% en moyenne, sans que l'on sache du tout si des paliers à 10 et 12% seraient un jour envisagés et selon quelles modalités).
Nous n'avons pas cachés être plus que désagréablement surpris par cette précision, qui fera à terme passer l'offre actuelle de Dargaud de 17,5% à 8% de droits d'auteurs sur le prix de vente. Un saut énorme, qui nous rend d'autant plus dubitatif sur la manière dont cette clé de répartition est fixée.
Nous avons donc redit notre anxiété par rapport à un modèle économique restant à ce point flou, et avons demandé à Claude de Saint Vincent de répondre si oui ou non, il accepterait de participer (en tant que représentant du groupe Média) à une réelle concertation réunissant d'autres éditeurs ainsi que des représentants des auteurs. Il nous clairement dit ne pas voir l’intérêt de perdre du temps avec une telle discussion, selon lui vouée à l'échec du fait même des différences d'opinion des différents éditeurs voire des auteurs eux même.
Pour autant, nous avons réaffirmé notre souhait de rendre cette discussion possible, et qui plus est sous l'égide du Ministère de la Culture, dont l'intervention nous semble plus que jamais nécessaire pour éviter que ces points de négociation se fassent désormais au cas par cas, auteur par auteur, et non pour l'ensemble de la profession."
3000 livres vendus en trois mois! Décidément, l'aventure d'anti-édition inaugurée par Marc-Edouard Nabe n'en finit pas d'étonner. Il s'apprête à procéder à un troisième tirage! Les livres sont lus, le buzz se répand sur la toile, y compris maintenant dans les médias traditionnels. Ce qui était vu par certains comme une tentative solitaire et désespérée d'un écrivain "has been" est en train au fil des semaines de s'inscrire comme un véritable phénomène littéraire. Dans le dossier que lui consacre cette semaine Chronic'Art, j'ai relevé l'excellent article de Ludovic Barbiéri "Edition sur Internet: le mur de verre?", je cite certains passages: "Mine de rien, et quoi qu'on pense de son livre, le cas Marc-Edouard Nabe marque une date dans l'histoire -encore embryonnaire- de l'édition sur internet, et plus généralement des rapports entre le réseau et l'édition traditionnelle. En gros, jusqu'ici, il y avait une barrière infranchissable entre le Web et les structures que l'on connait. D'un côté les maisons classiques, la presse généraliste et littéraire, les libraires, bref, le circuit habituel; de l'autre, une galaxie souterraine de blogs, de réseaux et de mini-maisons inconnues, à quoi la presse ne s'intéresse jamais et qui faute de relais, fonctionne en circuits fermés... Avec son site de vente directe en forme de pied-de-nez mi-malin mi-mesquin et de dernière provocation, le vibrionnant Marc-Edouard Nabe est donc l'un des premiers à franchir le mur de verre. Expérience pionnière ou exception? Pour le moment, exception, colonel. A suivre." L'intérêt du contact direct avec ses lecteurs, c'est aussi que l'on peut les inviter directement pour fêter cela... Marc-Edouard Nabe, plus "grand seigneur" que jamais! Jusqu'où s'arrêtera t-il? J'avoue que je ne me lancerais pas dans un pronostic...
PS: à signaler également un billet très juste sur la Revue des Ressources/ voir également le compte-rendu de cette soirée avec les 300 lecteurs présents sur Marianne et la vidéo (19/04/2010).
"Un clip qui donne des sueurs froides à tous les acteurs du livre. Chez aucun éditeur, dans aucune librairie..." C'est le démarrage du long article de Bruno Abescat dans l'Express de cette semaine "Livre, révolution à l'oeuvre" qui revient sur la nouvelle donne des cartes dans le paysage éditorial français sur fond de la dégradation de la rentabilité du secteur (-0,9% en 2008 selon KPMG). Une bonne introduction avant la grand messe du Salon du Livre la semaine prochaine. Les deux grands absents de ce Salon seront Hachette Livre (qui affiche un insolent résultat opérationnel en hausse de 23,8%) et... Marc-Edouard Nabe qui vient, aux dernières nouvelles, de réimprimer son livre à 3000 exemplaires et les ventes vont bon train... Et si Nabe avait "tout faux"?, c'est la conclusion de l'article...
PS: j'ai eu l'occasion ce week-end de voir la réimpression du livre: les petites réserves que j'avais faites sont levées, papier de couverture plus épais et pelliculage mat, résultat impeccable...
A signaler un collectif d'auteurs de bandes dessinées "Les Autres gens" qui se regroupent pour vous proposer des petits feuilletons numériques au quotidien sur ordinateur ou smartphone, sous forme d'abonnement de 3 à 5 euros (via LivresHebdo).
Une interview de François Bon proposée par la Librairie Pantoute au Québec (via Tiers-Livre).
Passionnante présentation de l'écrivain de science-fiction canadien Robert J. Sawyer qui revient sur neuf années de lectures numériques en nous faisant partager sa "bibliothèque" personnelle de livres électroniques. Un voyage pour découvrir la courte histoire de la lecture numérique en mobilité!
Smartnovel, Leezam, autant de jeunes maisons d'éditions qui se lancent dans des propositions de micro-lectures sur nos smartphones. Les lecteurs vont-ils privilégier ces micro-lectures de feuilletons à la place d'une lecture d'un roman complet? Frontière floue avec une communication marketing d'autres éditeurs et les premiers chapitres gratuits (voire les livres entiers), trop petits prix, lassitude de ce modèle pour les auteurs. Est-ce que ces modèles sont vraiment pérennes? "Des auteurs s’essoufflent, d’autres se découragent, le mode feuilleton est difficile à garder pour nos pionniers. Qu’à cela ne tienne, virage à 180 degrés, nous demandons désormais à nos créateurs des livres terminés, gros, petits, qu’importe! Une seule règle, ils doivent être complets…". C'est le constat que fait la jeune maison québecoise Robert ne veut pas lire qui est en train de revoir complètement sa stratégie éditoriale. On va suivre Robert. A signaler aussi l'expérience de William Réjault, journaliste et auteur de plusieurs livres chez J'ai Lu et Plon, qui avance dans une nouvelle histoire "Le Chemin qui menait vers vous" au rythme de son imagination et des lecteurs (via Numerikbook).
Quel livre! J'ai découvert hier soir le colis avec le nouveau livre de Marc-Edouard Nabe "L'Homme qui arrêta d'écrire". Emballage carton irréprochable, sous thermo, le bébé est impressionnant, 800g. Celui-là, c'est pas un prématuré, il aurait même sérieusement dépassé le terme! Un livre magnifiquement réalisé qui ferait rougir pas mal d'éditeurs. Un format 13,8 x 20cm, 696 pages sur un beau papier bouffant légèrement ivoiré (Munken Print crème 80g avec une main de 1.8), broché cousu. La seule petite réserve en ce qui concerne la couverture, j'aurais personnellement opté pour un grammage un peu plus fort et un pelliculage mat plutôt qu'un vernis en ligne. Mais c'est un point de détail. Vous chercherez vainement les métadonnées (un numéro ISBN car c'est un livre, un auteur, un titre, une date), pas de mention d'éditeur (il n'y en a pas, d'éditeur), pas de code barre (uniquement vendu par internet), pas de 4ème, pas de photo, rien sur le dos, le n°28 au verso de l'ouvrage signale sobrement qu'il s'agit du 28ème livre de l'auteur. Plus simple y a pas. Un compositeur, une correctrice, un graphiste pour la couverture, un papetier, un imprimeur, un site internet, un distributeur pour préparer l'envoi, vous l'avez entre les mains. Choix de mise en page et composition typographique remarquables. 33 lignes par page, Garamond 11,5 (ligaturé s'il vous plait). Les puristes apprécieront (tout sur la physiologie du Garamond chez Peter Gabor), les autres aussi même s'ils ne savent pas pourquoi... Si tous les auteurs se mettent à faire des livres de cette qualité en direct, avec un tel respect du lecteur... Tirage à 1000 exemplaires (ils sont partis), la réimpression en cours, disponible uniquement sur le site de l'auteur. Un seul premier mot, bravo Marc-Edouard Nabe. Le beau bébé joufflu trône déjà sur ma table de chevet. Allez, souhaitez-moi une bonne lecture!
PS: Excellent livre que j'ai dévoré en huit jours. 700 pages bien tassées et pourtant on voit pas le temps passer. Sevré d'écriture (on ne le reprendra plus), l'auteur déambule dans Paris pendant une semaine dans les milieux "culturels". Journalisme, édition, mode, télévision, art contemporain, web... Tout ce joli monde vue à travers la lorgnette de Nabe. Chacun pris aux pièges de ses petites médiocrités quotidiennes. Personne n'échappe au jeu de massacre, comme d'habitude tout est vrai, un livre qui n'aurait jamais pu être publié chez aucun éditeur en l'état. Vous pensez, une coupe par pages, combien de nègres pour le livre noir de Nabe? En ces temps de virtuel généralisé, c'est un monde en contraire surréalisé (le terme est de Delfeil de Ton dans le Nouvel Obs) qui nous est donné. C'est très drôle, les références littéraires sont nombreuses comme d'habitude chez Nabe (Joyce, Dante, Céline...). On retrouve avec bonheur le Nabe du Journal ou du Bonheur justement, qui sème ses farces et attrapes, ses espiègleries. Des scènes d'anthologie comme celles entre autres au Palais de Tokyo, du journal unique pour la presse ou avec Julien Doré, Alain Delon... On citerait tout, comme dans le cochon, tout est bon (sauf peut-être avec les passages du Libre Penseur qui nous bassinent un peu, mais c'est sans doute exprès). Une fois refermé, on a envie de remettre le couvert une nouvelle fois. A laisser décanter et à reprendre dans quelques temps. Bref une semaine de lecture jubilatoire comme on n'a rarement l'occasion d'en faire. Mille lecteurs, Nabe? C'est clair qu'avec ce livre, il met dans le mille. Qu'on se le dise, Marc-Edouard Nabe est de retour, et quel retour... (01/03/2010)
PS: pour la réimpression, grammage de la couverture et pelliculage mat ont été rectifiés, résultat impeccable, chapeau Monsieur Nabe! (17/04/2010)
Une entreprise qui est bien connue maintenant -surtout chez nos voisins du Nord- dans le domaine de l'impression à la demande (Print on Demand), c'est UniBook. Elle-même une division de Peleman Industries NV, entreprise privée qui produit des matériels de reliure de livres et de documents au coeur des problématiques techniques de ce secteur en pleine expansion. En activité depuis 1939, son quartier général mondial est installé à Puurs (Belgique) avec des bureaux aux USA, à Chypre, au Japon, en Pologne, Chine, Allemagne, Espagne, Italie et Portugal. Leurs produits sont vendus via des distributeurs dans plus de 110 pays. Une vidéo en ligne qui montre que derrière l'impression à la demande, c'est aussi des personnes qui travaillent au quotidien.