281 notes dans la catégorie "Livres"

Chroniques de lecture - 31

ChroniqueAmusante coincidence ce matin de trouver dans ma boite mail la chronique de Thierry sur le livre que j'ai chroniqué hier. Nous ne nous étions pas passé le mot!

"Mémoires d'un vieux con", Roland Topor, Editions Wombat.

Comment? Vous ne le saviez pas?
Oui c’est Topor qui a inventé le dadaïsme, le surréalisme et le cubisme. Le ponctualisme et le glissisme? C’est lui aussi. Entre autres «isme»!
Comment? Vous n’avez jamais su?
Oui c’est Topor qui a trouvé le titre d’un roman d’Ernest Hemingway, «Pour qui sonne le glas.».
Comment? Vous n’avez jamais entendu parler de ça?
Oui c’est bien Topor qui a écrit le célèbre et sulfureux roman «Histoire d’O» et pas Pauline Réage.
Comment? Vous étiez persuadé que c’était Breton qui avait écrit le Manifeste du Surréalisme?
Memoires-vieux-con-Topor-200x300Ben non figurez-vous, c’est Topor.
Comment? Vous n’étiez pas au courant?
Le fameux train de Trotski était exclusivement réservé à Topor pour qu’il voyage dans la nouvelle Union Soviétique.
On ne vous dit pas tout!
Vous ne me croyez pas?
Pas la peine d’aller vous précipiter sur votre encyclopédie Universalis ou sur votre Wikipédia adoré. Ils vous mentent!
Lisez les mémoires de Roland Topor, vous allez vous en frotter les yeux d’émerveillement. La vie de Topor c’est la piste aux étoiles.
C’est un hymne à la vie. C’est une franche rigolade, camarade. C’est toute une histoire de l’art «décontenue».
Topor n’est pas un vieux con. Il a de la mémoire lui! Il a tout vu, tout connu. Pourtant Topor reste encore aujourd’hui ni vu ni connu alors si ça vous dit de vivre à la Topor, n’hésitez pas un seul instant, lisez ses mémoires du XXème siècle. De Freud à Trotski, de Picasso à Malraux, de Braque à Giraudoux, de Chagall à Cocteau, de Sartre à Camus, il les a tous connus!
"Je les ai connus, tous! Et ceux que je n'ai pas rencontrés en chair et en os, je les ai vus à la télévision. C'est moi qui leur ai donné leurs meilleures idées..." dit-il.
Vous verrez, ce Topor là sera vraiment, très, très généreux avec vous... pour ma part il ne le sera jamais trop!
Topor reviens... ils sont tous devenus fous les artistes!!!!

T.C.

Lu dans le cadre du Club des Livres Numériques.

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Mémoires d'un vieux con, Roland Topor

Memoires-vieux-con-Topor-200x300Belle initiative des Editions Wombat qui ont la bonne idée en cette rentrée de rééditer Roland Topor et notamment ses "Mémoires d'un vieux con", petite perle d'humour noir paru en 1975. La pseudo autobiographie d'un artiste qui a traversé tout le XXème siècle, qui a tout vu, tout connu, tout inventé. Au début, on ne sait pas trop si c'est du lard ou du cochon, on recherche de quel artiste il peut bien s'agir, Topor lui-même? Roland Topor, ce touche à tout génial, illustrateur, peintre, écrivain, poète, metteur en scène et j'en passe. Et puis au bout de quelques dizaines de pages, on est entraîné dans une pure folie burlesque. Tout défile, toute l'avant-garde artistique des années 1900/1920 dans le Paris bohème y passe, que le "jeune con" partage au quotidien, conseille, met sur la voie, puis est finalement pompé complètement, point d'orgue le maître Picasso qui plagit ses toiles à tour de bras:

"Picasso tint à m’accompagner. Il voulait tout connaître de moi et de mon passé. Savoir comment je travaillais, quelles influences j’avais subies, ainsi qu’une foule d’autres choses. Le Catalan était armé d’un revolver, don de Jarry, et, par jeu, il le pointait sur ma nuque. Comme nous étions arrivés devant ma porte, je lui proposai de monter prendre un dernier verre. Il accepta. Je lui montrai "Les Demoiselles d’Orange" que j’avais renoncé à emporter en raison de leur taille. Il parut bouleversé. Je ressentis un petit pincement au cœur, quelques jours plus tard, en découvrant dans son atelier Les Demoiselles d’Avignon. Il eut beau m’assurer que son tableau n’avait aucun rapport avec la Provence et que le titre faisait simplement allusion à une maison close de Barcelone, je ne fus pas dupe. Pour être tout à fait franc, je dus me mettre au lit pour une quinzaine."

Topor1Et ça continue, Proust qui a une révélation subite lorsqu’il l’entend évoquer "les meilleures madeleine de Paris qui se trouvent dans une patisserie Place de la Madeleine", Charlie Chaplin qui lui doit l'idée de la Ruée vers l'Or, Lénine qui lui propose de rester en URSS pour prendre la main des Beaux-Arts. L'évocation hilarante de sa rencontre avec le pétomane Staline et l'anecdote suivante:

"Staline adorait le haricot d’astrakan mais sa femme refusait de lui en préparer, car ce plat lourd à digérer le faisait péter. Pourtant, un jour, sur la place Rouge, Staline rencontre Malenkov et ils vont déjeuner au restaurant. Il y a du haricot d’astrakan. Staline en prend. Bien entendu, il pète toute la journée et le soir rentre chez lui assez inquiet. Sur le seuil, sa femme l’attend. «Chéri, dit-elle, je t’ai préparé une surprise.» Elle lui bande les yeux et le conduit à sa place devant la table dans la salle à manger. Puis elle court à la cuisine. Profitant de sa solitude provisoire, Staline évacue ses gaz, défait son pantalon, fait circuler l’air vicié qui l’environne, puis, au bruit de sa femme qui revient, se reculotte rapidement. Elle lui retire alors le bandeau des yeux en disant: «Regarde chéri, j’ai invité tous tes amis du Soviet suprême pour ton anniversaire!» –Et c’était vrai! ajoutait Youri, cramoisi. Ils étaient tous là, muets comme des carpes! Staline ne savait plus où se mettre!"

Il petit-déjeune avec Kafka, croise Freud dans sa clinique, est invité par Al Capone qui lui propose 10.000 dollars pour réaliser une fresque à sa gloire et qu'il envoie aux fraises:

"–Vous avez de la chance que je sois italien, fit-il enfin d’une voix sourde. En Italie, on a le culte de la beauté. J’épargne l’artiste que vous êtes, mais je ne veux plus vous retrouver sur mon chemin! Adieu."

Dadaisme, surréalisme, cubisme, tous les "ismes", tous les mouvements artistiques, il a tout finalement inventé, jusqu'au musiciens de jazz qui lui doivent la découverte des bienfaits de la drogue:

"Outre Marcel Duchamp avec lequel je jouais aux échecs, je m’étais fait de nombreux amis parmi les musiciens de jazz, car je n’étais pas conformiste. Je fus, d’ailleurs bien involontairement, à l’origine d’une funeste habitude qui se propagea rapidement dans les milieux du jazz. Jacques Vaché m’avait envoyé un paquet de tabac gris pour mon anniversaire, et j’avais cru qu’il s’agissait d’une citation tirée de ma période cubiste. Comme beaucoup de musiciens roulaient eux-mêmes leurs cigarettes, je fis cadeau du tabac à un joueur de clarinette. J’ignorais que ce farceur de Vaché avait mélangé de l’opium au gris. Mon joueur de clarinette découvrit les bienfaits de la drogue. Il prétendit que l’effet du stupéfiant avait été bénéfique à son art; dès lors, ses camarades ne tardèrent pas à faire régulièrement usage de marijuana. Je déplore le rôle que me fit jouer, à mon corps défendant, Jacques Vaché, mais je ne puis lui en vouloir."

Tout le XXème siècle est convoqué dans les pages, on citerait à l'avenant d'autres passages complets. On finit par avoir un certain vertige. Sa rencontre avec Hitler est un pur petit chef-d'oeuvre d'humour noir que je vous laisse le soin de découvrir.

Ce livre, publié en 1975, deux années seulement après la mort de Picasso qui traverse le livre au propre comme au figuré. On imagine le pavé dans la mare dans le concert ambiant de l'époque.

Bref, je me suis bien marré, un livre décapant qui fait un bien fou. C'est clair, qu'après cela, vous ne lirez plus une autobiographie de la même façon! Il nous manque ce Topor!

La version numérique est à 9,99€ dans les bonnes librairies, à ce prix-là c'est cadeau, et sans DRM, s'il vous plait! Sans rire, vous voyez Topor avec des DRM!!

Lu sur un PocketBook 603 dans le cadre du Club des Lecteurs Numériques.

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Chroniques de lecture - 30

ChroniquePetite chronique ce dimanche de notre ami Thierry, la trentième de la série:

Les autos tamponneuses de Stéphane Hoffman, Editions Albin Michel.
lu en partenariat avec la Librairie Dialogues dans le cadre de lectures croisées et pour le club des lecteurs numériques.

Stéphane Hoffmann est un écrivain français né le 6 mars 1958 à Saint-Nazaire. Il obtient le prix Nimier en 1991 pour son roman «Château Bougon».

Stephane hoffmannPourtant tout avait bien commencé. D’entrée l’auteur frappait fort. Avec une sentence bien ficelée. Le mariage comparé à un tour d’autos tamponneuses. «C’est inconfortable, on prend des coups, on en donne, on tourne en rond, on ne va nulle part mais, au moins, on n’est pas seul.» D’où le titre du roman. Plus imagé... y’a pas! Bien entendu, on n’est pas obligé d’être d’accord mais force est de reconnaître que c’est bien tourné.
Alors voilà. C’est l’histoire de Pierre, marié donc, avec Hélène. Ca se passe en Bretagne, dans le golfe du Morbihan pour être exact. Pierre veut prendre sa retraite mais Hélène, sa femme donc, qui aime son homme quand il est absent, ne veut pas d’un mari qui traîne dans ses pattes à ne rien faire. Ils ne peuvent pas se supporter, ils sont riches, «arrivés» comme on dit et ne fréquentent que leurs semblables: ceux qui sont riches, arrivés et qui ne peuvent pas se supporter. L’auteur surfe sur la petite vague facile du cynisme à la mode de chez nous aujourd’hui: sa plume se veut acerbe, impitoyable, corrosive, désenchantée... que sais-je et que dira-t-on partout dans la presse qui «chouchoute" ce livre. Pas de quoi faire une tempête!
Ces vies ennuyeuses de bourgeois de province à la Chabrol finissent par ennuyer le «pôvre" lecteur!
Surtout quand il tombe sur des phrases de cet acabit: «Jolie femme, certes, appétissante pour qui aime le colossal, mais il semble qu’elle ait de la merde à la place du cerveau: quand elle a parlé, on dirait qu’elle a pété." Hum... hum!
Allons, pour les études de mœurs, retournons, en calèche, voir ce cher Balzac!

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Le Bois des Hommes, Fabrice Loi

Loi-bois-hommes Décidément, je touche du bois en cette rentrée, c'est le cas de le dire, avec encore un autre très bon livre. Rarement rentrée littéraire ne m'aura donnée autant de bonnes surprises. Ce livre c'est "Le Bois des Hommes" de Fabrice Loi qui parait aux Editions Yago. Après Lyon et Alexis Jenni, direction Marseille. Un premier roman d'un auteur marseillais de 31 ans, photographe et saxophoniste (s'il excelle dans l'un et l'autre de la même manière, cela promet) avec comme thème l'errance, l'itinéraire d'un homme, ouvrier au travail aujourd'hui dans une société libérale qui ne cherche qu'à l'exploiter, le broyer.

Ivan, le héros et pour partie narrateur, désire comme beaucoup échapper à sa condition. Tour à tour prof, éducateur, veilleur de nuit, il choisit de devenir charpentier entre ciel et terre, pour mieux s'envoler, se désencager, lui semble t-il, retrouver aussi ce bois, matière des hommes depuis la nuit des temps. D'abord il intègre l’intérim et ses règles esclavagistes dans le Paris des chantiers soumis aux multinationales, en haut des échafaudages. Des conditions barbares, féroces qui exploitent de manière éhontée la misère humaine, des rencontres avec les sans-papiers, les exilés d'Europe de l'Est, du Portugal, d'Afrique, tous avec des destins quasi-identiques. Il s'enfuit vers d'autres destinations, Marseille, l'Espagne, Bamako, sans vraiment de but, sauf celui de se perdre un peu plus. Au Mali donc, il s’engage sur un chantier exploité par les Chinois, les nouveaux seigneurs/saigneurs de l’Afrique qui remplacent les anciens colonisateurs avec des méthodes qui n'ont pas du tout changées. La colonisation de l'ombre, hors des manuels d'histoire. Il retrouve partout les mêmes règles qui s'appliquent de part et d'autre de la planète, la pauvreté, la soumission imposée aux sans-grades. Avec des peurs journalières pour ne pas mourir, le danger toujours présent, pour ne pas subir l'amputation ou pire. Allers et retours constants dans le récit entre Paris, Afrique et la Galice où le héros se ressource avant de reprendre son périple. Les pages sur cette Galice au milieu du livre, avec notre héros en quête de son propre graal, avec la description des paysages océaniques et la sortie en mer à photographier des pêcheurs au travail, sont absolument magnifiques.

Un premier roman puissant, épris d'humanité, très bien construit avec un style excellent, une dimension politique, mais aussi la trajectoire personnelle d’un homme à la recherche d’amour et refusant l’injustice. Un homme en quête de sa propre liberté. Vraiment un livre qui plante son auteur dans le paysage littéraire, il faudra compter sur Fabrice Loi. Merci à mon ami Olivier de m'avoir alerter sur ce livre, en bon marseillais qu'il est!

A signaler particulièrement l'initiative des Editions Yago qui proposent ce livre dans sa version numérique sans DRM et avec une réduction de plus de 40% soit 10,99€. Pas commun! Voir par exemple chez ePagine. Bref, ne pas hésiter, dans toutes les bonnes bibliothèques!

Lu sur mon Nook dans le cadre du Club des Lecteurs Numériques. La version ePub est très bien faite.

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Chroniques de lecture - 28

Chronique Notre ami Thierry, décidément prolixe en cette rentrée!


«Ballast» de Jean-Jacques Bonvin

(Editions Allia, Edition epub, 2,99€, sans DRM, Septembre 2011)

Petite précision ferroviaire: «le ballast est le lit de pierres ou de graviers sur lequel repose une voie de chemin de fer».
Instructive et poétique définition du dictionnaire d’où émergent joliment des mots qui en disent long: «lit de pierres» et «repose».

Où repose-t-elle à présent la bande des quatre bohémiens?
Les cheminots Jack Kerouac, Allen Ginsberg, William S. Burroughs et Neal Cassady.
Sur un lit de pierres? De poussière? Le long d’une voie de chemin de fer? D’une voie lactée?
La Beat Generation, le road-movie, l’écriture spontanée, la drogue, l’alcool, les grands espaces américains, le jazz, la révolte contre l’argent et la violence... La vie à outrance, à toute allure, pied au plancher de la machine à écrire. L’outrance du trop: trop vite, trop fort, trop d’expédients... tous finiront mal... trop tôt!


Book_541_image_cover Avec une ardeur communicative, Jean-Jacques Bonvin, ressucite, évoque, invoque ces écrivains des années cinquante qui couvent dans leurs mots et sous leurs pas les hippies, Woodstock et le psychédélisme.
L’auteur s’attache à Neal Cassady. Neal Cassady c’est le Dean Moriarty du livre de Kerouac, «Sur la route», la «bible» de tous les routards.
Neal Cassady élevé par un père alcoolique dans une sorte de cabane tordue à la Van Gogh va vite devenir un enfant terrible: vols de voitures, maisons de correction, prisons.
«Né sur la route dans une bagnole alors que ses parents traversaient Salt Lake City en 1926 pour gagner Los Angeles » écrit Kerouac.
A sa sortie de prison, il épouse LuAnne et veut apprendre la philosophie auprès de Ginsberg. C’est là qu’il va rencontrer Kerouac.
Cassady est un dur, une teigne. Collectionneur de voitures volées et de maîtresses, les deux intellectuels sont sous le charme.
Ensemble ils vont tailler la route...
Cassady, plus loin, épouse Carolyn Robinson et semble «rangé des voitures». Puis re-route, re-mariage, re-route, etc.
La vie brûlée par les deux bouts.
Pas de la petite chandelle vacillante... mais de l’explosif!
Avant de mourir de froid le long d’une voie ferrée, il fait connaissance avec un certain Bukowski! Comme les Etats-Unis sont petits!
Ce récit «hallucinant», au tempo emportant de Bonvin rend un hommage amoureux à ce diable de Cassady aux fourmis dans les jambes. L’entraînante écriture de Bonvin sur une version epub impeccable devrait combler les lecteurs.
Encore une belle découverte!
A lire à la belle étoile... en écoutant du bop!

PS: pour la nuit à la belle étoile sans pleine lune se munir de la petite lampe spécialement conçue pour les liseuses électroniques... cela va de soi!

«... les hommes en imperméable au petit matin, ceux du fisc un peu comptables, un peu flics, trop de femmes, trop peu de temps, les voitures qui versent et ce qu’il ne dit pas et qui le tuera, la benzédrine qui le conduira le long du ballast dans le petit matin mexicain.» écrit Bonvin.

T.C.

Livre lu au format epub sur un Opus de Booken dans le cadre du Club des lectures numériques.

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Repas de morts, Dimitri Bortnikov

Book_540_image_cover Je vous avais parlé l'année dernière de Dimitri Bortnikov, un auteur d'origine russe vivant en France, avec un très bon livre "Le Syndrôme de Fritz", dans une excellente traduction. La bonne surprise de cette rentrée littéraire, c'est qu'il nous revient avec un nouveau livre "Repas de morts" aux Editions Allia; mais cette fois-ci, ce n'est plus une traduction, puisque ce livre a été écrit directement dans notre langue. J'étais très impatient de le retrouver. C'est fait, une véritable réussite, encore une fois au rendez-vous. Une lecture qui vous empoigne de la première à la dernière phrase. Dim (l'auteur?), un émigré russe, passe en revue ses souvenirs et les personnages qui les hantent (père, mère, grands-parents, voisins, etc.), la mort rôde dans un constant aller et retour entre Russie et France. Les démons, plus que les fantômes, sont à fleur de peau et hantent le personnage, nous sommes presque à basculer tout à coup avec lui dans la folie. Sombre, c'est sûr, une atmosphère et des décors qui pourront rebuter certains, mais à chaque fois, une lueur d'espoir qui nous fait reprendre notre souffle, espérer à nouveau à un salut, une rédemption.

"Elle retape mon "Bal des revenants". Clara... Il y a des nuits, elle n'en peut plus... "Mais Dim. Pourquoi tout ça. Dis-moi. Ce noir, ces chagrins. tes pages sont noires. C'est noir. Tous ces morts. Comment vivre tout ça. Et toi-même. Comment. Vivre avec toi. Ta pauvre femme..."

Oui Clara... Oui. Suis lourd comme cent bidets, mes extases sont jalouses, lourdes, suis un bidet bouché en extase. Être léger. Quand on peut plus... Quand on peut plus vraiment -on devient soi-même. Clara. Me prends pas pour un des chevaux de l'Apocalypse. Ne suis qu'un âne, l'âne lourd lourd qui n'a pas chié des siècles. Suis vivant. Je sens que je deviens une ombre... A petit pas. Moi, toi, toute cette armée de gens... A petite cuillerée... On devient des ombres. Sentir ça Clara, chaque respiration, chaque feu d'orgasme même quand l'oeil du vivant se ferme et on jouit jouit...

Je dicte. Elle me regarde... Puis se lance les yeux vides. Clara est pudique. Elle entrebâille son coeur puis - le ferme claquant." (page 121)

Un style direct, franc, court, qui sonne à chaque fois tout à fait juste, les phrases frappants comme des coups de masse. Je trouve sidérant comment l'auteur a pu s'approprier notre langue de la sorte, en réinventant sa propre écriture, passant d'une langue à l'autre avec la même facilité, la même réussite. Cela interpelle longtemps après la lecture. Un ouvrage qui a été remarqué par plusieurs critiques, Fluctuat, Télérama, Lire, et d'autres encore. Vraiment, un très bon livre de cette rentrée que je vous conseille. Après le livre de Jenni, je touche du bois! A signaler une version numérique de grande qualité conforme à la présentation du livre, un effort à saluer particulièrement en ces temps de "vol organisé" sur le numérique français. Vous pourrez la retrouver dans l'ensemble des bonnes librairies numériques. Prix à 50% de la version imprimée (soit 4,50€) sans DRM, Allia est décidément dans le juste, avec en plus des livres imprimés de qualité à prix très doux. Franchement à ces prix-là, découvrir Dimitri Bortnikov, vite!

Livre lu sur un NookTouch dans le cadre du Club des Lecteurs Numériques. Excellente version numérique. Je remercie particulièrement Harmonia Mundi et les Editions Allia de nous témoigner de leur confiance.

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Les livres dans l'univers numérique

A écouter cette interview de Christian Robin qui publie un ouvrage intitulé "Les livres dans l'univers numérique" aux Editions de La Documentation Française. Aucun mot sur le web, ni sur la librairie, curieux quand même... (sur Les EchosTv). Merci à Livre au Centre.

Jpeg

PS: je joint le communiqué de presse, labellisé "République Française", diable! A signaler que le livre existe en version numérique au seul format PDF, autres temps... Le livre numérique existe déjà depuis quinze ans? Allez, messieurs les éditeurs, arrêtez de nous cacher vos catalogues... Petite remarque dans le texte, ci-dessous, en passant, "l'e-book ou liseuse" relève quand même d'une incompréhension assez incroyable, j'espère que ce n'est pas la 4ème de couverture du livre. Une conférence avec des officiels aura lieu le 28 septembre prochain à la Documentation Française, les détails ici, j'espère que les définitions convenables seront données.

PS: quelques précisions, version epub avec DRM disponible sur iBooks d'Apple. A partir du 15 octobre, disponible sur Fnac.com et Chapitre.com

Les livres dans l’univers numérique

 

Le livre numérique fait la une de l'actualité depuis plusieurs années. Selon de nombreux commentateurs, 2011 devrait voir les «liseuses» ou les tablettes électroniques conquérir le public français pour la lecture des livres, après avoir séduit celui des États-Unis.

L’ouvrage de Christian Robin - maître de conférences en sciences de l’information et de la communication à l’Université Paris XIII - montre que la filière des livres a connu depuis un demi-siècle de nombreuses transformations. La «révolution» apportée par la diffusion numérique des œuvres ne serait donc que la dernière étape de ces mutations.

Première pour les éditions de la Documentation française, cette Étude sera publiée simultanément en version papier et en version numérique.


Le propos de Christian Robin n’est pas de publier un nouveau rapport sur l’avenir du livre numérique (voir les rapports Racine en 2010, Gaymard en 2009, Patino en 2008), mais d’abord de décrire et d’analyser les transformations qui ont déjà eu lieu. Il montre que le numérique n'est pas l'avenir des livres puisqu'il est déjà advenu, que ce soit pour leur création (PAO), leur édition (impression numérique), leur diffusion (sur internet) et, aussi, leur lecture (avec l’e-book ou «liseuse» entre autres). Cette influence multiforme affecte donc depuis longtemps la manière dont nous écrivons, nous lisons et, finalement, nous pensons.

L’auteur étudie les implications du numérique sur la filière éditoriale complète: le rôle de l’éditeur face à des outils professionnels d’aide à l’édition disponibles pour un public plus large et à l’autoédition; les conséquences de la baisse des coûts de production sur les éditions de «niches»; la quasi-disparition de certains secteurs comme les encyclopédies papier; l’accès gratuit à l’information numérisée, etc.

Il montre qu’il faut aussi tenir compte de la diversité des situations: celles des auteurs s’inquiétant de la diffusion de leur œuvre et de la rentabilisation de leur travail; celle des éditeurs qui doivent choisir une stratégie; celle des libraires, maillon le plus vulnérable de la chaîne; celle du lectorat au sein duquel se pose la question de la fracture numérique.

Enfin, il rappelle que les livres ne peuvent pas être envisagés au singulier: chaque secteur éditorial a ses spécificités, chaque type de livre est utilisé de manière différente. Un parallèle avec l’histoire d’autres produits culturels (comme la musique enregistrée qui a changé plusieurs fois de support) complète ce panorama. En définitive, le rôle de l’éditeur restera toujours celui de faciliter le contact des publics avec les œuvres qu’il publie. Mais comment?

Christian Robin, maître de conférences en sciences de l'information et de la communication à l'université Paris XIII, a mené une double carrière comme professionnel des industries culturelles (livres, disques, cédéroms et web) et enseignant. 

Avec la collaboration de François Rouet, statisticien-économiste au sein du Département des études, de la prospective et des statistiques (ministère de la Culture et de la Communication), auteur notamment de l'Étude "Le Livre. Mutations d'une industrie culturelle" (dernière édition 2007).

Les livres dans l’univers numérique

Christian Robin

Collection les Études de la Documentation française

La Documentation française

162 pages, 14,50 euros

Version numérique : 8 euros  TTC


Chroniques de lecture - 26

Chronique Merci à Thierry qui nous revient en cette rentrée avec la reprise de ses chroniques de lecture:

«Après le livre», François Bon, Publie.net
(paru en septembre 2011)

François Bon, auteur rock’n’roll des «Rolling Stones, une biographie», «Bob Dylan, une biographie» et «Rock'n roll, un portrait de Led Zeppelin», mais aussi des romans «Sortie d’usine» (publié en 1982 aux Editions de Minuit qui vient d’être réédité en numérique) et autre «Tumulte», auteur de pièces de théâtre et de nombreux essais, François Bon, dis-je, est aussi éditeur de textes numériques, fondateur du désormais célèbre et incontournable site Publie.net, une sorte de «coopérative d'auteurs» consacrée à l'édition et à la diffusion numériques de littérature contemporaine. Ouf!
Je précise que les livres publiés sur Publie.net sont tous sans DRM et que les droits reversés aux auteurs sont de 50%.
Mais, ce n’est pas fini, François Bon est, avant tout, un amoureux de la littérature. Il écrit et il lit.
Son livre, oui,  j’ai bien dit son «livre» car après tout un livre en epub est un livre aussi, un livre comme les autres qui se lit comme les autres aurait pu s’intituler «Le livre, une biographie» ou bien «Nouvelles technologies, un portrait de lecteur». Et là je trouve que le débat «pour ou contre le livre numérique» me semble, déjà, dépassé et inutile.
Dans son essai «Après le livre», François Bon revient sur les mutations des formes de lecture, des types de supports, des habitudes d’écriture. Ah le beau passage sur le carnet de notes toujours glissé dans la poche avec le stylo qui va avec.
François Bon n’est pas un inconditionnel aveuglé du tout numérique.
Il sait encore «vénérer» le livre papier.
Au même titre que Roger Chartier avec son «Histoire de la lecture dans le monde occidental», il nous propose, déjà, une histoire du livre numérique, une histoire des nouveaux lecteurs et écrivains du tout numérique. Les nouvelles technologies transforment, nous transforment... à nous de refuser toute déformation. Il nous suffit de rester quelque peu vigilant, intelligent.
Après-le-livre C’est un livre instructif, érudit, jamais partisan. Ce «doux fanatique» de Baudelaire et de Balzac nourrit son livre d’anecdotes, d’exemples, d’expériences toujours plaisants. Eveilleur, veilleur de curiosités, il sait nous offrir des réflexions sur hier, aujourd’hui... jusqu’à demain. Nous avons lu, nous lisons et nous lirons. Peu importe le contenant, l’important c’est le contenu.
Il est vrai que l’édition électronique a encore beaucoup de sueurs chaudes devant elle. Les fautes d’orthographe (fautes de copie?), erreurs de ponctuation abondent, la typographie mérite mieux à mon goût tout comme la justification des lignes , bref il y a encore du pain sur la planche (la planche à billets?) pour arriver à un confort de lecture digne d’un livre papier.
Mais là où je rejoins volontiers François Bon, c’est sur les promesses d’une nouvelle écriture numérique contemporaine liées aux inimaginables interactivités que suggère la numérisation.
Il faudra donc rester attentifs et curieux de nouvelles écritures, de nouveaux textes, de nouveaux auteurs.
Nous le ferons dans le cadre de ce «Club des lectures numériques» tout en gardant sous le coude et sans honte aucune un bon vieux Balzac ou Kessel sur un chiffonné papier jauni.
«Qu’importe le flacon... pourvu qu’on ait l’ivresse!» (Alfred de Musset)

T.C.

Livre lu au format epub sur un Opus de Booken dans le cadre du "Club des lecteurs numériques".

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L'Art français de la guerre, Alexis Jenni

Jenni Quel formidable livre! Je l'avais repéré par hasard dans la revue Pages chez mon libraire Coiffard, une double-pages d'entretien, la simplicité du bonhomme "il n'y a rien de marquant dans ma vie, par contre j'ai un goût ancien et profond pour la littérature, mais qui est de l'ordre de l'intime", ma libraire qui me glisse, vous verrez, c'est du bon. C'était dernière semaine d'août, avant toutes les critiques positives qui ont suivies dans la presse. "L'Art français de la guerre" chez Gallimard, un premier roman d'un dénommé Alexis Jenni. Et bien, je dois dire que ce petit éloge glâné, c'était pas du tout surfait. Et nombre de libraires l'avaient aussi repéré pendant l'été. Un gros livre (632 pages) dans lequel on plonge sans jamais rester par moment en surface à patauger. On va jusqu'au bout d'une traite, on en sort lavé, épaté. Un énième livre sur la guerre? Entre les vainqueurs et les victimes? Que nenni. Bien autre chose, un prétexte, un vrai défi, comprendre les vingt ans de guerre française, 1942-1962, dans laquelle on est resté tous avec eux embourbés, englués, ce qui se cache derrière notre malaise par rapport à toute cette période taboue, ces militaires kakis dehors (caca dedans), rasés, un peu vite taxés de "fachos", qui ils sont vraiment, leurs itinéraires dans ces vingts années passées à toute allure, comment nous avons assimilé socialement, depuis, dans notre pays cette idée de la guerre à la "française". Avec les inévitables résonnances sur notre époque contemporaine. Des allers-retours constants entre les différents conflits (maquis de la résistance, Indochine, Algérie) en compagnie d'un para-dessinateur Victorien Salagnon et les conversations entre ce même Salagnon, dans son petit pavillon désuet, et le narrateur qui se rencontrent dans cette banlieue de Lyon d'aujourd'hui, avec ses violences urbaines en toile de fond. Un style épatant, vraiment pour un premier roman, une maitrise de la langue incroyable, tout en fluidité. Sur l'ensemble, vraiment pas grand chose sur lequel on se lasse. Bon, le prix de la version numérique n'est pas donné, mais 632 pages de cette qualité, on ne le regrette pas. Je vais le passer autour de moi. Bien entendu, je me suis empressé de racheter la version imprimée pour ma bibliothèque (21 euros, le meilleur rapport qualité/prix de cette rentrée comme le dit Pierre Assouline, et il a bien raison), parce que ce livre je vais le garder en vue et le relire dans quelques temps, c'est clair. Franchement, je souhaite que cet Alexis Jenni soit au rendez-vous des jurys, quelqu'ils soient début novembre, qu'il aie une visibilité maximale auprès d'un large public. Il le mérite fichtrement le bonhomme et qu'il se remette vite à l'ouvrage, on prend date pour le suivant.

"Lu avec un NookTouch dans le cadre du Club des Lecteurs Numériques", que je suis ravi d'inaugurer avec ce livre! Rien de particulier sur cette version numérique sinon la DRM et le prix, je l'ai évoqué".

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1mn pour convaincre sur un livre

770534 Un format intéressant je trouve, 1mn pour convaincre, trop chrono, c'est ce que propose Lire/L'Express. Un format simple, un face à face facile à mettre en place qui s'affranchit des longs discours, efficace. Voilà qui devrait inspirer particulièrement les libraires. Deux premiers titres, c'est "Limonov" d'Emmanuel Carrère chez POL, et "Une femme fuyant l'annonce" de David Grossman au Seuil. J'ai mis les liens, les publicités malheureusement insupportables.


Le Club des lecteurs numériques : c'est parti!

Logo CLN Je vous avais parlé il y a quelques jours de notre idée à Delphine et moi de créer un club de lecteurs numériques. Et bien, c'est fait! Un grand merci à la petite vingtaine de lecteurs enthousiastes qui nous accompagnent dans l'aventure! Nous étendrons sans doute le club dans quelques temps. Sans doute, pour ceux qui nous suivront le plus!

Pour démarrer, une trentaine de livres de nos bibliothèques que nous mettons en commun, le problème va être pour moi de gêrer ces fichues DRM, pas plus de 6 lecteurs différents au total, mes amis bibliothécaires savent de quoi je parle.

Bienvenue sur le blog dédié avec tous les détails! En plus des critiques des livres, ce sera l'occasion de parler de nos pratiques du numérique, certains expérimentés, d'autres qui découvrent! A bientôt, du côté du Club des lecteurs (et des livres) numériques!

Merci à Delphine sur DelphineBooksandMore.


En avant pour Zanzibar

Tous a zanzibar Après plusieurs polars, je voulais relire cet été quelques classiques de la science-fiction. Pauvreté pitoyable de l'offre numérique en la matière malheureusement. Tous les classiques sont absents, on comprend les réactions d'auteurs comme Ayerdhal récemment. Comment malheureusement s'empêcher de glisser en un clic vers les réseaux parallèles qui s'organisent avec beaucoup d'applications dans ce secteur. Asimov, Herbert, Clarke, K.Dick, Bradbury, Van Vogt, Simak, Simmons, etc. Vous trouverez beaucoup de livres. Je vous conseille particulièrement "Tous à Zanzibar" de John Brunner, un grand classique que j'avais lu avec bonheur dans mon adolescence et qu'une excellente critique m'a remis en tête la semaine dernière. Coincidence heureuse, il vient d'apparaitre aujourd'hui sur un site bien connu. Vous le trouverez en quelques clics. Bref, pas de scrupules, messieurs les éditeurs, vous avez mon bonjour de Zanzibar...


Chasse aux livres sur Android

Chasse Je vous avais parlé de ChasseauxLivres qui vous simplifie la vie pour rechercher les meilleurs prix dans le livre d'occasion. Ils viennent de rendre disponible une application Android sur AndroidMarket qui, associée à BareCodeScanner pour identifier le code-barre, se révèle excessivement pratique pour consulter une ribambelle de sites à la volée. Pour vos smartphones et tablettes, à télécharger absolument!


Métailié: Indridason en numérique

Métailié Plusieurs coups de coeur de lectures pendant ce mois d'août que je vous ferais partager. L'été c'est souvent le temps des polars, l'occasion aujourd'hui de se plonger dans les enquêtes du commissaire Erlendur Sveinsson, des romans d'Arnaldur Indridason aux Editions Métailié dont sept titres sont disponibles en numérique. Bon d'accord, ils restent chers malheureusement comparés à des poches, mais libérés des DRM (bravo Métailié) vous pourrez en faire bénéficier votre entourage proche comme pour vos autres livres. L'occasion de les partager à plusieurs pour faire chuter les prix. Pensez-y. Déjà lus deux d'entre eux, je compte bien écluser la série!


Keep our secrets: l'encre cachée

La créativité des livres n'a pas fini de nous surprendre. La preuve, cet étonnant procédé d'encre thermo-réactive sur le livre de Jordan Crane "Keep our secrets" à paraître aux Etats-Unis pour la fin de l'année. Il n'y a pas que les applications qui excitent la curiosité des tout-petits! Nous devrions sans doute voir ce type de livres chez les éditeurs français bientôt! (via DigitalJournal).

Dans le même ordre d'idée, pour les plus grands, on peut passer ses livres au four pour les lire, voir ce billet sur la Tribune de Genève publié à la fin de l'année dernière.


Dante: nouvelle traduction en version ePub

Enfer En avril dernier, je vous avais parlé du travail de traduction entrepris par Guy de Pernon autour de l'oeuvre de Dante. La version ePub de l'Enfer a été mise en ligne fin juin, vous pouvez la commander à cette adresse. Depuis, Guy s'est lancé dans la traduction du "Lancelot" de Chrétien de Troyes, prévue pour la rentrée de septembre. Tous les détails sur le blog.


Emmanuel Todd avec Arrêts sur Images et Le Publieur

Todd A signaler le magazine bien connu Arrêts sur Images qui a choisi de s'associer au site Le Publieur pour la distribution imprimée et numérique du livre du politologue Emmanuel Todd "Allah n'y est pour rien!". Il est rentré dans l'offre numérique des libraires via ePagine (sans DRM). Vous pourrez feuilleter le premier chapitre ici. Une visibilité nouvelle pour Le Publieur, une très bonne idée d'associer aussi des offres d'abonnements entre livres imprimés et l'accès à Arrêts sur Images, compliments.


Chroniques de lecture - 25

Plume

Petite chronique de Thierry avant de partir, bonnes lectures!

«Les mots savent de nous des choses que nous ignorons d'eux.» René Char

Escorté par deux citations bien choisies, je suis, déjà, ailleurs...
Sur mon dos y’a mon sac à dos, dans mon sac à dos y’a une pt’tite poche, dans une pt’ite poche y’a mon Opus, dans mon Opus, y’a :
Le peuple de l’abîme de Jack London
La guerre des femmes d’Alexandre Dumas
Qu’as-tu fait de tes frères? de Claude Arnaud
une biographie de Jacques Vaché de Bertrand Lacarelle
et puis du Balzac, du Balzac, toujours du Balzac...

A noter qu’une mise à jour est prévue pour l’Opus de Booken à la rentrée de septembre-octobre (dixit Booken en personne !)

Veuillez excuser mon absence momentanée, très dépendante de ma volonté...

En attendant bonnes lectures à tous... et à très bientôt sur ALDUS.

«Acheter des livres serait une bonne chose si l’on pouvait simultanément acheter le temps de les lire.» Schopenhauer

T.C.


Chroniques de lecture - 24

Plume Cet été, cherchez l’or des mots.

Il faut vivre cette "aventure" pour comprendre l'émotion que l'on a en trouvant quelques paillettes d'or parmi des tas de cailloux dans le courant d’un roman. Cette activité n'est pas très rentable financièrement pour un amateur car il faut des semaines, des mois, des années, voire de toute une vie de lectures acharnées pour extraire un gramme d'or...

Alors je vous propose dix pépites, toutes à petits prix (moins de 10€ à télécharger en epub où bon vous semble) :

Le banquier anarchiste de Pessoa
Les heures silencieuses de Josse
Sur la plage du Chesil de McEwan
Bienvenue au club de Coe
La patience des buffles sous la pluie de Thomas
Jan Karski de Haenel
Météorologie du rêve de Samoyault
Illusions perdues de Balzac
Rhum de Cendrars
Le sang noir de Guilloux

Ou comment s'enrichir sans trop se ruiner...

Cet été, "par les soirs bleus, le long des vieux faubourgs, où pendent aux masures les persiennes, abri des secrètes luxures, sur les villes et les champs, dans les sentiers, picoté par les blés, fouler l'herbe menue, allez loin, bien loin, comme un bohémien, en homme libre, toujours tu chériras ce livre, ton miroir où tu contemples ton âme, dans le déroulement infini des vagues de papier ..."
(avec l'aide de Baudelaire et Rimbaud)

T.C.


Chroniques de lecture - 23

Plume Petit billet surprise de notre ami Thierry!

"Voilà, j'avais envie d'écrire ça ce soir, sur la littérature, à partir de trois livres téléchargeables en epub.
A bientôt, Thierry".

«Ce que peut la littérature»
(téléchargeable en epub, par exemple sur Ombres Blanches)

Cher lecteur, à quelle bibliothèque (électronique) confiez-vous votre destin?

Et à quoi sert la littérature?
Peut-être à essayer de vivre selon les nuances car la littérature est «maîtresse des nuances» disait Barthes.
La littérature «s'embarrasse» de nuances. Ne se sépare de personne.
Elle s’intéresse aux différences, aux subtiles différences, aux sensibles singularités.
Elle veut comprendre. Raconter. Regarder. Éclairer l’existence.
Teinter la vie. Sucrer, saler la vie.
La littérature aide à respirer. Reprendre souffle. A souffler, un peu. Sûrement!

La philosophie, elle, ne s'embarrasse pas de nuances.
Elle veut expliquer la nature humaine. Célébrer la perfectibilité.
Résoudre le monde.
La philosophie aide à marcher. A marcher droit. A suivre. Trop sûrement!

En ce sens, la littérature apparait comme dangereuse.
Dangereuse comme l’incontrôlable ennui, à l’heure tortueuse du «travailler plus pour...»
L’ennui, compagnon complice du lecteur.
L’ennui, cet «oiseau qui couve l’oeuf de l’expérience», écrivait Benjamin.
L’ennui des longues après-midi qui rallonge la vie comme le soleil les ombres.
Cet ennui, donc, celui qui, à l’ombre de l’arbre, échappe le livre trop lourd dans l’herbe haute. Celui qui échappe à tous les pouvoirs.
«Il faudrait que le livre pèse un gros poids d’objet et de chair», écrivait Camus.

Les enfants, aujourd’hui, savent-ils encore s’ennuyer?
Dans un roman, il faut faire «passer amoureusement le monde» disait Barthes.
Le lecteur de roman, élève de Socrate, se soumet alors, volontairement parfois involontairement souvent, à une merveilleuse maïeutique.
Il sort de son narcissisme, se regarde... de loin, s’éclaire dans le «passage» du livre. Il prend un chemin, un sentier. Il sort des autoroutes battues et rebattues.
Il se «sépare des échanges de convention.» (Haenel)
Lecteur, passager particulier, libre, seul, hors temps...

Ce recueil d’entretiens animés par Finkielkraut est un vrai bonheur de lecture.
Autour de la table: Mona Ozouf, Jean-Claude Passeron, Philippe Sollers, Valérie Zenatti et bien d’autres.
Sur la table: Camus, Roth, Céline, Aragon, Pasternak et bien d’autres.

Au-dessus, au-dessus de tout, la littérature!
Non, non et non, je ne lis pas pour m’évader... mais pour reprendre mon souffle!
Pour mieux RE-PARTIR...
Un livre à lire... obligatoirement!

A compléter avec le tout aussi remarquable «Un coeur intelligent» de Finkielkraut (écrit tout seul cette fois, téléchargeable en epub) où l’auteur tente de déchiffrer, de défricher Conrad, James, Kundera, Dostoïevski, Roth, Grosman et d’autres romanciers indispensables.

A télécharger également en epub le «Pourquoi lire?» de Charles Dantzig qui dit: «Voilà pourquoi la lecture n’est pas contre la vie. Elle est la vie, une vie plus sérieuse, moins violente, moins frivole, plus durable, plus orgueilleuse, moins vaniteuse, avec souvent toutes les faiblesses de l’orgueil, la timidité, le silence, la reculade. Elle maintient, dans l’utilitarisme du monde, du détachement en faveur de la pensée. Lire ne sert à rien. C’est pour cela que c’est une grande chose. Nous lisons parce que ça ne sert à rien.»

Rappel des trois livres disponibles au format epub:
"Ce que peut la littérature" sous la direction de Finkielkraut
"Un coeur intelligent" de Finkielkraut
"Pourquoi lire?" de Charles Dantzig

T.C.

PS: Aldus: J'ajouterais ce passage que je viens de relever dans le remarquable "Céline" de Henri Godard qui vient de sortir chez Gallimard.

"On peut juger de la bonté d'un livre, écrit Flaubert, à la vigueur des coups de poing qu'il vous a donnés et à la longueur du temps qu'on est ensuite à en revenir." (Lettre à Louise Collet du 18 juillet 1853)

Soyez sur votre garde et bonnes lectures!